Est-ce un réveil tardif qui contribuera à remettre un tant soit peu d’ordre dans un secteur où les travaux de réalisation trainent souvent la patte et le respect des délais impartis relèvent quasiment du domaine du miracle ?
Par Mohamed Naïli
C’est à cet impératif que tente de répondre le ministère de l’Habitat, de l’urbanisme et de la ville à travers de nouvelles mesures en préparation pour redéfinir les règles de jeu dans la gestion de l’activité de la promotion immobilière. En effet, le Directeur général du logement au sein dudit département ministériel, M. Mohamed Merdjani, a fait état hier de « plusieurs procédures et lois » qui sont en cours de révision dans le but d’adopter de nouvelles mesures, notamment celles régissant le logement participatif aidé (LPA).
Parmi les nouvelles mesures attendues pour les mois prochains, celles qui attirent l’attention le plus sont sans doute celles prévoyant des dispositions coercitives à l’encontre des promoteurs immobiliers peu enclins à respecter les engagements contractuels en matière de réalisation des projets qui leur sont confiés dans les délais.
Sur ce point, le directeur du logement au ministère de l’Habitat n’a pas été moins précis en affirmant que les nouvelles mesures actuellement à l’étude auront pour objectif de permettre à la tutelle et ses démembrements au niveau des wilayas de « poursuivre en justice les promoteurs défaillants pour leur retirer les terrains qui relèvent du domaine privé de l’Etat » qui leur ont été attribués.
Si le ministère de l’Habitat a opté pour l’adoption de telles mesures c’est parce qu’actuellement « plusieurs dossiers sont devant la justice », a indiqué M. Merdjani tout en reconnaissant que, dans le volet relatif au programme LSP (logement social participatif), « les lois en vigueur ne permettent pas de prendre des mesures à l’encontre des promoteurs défaillants ». C’est sans doute la raison pour laquelle une certaine anarchie règne dans la gestion des programmes LSP à travers les différentes wilayas du pays, avec des retards atteignant, voire dépassant, les 10 années, alors que les souscripteurs sont condamnés à attendre, étant dans l’incapacité de récupérer leurs fonds dans les cas où ils souhaitent se désister.
Mesures coercitives
Toutefois, coercitives soient-elles, les nouvelles procédures en cours de préparation donnent une marge de manœuvre aux promoteurs immobiliers pour qu’ils se ressaisissent et rattraper les retards avant que la tutelle n’opte pour une décision radicale, qui est le retrait du projet. « Avant de saisir la justice à l’encontre d’un promoteur défaillant en raison du non-respect des délais de réalisation par exemple, deux mises en demeure lui sont adressées par le directeur du domaine de l’Etat, après quoi la décision du retrait du projet est prise au niveau du comité technique de wilaya sur la base du rapport du Directeur local de l’Habitat », a expliqué M. Merdjani à cet effet.
Outre les programmes de logement aidé par l’Etat dans le cadre des dispositifs assurés par la CNL (Caisse nationale du logement), les défaillances ne se limitent pas seulement au non-respect des délais de réalisation mais touchent toute la chaîne du choix de l’assiette foncière jusqu’à la livraison, en passant par les matériaux utilisés, le respect des normes et la qualité des finitions. Depuis quelques jours, une banque publique mène une campagne publicitaire pour un nouveau produit qu’elle vient de lancer et destiné aux acquéreurs de nouveaux logements. Le produit consiste en un prêt bancaire pour « le réaménagement intérieur des logements nouvellement acquis ». Contracter un prêt bancaire pour refaire un logement neuf censé être réceptionné entièrement achevé en dit long en effet sur le bâclage des travaux par les entreprises de réalisation.
Au niveau des centres urbains, les promotions immobilières qui se rendent coupables d’empiétement sur la voie publique ou sur la propriété d’autrui se comptent en dizaines ou en centaines. Certes, des lois censées lutter contre des atteintes de ce genre sont promulguées, mais elles ne sont pas de nature à dissuader les promoteurs immobiliers et les entreprises de réalisation du fait qu’elles ne prévoient pas des sanctions sévères ou des mesures coercitives à l’encontre des contrevenants. Lorsque l’on sait que, par exemple, la démolition des bâtisses non conformes ou réalisées sans respect de la réglementation en vigueur n’est jamais prononcée par la justice, les promoteurs immobiliers continuent leurs agissements illégaux dans la mesure où ils sont conscients que leurs gains lucratifs sont beaucoup plus importants que les sanctions qui pourraient être prononcées à leur encontre.
Parfois, les anomalies et les infractions commises mettent en danger la vie des citoyens lorsqu’elles concernent la qualité des matériaux utilisées et les normes de construction. Le cas du séisme de 2003 qui a dévasté les wilayas de Boumerdès et Alger est éloquent mais ce drame a-t-il servi de leçon ? Certes, il y a eu depuis de nouvelles lois pour lutter contre les magouilles et autres tricheries en la matière, mais leur application est peu suivie.
M. N.