Vice-présidence du Conseil International des Céréales (CIC): Les enjeux de l’élection de l’Algérie

Céréales : Vers l'autosuffisance en blé dur d'ici à 2027

Après l’ONU et diverses autres instances régionales et africaines, l’Algérie vient d’être hissée au rang d’acteur majeur du marché mondial des céréales après son élection ce jeudi au poste de vice-présidente du Conseil International des Céréales (CIC).

Par Mourad Allal

Selon un communiqué du ministère de l’Agriculture et du Développement Rural, les membres de cette organisation intergouvernementale ont élu à l’unanimité, pour la période 2023-2024, l’Algérie à ce nouveau poste, alors que les Etats unis assurent la présidence du Conseil avant de remettre leur mandat à l’Algérie à son expiration.

Tandis qu’elle vient d’être également réélue en qualité de membre de la Commission administrative, une des trois principales structures de cette instance, avec les commissions du budget et des exigences des marchés, l’élection de l’Algérie à la vice-présidence du CIC est perçue par le ministère de l’Agriculture comme une action qui « reflète une fois encore la confiance placée par les pays membres en l’Algérie, eu égard à sa contribution au sein du CIC à travers son engagement à garantir la stabilité et l’efficacité des marchés mondiaux des céréales, outre sa contribution à réaliser la sécurité alimentaire des pays membres et à élargir les consultations entre les pays importateurs et exportateurs », souligne le communiqué du ministère.

Parallèlement à son élection en qualité de vice-présidente du CIC, l’expérience pionnière de l’Algérie dans le renforcement de la sécurité alimentaire et le développement des filières agricoles a été présentée par le représentant du ministère de l’Agriculture au Forum mondial de ce Conseil qui a eu lieu à Londres les 12 et 13 juin.

A cette occasion, « les pas franchis en matière de développement des filières agricoles, notamment les filières stratégiques, et l’expérience pionnière de l’Algérie avec ses programmes visant la réalisation de la sécurité alimentaire dans un contexte mondial en pleine mutation » ont été présentés devant les membres du CIC, selon le département d’Abdelhafidh Henni.

Mis en place en 1995, pour remplacer le Conseil International du Blé (CIB), lui créé en 1934, le Conseil International des Céréales regroupe tous les pays ayant ratifié la Convention sur le commerce des céréales, adoptée elle aussi en 1995, qui sont l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Arabie Saoudite, l’Argentine, l’Australie, le Canada, la Corée du sud, la Côte d’Ivoire, Cuba, l’Egypte, les Etats-Unis, l’Inde, l’Iran, l’Iraq, le Japon, le Kazakhstan, le Kenya, le Maroc, la Norvège, le Pakistan, la Russie, la Suisse, la Tunisie, la Turquie, l’Ukraine, l’Union européenne et le Vatican.

Tel qu’il est conçu, le Conseil international des céréales a pour mission la surveillance de l’exécution de la Convention sur le commerce des céréales (CCC), débattre de l’évolution et de l’orientation des marchés céréaliers mondiaux et d’assurer un suivi des modifications apportées aux politiques céréalières nationales et de leurs implications pour le marché.

Quant à l’Accord international sur les céréales, conclu en 1995, il regroupe les pays exportateurs et importateurs de céréales et il est scindé en deux conventions, la première porte sur le commerce des céréales et la seconde convention est relative à l’aide alimentaire, ayant pour but la mise à la disposition des pays sous développés au moins 10 millions tonnes/an de céréales.

Un rôle central pour stabiliser les approvisionnements et les prix

Modifiée à deux reprises pour intégrer à ce mécanisme mondial du commerce des céréales le riz à compter du 1er juillet 2009 et les oléagineux à compter du 1er juillet 2013, la Convention sur le commerce des céréales assure un encadrement au partage d’informations, l’analyse et les consultations sur le marché mondial des céréales dans l’objectif de, stipule-t-elle, « favoriser la coopération internationale dans tous les aspects du commerce des céréales, le développement du commerce international des céréales et d’assurer que ce commerce s’effectue le plus librement possible, de contribuer à la stabilité des marchés internationaux des céréales ».

Intervenant dans le contexte actuel, où le marché mondial des produits agricoles de base, principalement le blé, subit de fortes tensions dues aux effets de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, deux principaux fournisseurs mondiaux de céréales, cette élection à ce poste stratégique au sein du CIC est une opportunité pour l’Algérie de jouer un rôle clé sur le marché mondial du blé.

Tous les regards de la communauté internationale sont braqués ces derniers jours en effet vers l’accord sur les céréales ukrainiennes conclu en 2022 avec la Russie, et parrainé par les Nations unies et la Turquie, afin de garantir la mise en place d’un couloir maritime pour l’exportation des céréales de l’Ukraine, et ce, parce que Moscou vient de menacer de ne pas s’associer à sa reconduction, alors qu’il arrive à expiration en juillet prochain. La menace de se retirer de cet accord est motivée par la Russie par la non-exécution d’un autre accord permettant l’exportation des produits agricoles et engrais russes.

Tenant compte de la solidité des relations entre Alger et Moscou, tel que cela vient de se vérifier avec la récente visite d’Etat du président Tebboune à l’invitation de son homologue Vladimir Poutine, et l’accueil solennel qui lui a été réservé au Kremlin, d’aucuns misent sur une intervention judicieuse de l’Algérie, de surcroît en sa qualité de vice-présidente du CIC, pour amener les différentes parties à reconduire l’accord sur les céréales ukrainiennes, bien qu’elle n’y soit pas dépendante, mais pour éviter ainsi de nouvelles tensions sur le marché mondial du blé, comme cela a été le cas en été dernier, où les cours de cette céréale ont atteint des pics historiques, ayant avoisiné les 500 dollars/tonne.

M. A.

À l’instar des producteurs français et italiens: Grand intérêt pour le marché algérien du blé en Europe

Que ce soit pour la production ou le commerce, les opérateurs européens du secteur céréalier scrutent de près le marché algérien des céréales, notamment dans son segment blé.

Se penchant sur les perspectives du commerce du blé dans le pourtour méditerranéen lors de son récent congrès qui s’est tenu à l’Institut du monde arabe à Paris, l’Association générale des producteurs français de blé (AGPB) ont longuement exposé les perspectives du marché algérien qui, ont-ils estimé, représente 10% des récoltes de blé tendre en Hexagone. 

Plus largement, les cinq pays d’Afrique du nord, à savoir l’Algérie, l’Egypte, la Lybie, le Maroc et la Tunisie, représentent un tiers des exportations françaises en la matière, alors que l’Egypte, fortement dépendante du marché mondial des céréales, avec pas moins de 215 millions tonnes durant les 20 dernières années, importe en moyenne 30 000 tonnes/jour, a illustré l’analyste Sébastien Abis, Directeur général du club Demeter.

Si les acteurs de la filière céréalière en Hexagone semblent intéressés par le blé tendre, en Italie c’est la production du blé dur en Algérie qui suscite un vif intérêt. C’est le cas du leader italien Bonifiche Ferraresi SPA à qui 900 hectares viennent d’être attribués pour la production du blé dur en partenariat avec le groupe algérien Copre Sud dans le cadre du programme de développement de l’agriculture saharienne mis en œuvre depuis 2021.

M. A.

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