À travers cet entretien, M. Djamel Alilat, chargé de communication de la SARL Laiterie Soummam, nous ouvre son cœur et répond sans détour à nos questions. Il revient sur l’œuvre grandiose de ce véritable empire économique, bâti avec patience et détermination, et qui s’est imposé au fil des années comme une référence incontournable dans l’agroalimentaire algérien. De l’innovation permanente à l’investissement dans l’agro-élevage, Soummam a su gagner la confiance des consommateurs. Aujourd’hui, ses produits sont présents dans chaque foyer algérien, symbolisant réussite nationale et attachement aux valeurs de qualité et de responsabilité.
Entretien réalisé par Sofiane Idiri
- Eco Times : Vous avez récemment lancé un nouveau produit, le yaourt grec. Pourquoi avoir choisi cette appellation et comment a-t-il été accueilli par les consommateurs ?
Djamel Alilat : En effet, nous innovons continuellement et nous lançons régulièrement de nouveaux produits. Par exemple, l’année passée nous avons lancé la gamme Djenina aux fruits d’Algérie, avec trois variantes : la mûre de Jijel, la poire de Ain Defla et le melon de Boumerdes.
C’est une spécialité laitière conditionnée dans des bouteilles d’un litre, réalisée avec le lait de nos fermes et de nos éleveurs partenaires auquel on a rajouté des fruits de notre pays, de nos terroirs. Cela a le mérite de mettre sur le marché des produits originaux tout en boostant les filières agricoles de notre pays. Cette année, nous avons lancé un autre produit : un yaourt grec selon Soummam.
Cette spécialité laitière développée par les bergers grecs il y a de cela des siècles. Ce yaourt est dit « égoutté », ce qui veut dire que l’on retire une partie du petitlait, liquide riche en lactose. Cela donne un produit plus onctueux, légèrement acidulé, et surtout plus riche en protéines et en calcium.
Comme à l’accoutumée, il a été très bien accueilli par nos consommateurs et connaît déjà un franc succès, à l’image de tous nos produits. Je dirais qu’une entreprise qui n’innove pas, qui ne cherche pas à conquérir de nouveaux marchés, à séduire de nouveaux consommateurs et à surprendre, ne peut pas évoluer.
C’est pourquoi nous nous remettons constamment en question et nous efforçons de proposer de nouveaux goûts, de nouvelles saveurs et de nouvelles spécialités. Nous disposons d’ailleurs d’un département Recherche et Développement animé par de jeunes ingénieurs dont la mission principale est justement de mettre au point ces nouveautés. J’insiste sur le fait que d’ici peu, d’autres produits viendront enrichir notre gamme.
- La laiterie Soummam a initié un projet de station de traitement des eaux usées, aujourd’hui en phase finale. Quels sont les objectifs principaux de cette initiative ?
Effectivement, la laiterie Soummam a lancé un projet de station d’épuration, aujourd’hui en phase finale. Nous espérons sa réception dans un délai de trois mois si aucun imprévu technique ne survient. C’est un investissement majeur, sans doute l’un des plus importants de la région, puisqu’il s’agit là de l’une des plus grandes stations d’épuration en Algérie.
À travers ce projet, notre objectif est d’assumer pleinement notre responsabilité environnementale. Il s’agit de traiter les eaux usées de nos usines, d’en éliminer les déchets, afin de rejeter dans l’Oued Soummam une eau épurée, débarrassée de toute pollution. Cette eau pourra également être réutilisée à des fins d’irrigation dans des projets agricoles.
Vous savez aussi qu’une station de traitement génère deux produits : d’un côté, des boues pouvant être recyclées en compost pour l’agriculture : de l’autre, de l’eau traitée qui peut servir pour l’irrigation dans l’arboriculture.
À travers cette station, nous voulons accomplir notre devoir et jouer pleinement notre rôle vis-à- vis de la nature, de l’environnement et de la société.
- Quels sont les principaux défis auxquels la Laiterie Soummam doit faire face actuellement ?
Je dirais que le premier défi est d’assurer la stabilité et la prospérité de l’entreprise, de continuer à se développer, à créer de l’emploi et de la richesse, mais aussi de contribuer au développement économique du pays et, surtout, à la sécurité alimentaire nationale.
C’est là notre mission essentielle. En second lieu, vient la satisfaction de nos consommateurs. Même si nous sommes leaders sur le marché des produits laitiers, nous devons continuer à répondre aux attentes du marché local, sans jamais « dormir sur nos lauriers ».
Nous travaillons dur pour consolider notre position en Algérie et, en parallèle, conquérir de nouveaux marchés à l’international. Nous disposons des capacités de production, d’une grande variété de produits de qualité et de prix compétitifs, ce qui nous permet d’envisager la conquête d’autres marchés que ceux du Canada et de la Libye vers lesquels nous exportons actuellement.
Cependant, nous avons besoin d’un soutien plus fort de l’État. Nos produits sont ultra-frais, comme le yaourt dont la DLC (date limite de consommation) est de 30 jours. Or, l’exportation par bateau n’est pas envisageable car les produits arriveraient déjà périmés. Il faut donc trouver d’autres moyens logistiques, et cela nécessite une politique publique d’encouragement aux exportations adaptée aux produits ultra frais.
Un autre défi important est de nous affranchir totalement de la dépendance à la poudre de lait. C’est pourquoi nous continuons à investir dans le développement de notre filière agro-élevage afin de gagner en autonomie et de renforcer notre ancrage local.
- Six mois après la disparition de feu Hadj Lounis Hamitouche, fondateur emblématique de Soummam , comment vivez-vous le quotidien sans sa présence et quel héritage a-t-il laissé ?
Il est vrai que le regretté Hadj Lounis nous manque beaucoup. Nous étions habitués à sa présence, à son charisme et à sa clairvoyance. Il incarnait le courage et l’abnégation. Rien que par sa présence, il nous donnait une grande force et une volonté d’aller de l’avant.
Ses conseils, son aura et sa vision nous manquent énormément aujourd’hui mais la laiterie Soummam continue dans la voie qu’il a tracée. Depuis plusieurs années, il avait mis en place une équipe solide composée de cadres compétents et de travailleurs dévoués.
Ses enfants, qui ont toujours été à ses côtés, assurent aujourd’hui la continuité. Ces dernières années, le combat qu’il menait contre la maladie lui prenait beaucoup de son temps et de son énergie. L’entreprise s’était donc structurée de façon à fonctionner efficacement et à continuer d’avancer.
Aujourd’hui, nous continuons à travailler, à nous développer, portés par l’héritage moral et spirituel qu’il a laissé. Hadj Lounis Hamitouche est une école à lui seul, un modèle de travail et de réussite. Ses valeurs restent notre boussole.
Le travail avant tout, l’honnêteté, le sérieux, la remise en question permanente, l’effort, mais aussi le partage et le respect des autres. Je me souviens qu’il répétait souvent : «On n’arrive à rien sans le travail.»
Bien sûr, il est difficile de remplacer une telle personnalité et une telle force. Mais nous suivons ses traces, ses conseils et ses méthodes. Il a bâti quelque chose de grand et de durable, en partant de rien. Conscient qu’il n’était pas éternel, il avait pris soin de mettre en place les hommes, les structures et les méthodes nécessaires pour que l’œuvre qu’il a fondée survive au temps. Et c’est ce que nous constatons aujourd’hui.
- Soummam emploie aujourd’hui des milliers de travailleurs et collabore avec plus de 7 000 éleveurs partenaires. Quelle place occupe la responsabilité sociale et l’emploi dans la stratégie de Soummam ?
La laiterie Soummam a créé, au fil des années, des milliers d’emplois directs et indirects. Aujourd’hui, elle constitue un moteur économique majeur, aussi bien dans la région que dans l’ensemble du pays.
Nous sommes pleinement conscients de notre responsabilité sociale et nous l’assumons à travers plusieurs dimensions, contribuer à l’économie nationale, soutenir la société algérienne, mais aussi accompagner des clubs sportifs, des associations et diverses initiatives, qu’elles soient sociales, culturelles ou environnementales. Nous avons le devoir de préserver et de développer cet outil économique, de respecter nos consommateurs et nos employés ainsi que l’environnement dans lequel nous évoluons.
La responsabilité environnementale occupe une place importante dans notre stratégie. Nous cherchons à réduire autant que possible la pollution, à rationaliser la consommation d’eau et d’énergie, à promouvoir les énergies renouvelables et à recycler nos déchets.
Notre objectif est d’aller vers une véritable économie circulaire. Sur le plan éthique et économique, nous avons bâti notre modèle sur le respect de tous, respect des clients, des consommateurs, des fournisseurs et des sous-traitants.
Nous sommes fiers qu’en 30 ans, la laiterie Soummam soit passée d’une petite entreprise locale à une grande entreprise nationale prospère, qui occupe une place de choix dans le paysage économique algérien. Beaucoup d’Algériens se reconnaissent dans notre marque, et nous essayons de défendre cette confiance chaque jour.
La barre est placée très haut, mais nous sommes déterminés à poursuivre cet engagement envers notre pays, notre peuple et la mémoire de notre fondateur.
- Dans un marché de plus en plus concurrentiel, quelles perspectives d’avenir trace Soummam pour consolider sa position de leader dans l’agroalimentaire en Algérie et à l’international ?
Pour nous, l’avenir, c’est aujourd’hui. Nous avons toujours évolué dans un environnement marqué par une forte concurrence, mais cela ne nous fait pas peur. Notre modèle économique a fait ses preuves et reste pertinent.
Contrairement à d’autres acteurs qui se contentent d’importer de la poudre de lait pour la transformer, Soummam a, depuis près de vingt ans, investi dans une stratégie de collecte et de production locale de lait. Nous avons créé tout un écosystème autour de la filière laitière, élevage, agro-élevage, accompagnement des éleveurs et sécurisation de la matière première.
Nos perspectives reposent donc sur la poursuite de ce développement, créer davantage de valeur ajoutée dans les secteurs de l’agriculture, de l’élevage et de l’agro-industrie, afin de maîtriser notre filière de bout en bout.
L’avenir pour nous, c’est de continuer à progresser, à fabriquer des produits de qualité qui satisfont le marché local, tout en gagnant des parts à l’international. Cela fait déjà des années que nous le préparons, et nous poursuivons sereinement dans cette voie.
Nous avons plusieurs projets en cours, tant sur le plan industriel que dans le domaine de l’agro-élevage, toujours dans l’objectif de sécuriser notre matière première et de contribuer à la création de richesse.
Notre dernier investissement : une ferme de production de blé et de fourrages de 2 000 hectares à Ouargla illustre bien cette voie que nous nous sommes choisis. Le fait d’aller vers les cultures stratégiques le prouve amplement.
Aujourd’hui, à la Laiterie Soummam, nous sommes fiers de participer pleinement à l’effort national tendant vers la sécurité et l’indépendance alimentaire de notre pays à travers deux produits hautement stratégiques : le blé et le lait.
S. I.