L’Algérie, qui ambitionne de diversifier son économie, renforce ses partenariats internationaux pour une exploitation optimale des richesses minières, dont le phosphate. En effet, dans sa feuille de route, l’État mise sur une industrialisation locale à haute valeur ajoutée, et ce, conformément aux orientations du président de la République, Abdelmadjid Tebboune.
Par Akrem R.
C’est dans ce cadre que s’inscrit la signature d’un mémorandum d’entente, hier à Alger, entre le groupe minier public SONAREM, via sa filiale «SOMIFOS», et la société pakistanaise «Fatima Fertilizer», filiale du conglomérat «Fatima Group», pour la transformation et la commercialisation du phosphate algérien, a indiqué le ministère de l’Énergie, des Mines et des Énergies renouvelables dans un communiqué.
L’accord a été signé hier à Alger au siège du ministère, en présence du ministre d’État, Mohamed Arkab, Noureddine Yassa, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Énergie, chargé des Énergies renouvelables, Belkacem Soltani, président-directeur général du groupe SONAREM, Lakhal Mokhtar, PDG de la société SOMIFOS, ainsi que Mokhtar Abbas, directeur exécutif des opérations de la société Grand Exploration & Mining Company, affiliée au groupe Fatima.
La cérémonie a également vu la présence de l’ambassadeur du Pakistan en Algérie, de l’ambassadeur d’Algérie au Pakistan, ainsi que de plusieurs cadres du ministère et des deux groupes industriels.
Ce partenariat vise à développer une coopération industrielle et commerciale autour du phosphate algérien, en particulier celui extrait de la mine stratégique de «Bir El Ater», située dans la wilaya de Tébessa.
Selon les explications du ministère, l’accord vise à mettre en place un cadre de coopération autour de la commercialisation du phosphate brut, mais aussi son enrichissement et sa transformation locale pour produire des engrais phosphatés, dans une logique de création de valeur ajoutée en Algérie.
«À cette occasion, les deux parties ont exprimé leur volonté de développer un partenariat stratégique fondé sur la complémentarité économique et l’exploitation des ressources minières, notamment dans le cadre des efforts des deux pays pour renforcer leur sécurité alimentaire et développer des industries de transformation basées sur les ressources naturelles», lit-on dans ledit communiqué.
En effet, cette initiative s’inscrit dans le cadre d’une politique nationale ambitieuse visant à réduire la dépendance aux exportations de matières premières brutes, au profit d’une industrialisation intégrée. Le phosphate de «Bir El Ater», dont les réserves sont estimées à plus de 850 millions de tonnes, constitue l’un des gisements les plus prometteurs du pays.
Transformer localement le phosphate en produits dérivés
L’exploitation de ce gisement représente donc un levier stratégique dans la construction d’une industrie nationale d’engrais compétitive, capable de répondre aux besoins du marché local et de conquérir des parts sur les marchés africains et internationaux.
Ce partenariat avec le groupe «Fatima» s’ajoute aux efforts déjà engagés par l’Algérie pour le développement du méga-complexe intégré de transformation du phosphate dans l’Est du pays.
Ce projet structurant, porté par les groupes ASMIDAL, MANAL, SONATRACH et le partenaire chinois «Wuhuan Engineering », mobilise plus de 7 milliards de dollars d’investissement, répartis sur plusieurs wilayas (Tébessa, Souk Ahras, Skikda, Annaba).
Le complexe vise à transformer localement le phosphate en produits dérivés : acide sulfurique, acide phosphorique, ammoniac, et divers types d’engrais azotés et phosphatés. Il devrait générer plus de 12 000 emplois directs et indirects à terme et hisser l’Algérie parmi les exportateurs majeurs d’engrais en Afrique et en Méditerranée.
D’ailleurs, un quai minier est en cours de réalisation au niveau du port d’Annaba dans le cadre du projet phosphate intégré. Ce projet vise à moderniser le port et à augmenter sa capacité d’accueil pour les navires minéraliers, notamment ceux transportant du phosphate.
Le quai, d’une longueur de 1 600 mètres et d’un tirant d’eau de 16 mètres, permettra d’exporter 7 millions de tonnes de phosphate par an. Des travaux de modernisation de la ligne ferroviaire reliant les gisements de phosphate de Tébessa au port d’Annaba sont en cours pour accompagner l’augmentation de la production.
Cela confirme la volonté de l’Algérie pour l’exploitation des différents gisements miniers et le renforcement de ses exportations en la matière.
Vers une coopération technologique et logistique
Le mémorandum signé avec le groupe pakistanais prévoit également l’exploration de projets industriels communs, avec transfert de technologie, formation de main-d’œuvre algérienne, et accès partagé aux marchés tiers, notamment africains et asiatiques.
L’objectif in fine est de faire du phosphate un vecteur de développement partagé, dans le cadre d’une intégration Sud-Sud fondée sur la complémentarité des ressources et des expertises.
Le groupe «Fatima», actif dans les secteurs des engrais, de la chimie, de l’énergie et de l’agriculture, est déjà implanté dans le secteur minier au Pakistan à travers des projets dans le «Baloutchistan», centrés sur l’exploitation du phosphate, du cuivre, de l’or et du fer.
Avec cette nouvelle coopération, il ambitionne de « s’inscrire durablement dans la dynamique industrielle algérienne ».
À travers ces projets, l’Algérie poursuit un double objectif, à savoir asseoir sa souveraineté industrielle et renforcer sa sécurité alimentaire, dans un contexte international marqué par les tensions sur les chaînes d’approvisionnement et les marchés agricoles.
L’exploitation durable du phosphate, combinée à sa transformation locale, représente une réponse stratégique à ces enjeux.
En somme, ce partenariat reflète la volonté de l’Algérie d’attirer des investissements étrangers structurants, en ciblant des partenaires technologiques et industriels de référence.
La volonté des pouvoirs publics est claire : positionner l’Algérie comme acteur clé dans les chaînes de valeur mondiales des fertilisants, notamment avec les réformes engagées dans le domaine minier, avec l’introduction d’un nouveau cadre réglementaire incitatif et souple.
A. R.







