La relance des industries du textile et cuir est une priorité absolue pour le gouvernement. Le ministère de l’Industrie a, de ce fait, lancé un appel en direction des entreprises nationales privées et des associations professionnelles activant le domaine des industrie du textile et cuir, afin d’intégrer le comité national de pilotage stratégique de ces deux filières.
Par Akrem R.
Ils ont un délai jusqu’au 31 octobre pour formuler leurs demandes. En effet, ce comité national, qui a pour principale mission d’examiner et de diagnostiquer la situation de la filière textile et cuir, et de proposer des solutions concrètes et opérationnelles aux différents problèmes rencontrés par la filière en vue de sa relance, regroupe toutes les parties prenantes des deux secteurs publics et privés sans exception, les institutions officielles, les organisations professionnelles, les laboratoires de recherche ainsi que les centres de formation spécialisés. A travers cette démarche, les pouvoirs publics veulent relancer une des filières industrielles stratégiques du pays.
« Déjà, au départ, il faut saluer cette initiative qui dénote du dynamisme impulsé au sein du secteur de l’industrie et essayer de valoriser toutes les filières susceptibles d’être une partie prenante dans le projet de la relance industrielle et de là, dans la transformation économique», dira d’emblée, l’expert en économie Abderrahmane Hadef. Pour l’intervenant, la filière textile et cuir a besoin de cet espace de débat et de réflexion, permettant de regrouper l’ensemble des acteurs pour discuter de son avenir et surtout de la situation de cette filière qui a connu une véritable déstructuration durant les deux dernières décennies, pour diverses raisons. Il y a d’abord, la mondialisation, l’ouverture anarchique de l’importation et le manque d’organisation. Actuellement, des sommes colossales en devises sont déboursées pour répondre au besoin de la demande locale. Le made in china et turc inondent nos marchés, en imposant une concurrence farouche au «made algeria».
Les groupes textiles et cuir du secteur public notamment, n’arrivent à faire face.
Les ateliers de confection du secteur privé qui tentent de se faire une place dans le marché local sont confrontés à de nombreuses problématiques, d’ordre organisationnel, financier et à une concurrence rude de la part du secteur informel, dont la contrefaçon fait rage.
« Aujourd’hui nous avons besoin de redynamiser et relancer cette filière parce que nous sommes bien partis pour un projet de transformation économique et de diversification économique. Outre, que c’est une filière de substitution pour l’importation. C’est une filière qui peut répondre à une partie des besoins du marché algérien de l’habillement, chausures, et aussi, permettrait de valoriser la matière première au niveau local. dont beaucoup sont exportées en brut, ou laissées en l’état. Nous avons besoin de relancer ces industries pour créer de la valeur ajoutée et de la richesse. Je dirai que cette initiative du ministère de l’Industrie est très importante et donnera une visibilité aux acteurs et des opportunités à de nouveaux investisseurs d’intégrer les filières de production de textile, de produits dérivés du cuir et chaussures», a souligné Hadef.
Pour cela, il est important de définir certaines priorités de ces industries et sous filières. L’accent doit être mis sur la modernisation de l’outil de production.
La rénovation de l’outil de production, une urgence
Elle est, d’ailleurs, l’une des faiblesses de notre industrie actuellement. Les machines et les pratiques sont devenues anciennes et ne répondent pas à la conjoncture actuelle. « Notre industrie a besoin de généraliser de nouveaux outils de production et machines performantes à haut volume. Tout cela améliorera la performance et la compétitivité de notre industrie», a suggéré l’ex-président de la chambre du commerce de Titterie (Médea).
Outre la modernisation de l’outil de production, il y a lieu de donner une grande importance aux sous-filières (conception, désign, modélisme). « Notre pays accuse un grand retard dans ces domaines. Les acteurs dépendent beaucoup de l’étranger, en faisant appel à des bureaux extérieurs, notamment, tunisiens pour l’acquisition de nouveaux modèles et styles», a-t-il affirmé.
Quant au troisième point, l’intervenant a suggèré, également, de travailler plus en matière de marketing, commercialisation, export et autres activités. « La filière est soumise à une concurrence rude de l’importation. C’est un secteur qui est très mondialisé, nous avons besoin de développer cette partie également», poursuit-t-il. En dernier point, l’expert a recommandé de s’intéresser à la formation de la main-d’oeuvre pour ces industries. En somme, il faut réunir toutes ces conditions pour réussir dans cette filière qui a un avenir très promoteur en Algérie ».
A. R.
Mourad Kouachi, expert en économie : « Il faut investir d’abord dans la matière première »
L’expert en économie, Mourad Kouachi a plaidé pour l’investissement dans la production de matière première nécessaire à l’industrie textile et cuir. Selon l’intervenant, la dépendance de l’industrie algérienne de l’étranger, en matière d’intrants, a réduit la compétitivité de nos entreprises et produits. « Nous devons encourager la production de la matière première en local, notamment, le coton et la fibre du coton», souligne-t-il.
Il faut savoir que dans les années 1970, la culture du coton et la production de la fibre du coton étaient développées en Algérie. En raison de l’abandon de cette culture, la matière première est totalement importée. Le secteur a besoin annuellement de 45 000 tonnes de coton. Cela représente environ 96 millions de dollars. Un argent qu’on peut économiser en reprenant cette culture en Algérie.
Pour l’enseignant universitaire, il faut accompagner les entreprises activant dans ce domaine, en les protégeant de la concurrence déloyale, à travers une nouvelle réorganisation du commerce extérieur.
Propos recueillis A. R.