Le revirement du gouvernement de Pedro Sánchez sur la question du Sahara occidental, en s’alignant directement avec le plan marocain, ne peut pas passer sans conséquence. Ce changement de position a d’ailleurs suscité une réaction appropriée au dérapage de Madrid, et, jugée légale et souveraine par des experts.
Par Akrem R.
Après avoir rappelé son ambassadeur de Madrid le 19 mars dernier pour consultation, Alger compte sévir, en procédant à la révision de ces relations diplomatiques et surtout économiques avec ce pays. L’Espagne, très dépendante de l’Algérie pour ses approvisionnements en gaz, risque de voir sa facture des importations du gaz plus salée, et ce, suite à l’éventuel «recalcul» des prix du gaz par le groupe pétro-gazier public Sonatrach.
«Depuis le début de la crise en Ukraine, les prix du gaz et du pétrole explosent. L’Algérie a décidé de maintenir, pour l’ensemble de ses clients, des prix contractuels relativement corrects. Cependant, il n’est pas exclu de procéder à un recalcul des prix avec notre client espagnol », a déclaré son PDG Toufik Hakkar, à l’agence officielle APS. C’est un message clair de la part du gouvernement algérien au chef du gouvernement espagnol Pedro Sánchez pour lui signifier le refus catégorique des manœuvres du Maghzen et de ses alliées l’Espagne et la France, concernant le dossier sahraoui. Dans ce cadre, l’expert en économie, Hamza Boughadi s’est félicité de la décision, en la considérant souveraine : «L’Algérie a le droit de réviser ses conventions si ses intérêts sont compromis», dira-t-il d’emblée. Et d’ajouter : « L’Espagne croit qu’elle allait nous faire du chantage avec le changement soudain de son orientation».
Il faut également mettre en exergue le fait que « l’Algérie impose le respect à la lettre de l’ensemble des conventions signées avec autrui», selon notre interlocuteur qui a rappelé que « pareille décision a été déjà prise l’encontre d’autres pays». Raison pour laquelle et en adéquation avec ses intérêts, «l’Algérie s’autorise à revoir les contrats signés si l’autre partie venait à ne pas les respecter», a affirmé Hamza Boughadi.
L’Algérie en position de force
Il est un fait notable dans les relations internationales qui dicte qu’un pays signataire d’un accord a le droit de le réviser si ses intérêts sont compromis. Et c’est ce que tient à souligner notre interlocuteur qui rappelle que pareils cas se sont produits avec l’Union européenne.
Notre interlocuteur a fait savoir, également, que le marché a été bouleversé d’une façon radicale, notamment, suite à l’éclatement de la guerre en Ukraine, dont les prix ont atteint des niveaux record. Suite à cela, indique-t-il, «l’Algérie a tout à fait raison de procéder à un recalcul des prix, vu que le partenaire espagnol n’a pas hésité à faire pression sur nous lors du renouvellement des contrats quand les prix étaient au plus bas».
Questionné sur le risque de faire face à des litiges et arbitrages à l’international, Boughadi a précisé que l’Algérie est actuellement en position de force et les pays européens veulent à tout prix remplacer le gaz russe. En clair, il n’y a aucune contrainte sur ce point-là. D’ailleurs, les contrats de long terme sont cependant dotés de clauses d’indexation qui conduisent à une révision des prix du gaz tous les deux ou trois ans, voire tous les ans. Ces prix évoluent en fonction des éléments suivants : les coûts de transport du gaz de son lieu de production à son lieu de livraison ; les coûts de production du gaz naturel…
Interrogé sur la possibilité pour l’Algérie d’accroître ses capacités de livraisons à l’Europe qui cherche des alternatives au gaz russe, Hakkar a expliqué que Sonatrach dispose « à l’heure actuelle de quelques milliards (de m³ disponibles, NDLR) qui ne peuvent se substituer au gaz russe. En revanche, avec la cadence de nos explorations, nos capacités vont doubler d’ici quatre ans, ce qui laisse entrevoir des perspectives prometteuses avec nos clients européens». Durant ces trois premiers mois, Sonatrach a réalisé trois nouvelles découvertes de gisements pétroliers, rappelle le Pdg de la Sonatarch.
«Parmi ces trois nouvelles découvertes, on enregistre une importante découverte concrétisée au niveau du périmètre de la région de Touggourt. Il s’agit d’un gisement estimé à hauteur d’un milliard de barils», a-t-il précisé, en rappelant que le groupe Sonatrach comptait investir 40 milliards de dollars entre 2022 et 2026 dans l’exploration, la prospection et la production.
A.R.