La stratégie de développement forestier, telle qu’elle s’articule sur les nouvelles orientations de l’Algérie sur le plan économique, mais également sur le plan de l’adaptation aux changements climatiques en cours, projette le secteur des forêts dans une double ambition : contribuer à la diversification économique du pays, en assurant une part de l’effort tendu vers la sécurité alimentaire du pays et garantir les fonctions de protection de l’environnement sous toutes ses déclinaisons- sol, flore, faune, eau…-, aussi bien par le moyen du patrimoine forestier actuel, évalué à 4,1 millions d’hectares, que par les nouvelles plantations en cours ou inscrites dans des programmes à cours et moyen termes.
Par Amar Naït Messaoud
A la fin du mois dernier, la Direction générale des forêts a communiqué le bilan de la production forestière pour l’année écoulée (2024), se cristallisant dans le montant global de plus d’un milliard de dinars représentant l’exploitation du bois, avec 666,2 millions de dinars, la récolte du liège, avec un revenu de 336,8 millions de dinars, et l’exploitation de divers autres produits forestiers pour un montant de 4,3 millions de dinars.
Par ailleurs, parmi les services que la forêt fournit aux ménages ruraux riverains, il y a location des clairières- par procédure d’amodiation- pour des usages agricoles (arboriculture fruitière, céréales, élevage d’abeille…). Cette prestation a donné lieu, au cours de l’année 2024, à une recette de 128 millions de dinars.
Le liège, quant à lui, en tant que ressource stratégique, matière première transformable en produits finis (bouchons de bouteilles, isolation thermique et phonique, carrelage d’embellissement, revêtement mural et de parquet), est produit pour un volume annuel moyen allant de 60 000 à 80 000 quintaux. «Une meilleure gestion et une exploitation plus rationnelle des peuplements permettraient d’accroître cette production à moyen terme», estime la DGF.
Nouvelles perspectives
Outre les produits traditionnels fournis par la forêt, la perspective se dessine aujourd’hui pour certains produits du terroir (arbouses, azéroles, châtaignes, pistaches, graines de pin pignon, glands de chêne…), les plantes médicinales et aromatiques (lentisque, lavande, cistes, myrte, genévriers) et d’autres sous-produits, à l’image de la résine de pin et de la gemme.
Naturellement, pour leur exploitation commerciale, avec une valeur ajoutée économique, ces produits ou sous-produits de la forêt sont appelés à susciter la formation des filières et à suivre la chaîne de valeurs que le protocole d’exploitation réserve pour chaque produit.
En tous cas, comme le souligne l’administration des forêts dans son bilan, «la forêt algérienne recèle des potentialités en divers produits qui, pour peu qu’ils soient valorisés, pourraient contribuer sensiblement au développement de l’économie locale et nationale et assurer une augmentation substantielle des revenus des populations concernées».
Le créneau lié à l’exploitation des produits forestiers-ligneux et non ligneux- participe à la diversification des activités économiques telle qu’elle s’impose de manière déterminante dans le contexte actuel où l’économie nationale tend, progressivement, à se délester de sa dépendance étouffante par rapport aux hydrocarbures. Les différents secteurs d’activité sont appelés à recenser toutes les potentialités existantes et à se projeter dans le court, le moyen et le long termes.
C’est dans cet objectif que, à plusieurs occasions, des réflexions inhérentes au nouveau rôle que peuvent jouer les espaces forestiers, en tant que producteur de valeur ajoutée dans le cadre du développement durable ont été engagées.
La loi nouvelle régissant le secteur des forêts, promulguée en décembre 2023 et portant l’intitulé «Loi relative aux forêts et aux richesses forestières» ouvre de nouvelles perspective à la forêt algérienne, aussi bien dans le volet de la protection du patrimoine que dans sa gestion, son développement et son extension.
La prise de conscience pour protéger et préserver les espaces forestiers et leurs ressources faunistiques et floristiques, se fait progressivement, mais d’une façon perceptible aussi bien dans les milieux de la société civile-organisée en comités de riverains de la forêts, en associations de chasseurs ou de défense de l’environnement-, qu’au sein des institutions et des structures publiques extra-forestières appelées à travailler la main dans la main avec l’administration des forêts sur le terrain.
Concilier la protection avec l’ouverture sur l’économie
Par-delà la protection de la forêt et les programmes de son extension, l’attention des pouvoirs publics est aujourd’hui portée sur sa valorisation : la valorisation de ses produits et de ses services dans le cadre du développement durable.
La forêt algérienne a subi, au cours de la guerre de Libération et pendant la période de la décennie noire, de multiples agressions, dont l’incendie représente le paroxysme, qui ont réduit, comme en une peau de chagrin, son rôle économique, à commencer par la production de bois et de liège.
Pire, des dizaines de milliers d’hectares de terres, après dénudation, commencent à subir l’effet ravageur de l’érosion hydrique, avec les conséquences que l’on connaît sur l’envasement des barrages hydrauliques et sur la perte de la valeur agrologique du sol.
Vue prioritairement, et à juste titre, comme un écosystème à protéger et à développer, particulièrement dans le contexte des changements climatiques qui se confirment d’année en année en bouleversant les saisons, le régime des eaux et l’économie agricole dans sa globalité, la forêt algérienne recèle des potentialités appelées à être mises en valeur au profit des riverains, des ménages ruraux et de certains investisseurs spécialisés dans le domaine agrosylvicole.
Les opportunités qui s’offrent dans ce domaine sont l’exploitation des produits de la forêt (issus des arbres, des arbustes ou du cortège floristique semi-ligneux ou herbacé), la valorisation des espaces para-forestiers (clairières) et le développement de l’écotourisme et des espaces de récréation et de loisir dans le respect de la nature et des valeurs écologiques.
A. N. M.







