C’est dans un contexte de forte croissance démographique, de consommation grandissante de céréales importées, notamment de blé, et qui a progressivement déséquilibré la balance commerciale algérienne et rendu toujours plus pesante la facture des importations de produits alimentaires, que les pouvoirs publics ont décidé de faire de notre Sahara, le nouvel Eldorado agricole du pays. Aussi, l’agriculture saharienne représente un fort potentiel de développement agricole. C’est ainsi que près de 170.000 hectares (ha) de terres sahariennes sont mis à la disposition des investisseurs dans le domaine de l’agriculture, à travers l’Office de développement de l’agriculture industrielle en terres sahariennes (ODAS), selon un arrêté interministériel publié sur le Journal officiel (JO) n° 54.
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Par Réda Hadi
Il s’agit donc de 24 fonciers situés dans les wilayas d’Ouargla et d’Illizi d’une superficie de 51.000 ha, de 20 fonciers dans la wilaya d’Adrar avec une superficie de 47.600 ha et de 43 fonciers d’une superficie de 71.000 ha dans la wilaya de Ghardaïa. Ces éventuels investisseurs devront présenter des projets pour la production du blé, du tournesol, du maïs et de la betterave.
Les conditions d’acceptation de ces projets par l’ODAS, font diverger les avis des spécialistes. M. Sayoud Mohamed, fondateur de Invest Design Consulting et qui gère le portefeuille de plusieurs investisseurs, juge les conditions d’acceptabilité des projets trop longues et bureaucratiques: «Quel que soit l’investisseur, celui-ci a besoin de rentabiliser rapidement son investissement. Avec cette méthode c’est un retour en arrière. Il faut passer par des commissions, puis, ensuite, faire une visite de terrain. Une visite pour quoi ? Comment une commission peut accepter ou refuser un dossier, alors qu’elle ne connait même pas la concession qu’elle propose. C’est une perte de temps» et de continuer : « On ne peut progresser sans être réactif. Investir en agriculture est délicat, car il y a trop d’impondérables. Et les sommes qui y sont allouées sont plus que conséquentes. Comment voulez-vous attirer quelqu’un si son dossier traine pendant des années entres les différents organismes. On ne peut régler le problème des investissements par de longues réunions. Il faut agir et vite. De plus en cas d’échec, l’Etat ne perdrait rien, car ce ne sont pas des deniers publics», a-t-il conclu.
«Attention à l’amateurisme !»
Un avis que ne partage absolument pas M. Radja Ahmed, expert en agronomie et consultant à la FAO. Pour cet expert, ce n’est pas de la bureaucratie mais de la bonne prudence. «La précipitation n‘est pas bonne en agriculture, et particulièrement, celle saharienne, où la méthodologie est tout autre que les autres agricultures (steppique, tellienne etc.). Or, nos investisseurs ne maitrisent pour la plupart, d’entre eux, en rien ce type d‘agriculture, et ne comptent que sur les banques pour avoir des concessions. Sans vouloir préjuger de rien, beaucoup se montrent prétentieux, mais en réalité ne savent rien de l’agriculture saharienne ».
En effet, pour M. Radja, l’investissement ne peut être rentable que si l’on maitrise au maximum le produit à fournir « Or, la maitrise est essentielle pour réussir. Dans ce type d’agriculture, les erreurs se paient chères, et l’audace ne peut faire face à la compétence. Il est logique que l’on doit s’assurer des compétences, d’où les visites de terrain »
«Combien de ces investisseurs ont déjà pratiqué l’agriculture saharienne, et combien d‘entre eux, ont, dans leurs équipes, un chef de chantier aux compétences avérées ? Pour réussir dans ce type d’agriculture, l‘empirisme ne suffit pas, car il faut en amont, une formation adaptées aux méthodes numériques, utilisées de nos jours. Or, de ce côté, nous en sommes encore à semer et récolter. Ce secteur étant sous perfusion et ses produits subventionnés, facile alors d’investir. Les risques sont minimes».
M Sayoud, quant à lui, rappelle que «l‘investisseur prend sur lui les risques, et que rien ne garantit la réussite de son projet, dans une concession, où il dit foncer pour de l’eau d’irrigation entre autres», et de soutenir, que la viabilisation de la concession dépend, en grande partie de l’investisseur. Le terrain agricole étant cédé nu », a-t-i conclu.
R. H.
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