L’Algérie, historiquement dépendante des hydrocarbures, s’efforce depuis plusieurs années de diversifier son économie afin de réduire sa vulnérabilité face aux fluctuations des prix du pétrole et du gaz. L’objectif principal de cette diversification est de stimuler les secteurs non pétroliers tels que l’agriculture, l’industrie, le tourisme et les services, dans le but de créer une économie plus résiliente et moins dépendante des ressources naturelles épuisables. Ce processus a conduit à des réformes et à la mise en place de politiques visant à encourager l’investissement dans des secteurs alternatifs et à améliorer l’attractivité du marché algérien pour les investisseurs étrangers.
Par Dr. MELLAB Kahina (*)
Cependant, malgré ces efforts considérables, la diversification de l’économie algérienne reste un défi majeur. Les exportations non pétrolières, bien qu’en croissance, demeurent encore marginales par rapport aux exportations d’hydrocarbures. Entre 2019 et 2023, les exportations hors hydrocarbures ont représenté environ 14 % du PIB et 86 % des exportations totales du pays.
Cela met en lumière la dépendance persistante de l’Algérie aux hydrocarbures, malgré les tentatives de diversification. En 2023, les exportations hors hydrocarbures ont totalisé 5,05 milliards USD, une baisse par rapport à l’année précédente où elles s’étaient élevées à 5,9 milliards USD.
Cette baisse des exportations non pétrolières est préoccupante, car elle suggère des difficultés à maintenir la dynamique de diversification dans un contexte global de tensions économiques et de faible compétitivité des produits algériens sur les marchés internationaux.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette situation, notamment les défis structurels auxquels le pays fait face, tels que la faiblesse des infrastructures industrielles, la qualité variable des produits, un secteur privé en développement mais encore immature, ainsi que des restrictions bureaucratiques et un environnement d’affaires parfois complexe et peu transparent.
L’Algérie a mis en place plusieurs initiatives pour encourager l’exportation de produits non pétroliers, comme des incitations fiscales et des facilités d’accès aux marchés internationaux. Toutefois, les résultats restent en deçà des attentes, et l’exportation de produits manufacturés et agricoles demeure limitée.
En effet, la majeure partie des exportations hors hydrocarbures se concentre sur des produits semi-finis et des matières premières, ce qui ne permet pas au pays de tirer pleinement parti de la valeur ajoutée. La question de la diversification reste donc un enjeu clé pour l’avenir économique de l’Algérie.
Afin d’inverser cette tendance et de renforcer sa position sur les marchés mondiaux, l’Algérie devra redoubler d’efforts pour améliorer la compétitivité de ses secteurs industriels, encourager l’innovation, investir dans la formation des ressources humaines, et faciliter l’accès à la finance pour les petites et moyennes entreprises (PME).
Agroalimentaire
L’agriculture algérienne possède effectivement un potentiel considérable grâce à ses vastes terres arables et son climat diversifié. Le pays jouit d’une grande variété de ressources agricoles, notamment des produits emblématiques comme les dattes et l’huile d’olive, qui jouissent déjà d’une reconnaissance à l’international.
Ces produits sont non seulement cultivés en grande quantité, mais l’Algérie pourrait également développer son industrie agroalimentaire pour répondre à une demande mondiale croissante.
Cependant, plusieurs obstacles empêchent une exploitation optimale de ce potentiel. Malgré la richesse des terres agricoles, le secteur agroalimentaire algérien reste sous-développé. Une partie importante des produits agricoles est destinée à la consommation interne, avec une faible part consacrée à l’exportation.
Le pays dépend fortement des hydrocarbures pour ses revenus d’exportation, et l’agriculture pourrait jouer un rôle plus important si elle était mieux valorisée. L’absence d’une stratégie claire pour encourager les exportations agroalimentaires, en particulier au-delà des produits traditionnels comme les dattes et l’huile d’olive, est un frein à la diversification économique.
Le secteur agroalimentaire algérien souffre d’un manque de compétitivité sur le marché international. Les coûts de production restent relativement élevés, principalement en raison des contraintes logistiques et du manque d’innovations dans les techniques de production et de transformation.
Par ailleurs, les producteurs locaux peinent à s’adapter aux exigences des marchés mondiaux, notamment en termes de qualité et de normes sanitaires.
La mise en place d’infrastructures de qualité, la modernisation des techniques agricoles et l’amélioration de la formation des acteurs du secteur pourraient contribuer à renforcer cette compétitivité.
L’un des principaux défis de l’agriculture algérienne réside dans le faible niveau de transformation industrielle des produits agricoles. L’essentiel de la production reste brute, ce qui diminue sa valeur ajoutée.
L’Algérie dispose de quelques unités de transformation, mais leur capacité est insuffisante pour répondre aux besoins du marché local, encore moins pour conquérir les marchés internationaux.
La mise en place d’usines modernes, la promotion de l’innovation technologique dans la transformation alimentaire et la diversification des produits transformés (pâtes, conserves, produits dérivés) sont des leviers essentiels pour augmenter la rentabilité du secteur.
L’un des défis majeurs du secteur agroalimentaire en Algérie est le manque d’infrastructures logistiques adéquates. Le transport et le stockage des produits agricoles restent problématiques en raison de l’insuffisance des infrastructures routières, portuaires et de stockage.
Cela conduit à des pertes importantes lors de la récolte, notamment pour les produits périssables, et réduit l’efficacité du secteur dans son ensemble. Une révision en profondeur du système logistique, y compris la mise en place de zones de stockage modernes et la réduction des coûts de transport, est indispensable pour améliorer la compétitivité du secteur.
Le secteur agricole algérien est également confronté à des défis environnementaux majeurs, tels que la dégradation des sols, la rareté de l’eau et les effets du changement climatique. La gestion durable des ressources naturelles devient une priorité afin de maintenir la productivité agricole à long terme.
La mise en œuvre de pratiques agricoles durables, la gestion efficace de l’eau et l’adoption de technologies vertes pour la production et la transformation sont essentielles pour assurer la pérennité du secteur agroalimentaire.
Des efforts sont cependant en cours pour relever ces défis. Le gouvernement algérien a mis en place plusieurs initiatives visant à soutenir le secteur agroalimentaire, notamment à travers des subventions, la facilitation de l’accès au crédit pour les agriculteurs et les producteurs, ainsi que la promotion de l’agriculture moderne et des pratiques durables.
De plus, la diversification de l’économie nationale et la volonté de réduire la dépendance aux hydrocarbures ont incité les autorités à accorder une plus grande importance à l’agriculture. L’agriculture algérienne possède un potentiel énorme, mais elle fait face à des défis structurels importants qui limitent son développement.
La compétitivité, la transformation industrielle et les infrastructures logistiques sont des points clés qui nécessitent une attention particulière pour permettre au secteur agroalimentaire de jouer un rôle plus important dans l’économie nationale et d’accroître ses exportations.
En surmontant ces obstacles, l’Algérie pourrait non seulement valoriser ses ressources agricoles mais aussi diversifier son économie, réduisant ainsi sa dépendance aux hydrocarbures.
M. K.
(* ) Enseignante – Chercheur ; Maitre de recherche classe -BDivision Macroéconomie et Intégration Economique Centre de Recherche en Economie Appliquée pour le Développement CREAD.
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