La modernisation et la numérisation du système bancaire est plus qu’une nécessité. La Banque d’Algérie s’est lancée depuis janvier dernier dans un vaste programme de modernisation et de digitalisation en interne et en externe.
En effet, face aux mutations et transformations digitales s’opérant dans le monde, il nous appartient, dira d’emblée, le vice-gouverneur de la Banque d’Algérie, Mouatassem Boudiaf, d’embarquer dans cet espace-là et d’opérer sa mutation technologique d’un pied ferme ainsi que de se donner les outils et instruments pour le faire correctement et pour que ces interactions soient sécurisés et que le risques soit minimisé.
Par Akrem R.
« Aujourd’hui, et je tiens à l’annoncer, la Banque d’Algérie est résolument tournée vers une digitalisation massive que ce soit en interne ou en externe. La Banque d’Algérie est entrain de vivre une mutation technologique en interne parce que nous avons décidé de réorganiser le métier de la Banque centrale en faisant du numérique un vecteur, non pas de soutien, mais de métier», détaille M. Boudiaf qui s’exprimait lors d’une journée d’étude sur la finance digitale en Algérie, organisée, hier à Alger, par le Cercle d’Action et de Réflexion autour de l’Entreprise (CARE) et United Nations Capital Development Fund (l’UNCDF).
Bientôt une nouvelle loi sur la monnaie et crédits
S’agissant des interactions avec les intermédiaires agréés de la Banque Centrale, les banques et les établissements financiers, là aussi, la Banque d’Algérie est en train d’évoluer vers une interaction qui va être dématérialisée. Cette dernière a été amorcée depuis janvier dernier et concerne quelques segments, notamment la dématérialisation des échanges. « Tout ce qui concerne la balance des paiements se fait d’une manière dématérialisée. Toutes les opérations se font en digital et ça va évoluer pour concerner d’autres documents. Il y a plein d’autres choses qui sont en cours de préparation».
S’agissant de l’aspect de la finance digitale, le vice-gouverneur de la Banque d’Algérie, Mouatassem Boudiaf,a indiqué quel’aspect réglementaire a besoin d’être revisité.
«Là aussi, annoncé par les pouvoirs publics, le Premier ministre et le gouverneur de la Banque d’Algérie, la Loi sur la monnaie et le crédit est aujourd’hui en chantier», rappelle-t-il.
Pour lui, la refonte de la Loi sur la monnaie et le crédit est l’un des chapitres importants qui a été examiné dans cette proposition en maturation. En clair, la nouvelle loi accordera une grande importance à la finance digitale. « Il y a plein de segments sur lesquels il est prévu d’apporter des amendements pour permettre de libérer pas mal d’initiatives», souligne-t-il.
Questionné sur l’arrivée de nouveaux acteurs sur le marché financier, l’intervenant a fait savoir que cette question est transcrite sur la monture du projet de loi, tout en rappelant que trois ministères s’occupent de tout ce qui est digitalisation, (numérisation, l’économie de la connaissance, les startups).
Ce domaine est un maillon important de l’économie et a besoin d’être appuyé sur le plan réglementaire pour que cette sécurité juridique puisse être renforcée et permettre aux acteurs de venir sur le terrain et pouvoir proposer des services complémentaires.
La monnaie numérique n’est pas pour demain
Questionné sur l’éventuelle création d’une monnaie électronique, le même responsable est catégorique : « Aujourd’hui, la Loi sur la monnaie et le crédit dans son premier livre et son premier article s’exprime sur la monnaie d’une manière précise. Donc, elle est circonscrite, fiduciaire.
Si on veut aller vers la monnaie digitale, on doit, tout d’abord, amender ces articles-là et cela reste du ressort exclusif de la Banque centrale. Quand on parle de monnaie c’est du ressort exclusif de la Banque centrale».
Maintenant l’émission du la monnaie numérique, à l’instar de la monnaie fiduciaire, ne se faisant que par des banques centrales, il va falloir, dira-t-il, imaginer de quelle manière on peut se le permettre moyennant des intermédiaires. En clair, il faut trouver un juste milieu, notamment, au principe de gestion des risques, sécurité des systèmes de paiement, et sécurité des utilisateurs qui incombe à la Banque d’Algérie. « Il y a des principes sur lesquelles on ne pourra pas déroger. Mais on doit donner les outils juridiques et les instruments pour qu’on puisse accompagner ces initiatives constructives et nécessaires à l’économie nationale», souligne-t-il.
Sur ce point, Maître Hind Benmiloud, avocate agréée à la Cour suprême et le conseil d’Etat, spécialisée dans les TIC, a affirmé que le nouveau texte sur la monnaie et le crédit va donner plus de marges de manœuvre à la Banque d’Algérie, dont la mise en place, rapidement, de textes pour la monnaie numérique. « L’aspect législatif manque, il est aujourd’hui indispensable de faire très vite pour que le développement de ces segments soit amorcé», recommande-t-elle.
Concernant la création d’établissement de paiements, le vice-gouverneur de la Banque d’Algérie a affirmé également, qu’elle est prévue et bien inscrite dans la mouture de la nouvelle loi sur la monnaie. « Il ya une détermination de la Banque d’Algérie pour apporter l’ancrage nécessaire à l’ouverture d’une manière progressive de PSP», annonce-t-il, tout en s’interrogeant sur le pourquoi du rejet de l’usage des instruments financiers dans notre pays.
Pour Mouatassem Boudiaf, l’ouverture d’un PSP peut ne pas être rentable. Actuellement, plus de 10 millions d’Algériens détiennent une carte CIB, générant des milliers de transactions, dont 90% pour le retrait et seulement 10% de transaction de e-paiement.
«On a un grand effort à faire sur la confiance. La digitalisation est un problème sociétal. Nous sommes appelés à traveller en synergie et à tenter d’inclure la culture du paiement digital dans notre pays», conclut-il.
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Encadré
1000 milliards de DA retirés annuellement
Le vice-gouverneur de la Banque d’Algérie a fait savoir l’existence de 23,6 millions de comptes CCP et 14 millions de comptes bancaires dont (11 millions de comptes en dinars et 3 millions en devises. Il a indiqué que nous avons un problème de bancarisation des transactions. Actuellement, 98,2% des transactions de retraits se font par carte CIB, et que 1000 milliards de DA sont retirés annuellement de la Poste.
Des chiffres qui interpellent, notamment, les banques à trouver les outils et les mécanismes adéquats pour inciter les gents à l’utilisation de l’e-paiement. Sur ce point, le vice-gouverneur de la Banque d’Algérie a annoncé que de nouveaux services ont été accrédités pour être commercialisés par deux banques, à savoir, le mobil paiement et Qr code. En effet, la monnaie électronique pourrait combler le déficit et réduire le recours pour le cash. Le drame, dira Rachid Sekkak, c’est que les transactions se font en cash. Une meilleure inclusion financière passe par l’innovation et la mise sur le marché financier de nouveaux produits.
- R.
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Mme Newel Benkritly, DG de la SATIM :
« De nouveaux produits pour booster le e-paiement »
La directrice générale de la Société d’Automatisation des Transactions Interbancaires et de Monétique (SATIM) a fait savoir que de nouveaux produits financiers seront bientôt commercialisés, visant, notamment, la promotion et le développement du paiement électronique. Des cartes prépayées pour les personnes bancarisées seront bientôt lancées. Le détenteur d’un compte bancaire pourra demander une carte prépayée auprès de sa banque tout en l’alimentant en montant qu’il souhaitera (2000 da, 5000 da, etc.), afin de l’utiliser dans les différentes transactions via TPE. Ce genre de carte, dira-t-elle, rassure le client, notant que la sécurité des transactions e-paiement est garantie. Il y aura ainsi, l’émission de nouvelles cartes à contact et sans contact pour les transactions de petits montants. « Il ya tout un système qui a été mis en place pour rassurer les clients. Tout une stratégie est en place pour le développement du paiement électronique», conclut-elle.