Exit l’époque où les prix étaient encore fixés par l’administration centrale. Aujourd’hui, c’est la logique du marché qui prévaut avec l’un de ses principes, la liberté des prix. Soumis à la règle de l’offre et de la demande, les prix sont donc déterminés par le marché, du moins théoriquement. Car en vérité, le marché est toujours sous la mainmise de spéculateurs et du marché informel. C’est dans le but de réguler, un tant soit peu, le marché national que les pouvoirs publics ont entrepris et particulièrement en ce mois de Ramadhan, de multiplier les contrôles. A ce titre, plus de 35.000 interventions ayant donné lieu à l’enregistrement de quelque 3.500 infractions, ont été enregistrées rien que pour les 10 premiers jours du Ramadhan, par les services de contrôle économique et de répression des fraudes.
Par Réda Hadi
Les actions des services de la répression des fraudes ont, en effet, permis de saisir une quantité de 39,4 tonnes de marchandises non conformes ou périmées, d’une valeur de 15,243 millions Da, sur 3.535 infractions dont 3.378 procès-verbaux pour défaut de présentation de factures.
En effet, pour M. Billel Laouali expert financier, ces chiffres montrent à quel point la résolution du problème de l’informel est une question de survie économique. Pour lui, «les contrôles qui se font ne le sont pas pour faire baisser les prix, car l’Etat n’a pas à intervenir dans la fixation des prix qui se fait selon l’offre et la demande, et il ne peut être, dans une certaine mesure, que le régulateur. Or, l’Etat pour faire baisser les prix déstocke. Ce qui oblige les spéculateurs ou grossistes à s‘orienter vers lui pour s’approvisionner vu que sur le marché c’est plus cher. Mais cela en fait, n’est qu’un leurre. L’Etat ne fait pas baisser les prix, mais dans ce cas là, il sanctionne juste le commerçant pour non présentation de facture. Il joue sur la répression » a-t-il affirmé.
Par ailleurs, pour lui, l’Etat ne contrôle que ceux qui ont des commerces légaux. Qu’en est-il alors de ces légions qui occupent nos trottoirs et le moindre de nos espaces pour vendre tout et n’importe quoi ?
Pour M. Laouali, il faut avant de contrôler, avoir une économie forte et saine. Pour cet expert, c’est le manque de culture de consommation qu’il faut prendre en compte aussi : «Si le citoyen avait une culture de consommation, il n’achèterait pas un produit qu’il sait cher. En ce sens, la politique du boycott est une bonne chose. Car cela va amener le commerçant (ou le producteur) à faire baisser les prix, vu que son produit n’est pas écoulé. Mais notre politique à nous, est d’acheter à tout prix.», a-t-il signifié.
La facturation, seul moyen de contrôle
L’Etat devrait selon lui «habituer les commerçants à exiger la facture au producteur. Et pourquoi ne pas envisager des facilitations et des exonérations de taxes pour les commerçants qui utilisent la facture. Cela les feraient habituer au système de facturation et rendrait plus claires les opérations»
Par ailleurs, en parallèle à cela, «c’est tout le circuit de distribution ainsi que le nombre d’intermédiaires qu’il faut revoir» a-t-il conclu.
Face aux hausses des prix, certains demandent à ce que l’Etat intervienne directement, au risque de revenir à l’époque du dirigisme. Beaucoup n’hésiteront pas à tailler en pièces les commerçants qui fouleraient aux pieds les bases de l’économie de marché. D’autres pointeront du doigt l’incivisme de l’Algérien qui achète plus qu’il n’en a besoin, provoquant, du coup, pénuries et autres envolées des prix. Des arguties toutes trouvées car les vrais problèmes sont ailleurs. Il y a d’abord l’implacable loi de l’offre et de la demande qui, dans un contexte de rareté, impose sa logique froide : quand un produit est trop demandé, son prix s’envole presque mécaniquement. Et cela fait des années, voire des décennies, que le problème de l’augmentation des prix à chaque arrivée du mois de jeûne, se pose et, à ce jour, on n’a pas pu le juguler.
La multiplication des contrôles sera-t-elle efficace ?
Beaucoup disent que temporairement, oui, elle le sera. Mais pour une courte durée. Car l’été aussi apporte avec lui sa hausse des prix, particulières pour les fruites et légumes, surtout en cette période de stress hydrique. Dans ce secteur (agriculture), imposer la facturation ne sera pas chose aisée, du fait du monopole du marché parallèle.
La stabilité des prix de ces produits est tributaire de l’organisation de la production agricole, de la maîtrise des marchés de gros et de l’imposition rigoureuse de la facturation.
De plus, les cas de surproduction, amène souvent les agriculteurs à se débarrasser de leur production de légumes pour éviter les frais engagés dans le processus de récolte sans pouvoir les écouler.
L’équation n’est pas simple, mais il faut la résoudre.
R. H.