L’Algérie s’est lancée, dès le début des années 2000, dans une politique d’insertion professionnelle, pour résorber un taux de chômage exponentiel, à travers des dispositifs, tels que l’Anade (Ex- Ansej), Cnac, ou l‘Angem. A ce titre, le directeur général de L’Angem (agence nationale de gestion des microcrédits) a annoncé le déblocage de 62 milliards DA de prêts accordés pour financer 933.000 projets.
Si en soi, ces dispositifs sont censés résorber un chômage endémique, l’absence de statistiques fiables ne permet pas de déterminer les contours des réussites ou des échecs des projets.
Pour de nombreux analystes, l’exemple algérien avec la création de ces dispositifs, est unique au monde. Tous insistent pour dire qu’aucun pays n’a pris une telle mesure incitative envers sa jeunesse comme l’Algérie. Mais tous s’accordent à dire, aussi, qu’au delà de son aspect politique, du point de vue économique, la réussite n’a pas toujours été au rendez-vous.
Le cas de l’échec de l’Ansej est assez édifiant, au point où le ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la Micro-entreprise, annonce que le gouvernement veut récupérer ce qu’il peut des entreprises créées dans la cadre de cette agence, pour ainsi minimiser le taux d’échecs et des difficultés qui avoisine les 70% dans ce dispositif. En termes de chiffres, il a souligné que sur les 380 000 entreprises créées dans le cadre du dispositif Ansej, plus de 70% sont actuellement en crise et n’arrivent pas à rembourser leurs crédits, nécessitant, notamment, le retraitement de leurs créances conjointement avec les banques.
L’aspect économique délaissé
Pour M. Nabil Djemaa, expert financier agréé, ces dispositifs bien que salutaires en soi, n’en demeurent pas moins privés de l’aspect économique qui a été totalement occulté pour celui du politique. «L’Algérie avec un pétrole à 145 dollars (à l’époque) et en surliquidités, a entrepris, pour calmer la tension sociale qui commençait à s’exercer particulièrement après les inondations de Bab El-Oued en 2001, et ce que l’on appelle le printemps arabe en 2011, de distribuer de l’argent par le biais de ces dispositifs» a-t-il affirmé.
Et là où le bât blesse, c’est que ces agences, au delà de donner de l ‘argent, n’ont fait montre d’aucune efficacité en matière d’observation de la loi et de suivi.
«Les responsables de ces agences ne se sont contentés d’octroyer des prêts que dans les transports. Le tissu des PME/PMI a été complètement négligé. De plus, même les porteurs de projets de transport n’ont pas été aidés. Je précise que si ces jeunes sont maintenant en faillite, c’est en partie du fait que les 25 % des projets qui devaient être octroyés à ces jeunes, ne l’ont pas été. Pire, ces jeunes, grisés par l’octroi des prêts, n’ont pas été orientés vers des spécialistes, plus aptes à les renseigner sur des créneaux autres que le transport, qui s’en est trouvé saturé», a soutenu l’expert tout en précisant, toutefois, que des exemples de réussite existent. «Le cas de la ville de Sétif est remarquable. Le wali a donné le marché des transports de déchets à des jeunes de l’Ansej. Résultats, Sétif est l’une des villes les plus propres de notre pays. Les aides ont été fonctionnarisées. C’est ce qui a coûté le plus», a continué M. Nabil Djemaa.
Une aide sans suivi ni conseil
Si les jeunes se retrouvent endettés, « c’est que l’Etat, hormis d’être le pourvoyeur financer, a été inefficient en matière de suivi et de conseils. Pourtant ces aides pouvaient atteindre le milliard de centimes. Ce qui est énorme et difficile à gérer. C’était l’occasion de développer nos PME/PMI. Mais on est passé à côté» a-t-il conclu, regrettant, au passage, ces années perdues car, selon lui, on s’en serait sortis autrement.
Tous les observateurs disent que l’essence même de ces aides a été dévoyée par une administration peu efficace et non initiée.
Réda Hadi