Selon une étude algéro-allemande autour des Enr en Algérie:  Le marché du Solaire sous contraintes

Un grand travail reste encore à faire dans le domaine des énergies renouvelables (EnR). Si le programme national des EnR pour la production 15 000 MW d’énergie électrique à l’horizon 2035 à partir de centrales solaires au rythme de 1000 MW par an, est sur la bonne voie et dont les premiers appels d’offre sont déjà lancés, les objectifs relatifs au développement de la production autonome de petites capacités et le soutien à l’autoconsommation, demeurent non encore chiffrés. 

Par Akrem R.

En termes clairs, les Algériens n’accordent pas assez d’intérêt à cette solution, pourtant écologique et économique. D’ailleurs, toutes les réalisations, non connectées au réseau, totalisent la modeste capacité de 21375 KWc ! Un chiffre loin des potentialités et besoins des localités et communes à travers le pays. 

Sur 19 040 écoles primaires à l’échelle nationale, moins de 500 sont électrifiées au solaire et si l’on considère la feuille de route du ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales (MICLAT) qui cherche à généraliser l’emploi du solaire dans les écoles, le taux d’atteinte des objectifs serait de l’ordre de 3 %. 

Sur 3 134 824 points lumineux dans l’éclairage public, seuls 130170 sont en PV soit 0,42 %, outre, que 46.000 exploitations agricoles s’étendant sur 714 000 hectares ne sont pas encore raccordées aux réseaux électriques, selon les chiffres d’un rapport, intitulé «analyse des chaînes de valeur liées à l’énergie solaire en Algérie», réalisé dans le cadre du projet GIZ communes vertes, un programme de coopération algéro-allemande.  

Ce rapport a identifié les dysfonctionnements ainsi que le potentiel et les opportunités de développement dans de l’usage de l’énergie solaire par les communes en Algérie. L’étude a estimé que la demande privée n’est pas près de décoller, ni sur le PV ni sur le chauffe-eau solaire (CES). Les conditions ne s’y prêtent pas pleinement encore.  

En effet, les kits solaires demeurent chers dans un contexte d’électricité conventionnelle subventionnée.  Les prix moyens pratiqués sur le marché sont à 260.000 DA pour un kit solaire autonome 500W et 1 300 000 DA pour un kit solaire autonome de 4 000W. 

«Si l’on considère une tarification moyenne de l’électricité de 4,01 DA/kWh, le choix est rapidement fait en faveur de l’électricité conventionnelle», affirment les rédacteurs de l’étude. La dynamique du marché du chauffe d’eau CES est également faible et la demande privée y représente selon les installateurs moins de 10 % de leur activité. Elle est concentrée sur les sites non raccordés aux réseaux électriques et au gaz naturel. 

Cette situation de pré-domination du réseau d’électricité connecté a impacté négativement l’émergence d’un réel marché solaire local de modules photovoltaïques (PV). En effet, dans une appréciation globale sur la fabrication d’intrants et composants pour le solaire, l’étude indique que l’Algérie ne possède toujours pas les infrastructures de qualité requises au développement du marché du solaire.

 «Il n’y a pas de structures accréditées pour attester de la conformité des produits. Le processus d’homologation des produits n’est pas opérationnel ni clairement défini et la visibilité et l’impact de l’institution qui en est en charge ne sont pas perceptibles», précise-t-elle. 

L’engouement pour l’investissement dans le produit solaire est faible, les investisseurs potentiels semblent dissuadés par l’exemple de la fabrication de modules photovoltaïques et les faibles progrès de la transition énergétique. 

Tous les équipements et accessoires solaires utilisés en Algérie sont importés, y compris une large part de modules photovoltaïques malgré une capacité de production locale installée de près de 500 MW/An. 

Le peu d’articles fabriqués localement n’est pas homologué et a du mal à se frayer une place dans le marché face à un produit d’importation à bas prix et qui n’est soumis à aucun contrôle de conformité. Concernant les chauffes d’eau solaire  (Le CES) pour sa part offre des perspectives intéressantes en matière de capacité d’intégration pour peu que la demande soit développée.

Des tentatives de fabrication sont lancées autour d’équipements tels que luminaires solaires, chargeur de batterie solaire, structures d’appui de modules PV standard en kit, mais elles ont du mal à atteindre des niveaux de fabrication permettant des économies d’échelle face à une demande locale faible et sporadique.  En effet, l’exploitation réelle de ce potentiel est tributaire d’un environnement favorable et incitatif qui a du mal à se mettre en place.

L’absence de visibilité pèse sur l’investissement 

À la question : « Quelles sont les difficultés qui entravent le développement d’une offre d’équipements et accessoires solaires fabriqués localement ? Les opérateurs sondés ont avancé, outre les difficultés classiques liées à l’acte d’investissement en Algérie (Accès au foncier et aux crédits et lenteurs administratives), les raisons spécifiques suivantes : l’absence de visibilité sur développement du solaire en Algérie qu’ils attribuent à la position hésitante et peu claire des pouvoirs publics quant à la mise en œuvre du PNEREE (programme national d’efficacité énergétique). 

80 % des opérateurs sondés citent la présence sur le marché local de produits d’importation à bas prix et qui échappent à leur avis à tout contrôle de conformité mettant ainsi en péril la production locale.  60 % évoquent aussi le fait que les activités d’importation et de vente en l’état sont plus faciles à mettre en œuvre et plus lucratives et ils expliquent cela par les politiques liées aux taxes douanières et à l’investissement qui favorisent l’importation au détriment de la fabrication locale. 

Toutefois, le coût élevé et l’importance des risques dans les investissements industriels n’ont pas été évoqués comme difficulté bloquante, ajoute la même source. Bien au contraire, disent les opérateurs sondés, le risque investissement est une donnée objective qu’ils assument et gèrent. 

Sur le plan de la qualité, les industriels se réfèrent à des normes internationales. Aussi, les modules PV fabriqués localement sont tous certifiés conformes aux normes IEC 61730 et IEC 61215 qui portent sur les aspects sécurité des modules et sur les aspects de performance électrique, respectivement.  Les câbles solaires sont certifiés conformes aux normes IEC 60332-1 et IEC 60332-2. Les structures d’appui sont certifiées conformes aux normes Eurocodes 1, Eurocode 3 et ISO1461-9. 

Certains produits ne font néanmoins référence à aucune norme. Toutefois, qu’ils soient certifiés conformes aux normes internationales ou pas, les produits locaux dans le solaire ne sont pas homologués, mais néanmoins disponibles sur le marché et utilisés dans les installations au même titre que les produits importés. Les fabricants déplorent cette situation et certains estiment que la non-homologation empêche un développement conséquent de leur part de marché.

 À la question : «Qu’est-ce qui empêche l’homologation de vos produits ? », les réponses enregistrées ont porté sur les aspects suivants : «60 % des répondants ont fait état de non-connaissance des organes habilités à fournir l’accompagnement nécessaire vers l’homologation. 40 % font état de non-connaissance des organes habilités à fournir la bonne information sur le processus d’homologation, sa portée et son intérêt.

20 % affirment qu’il n’existe pas d’organe dédié à la question en Algérie. 20 % mettent en exergue la complexité du processus et l’ambiguïté entre certification et homologation. 20 % soulignent que le CDER est en charge de l’homologation des produits dans le solaire, mais qu’il ne dispose pas des moyens requis pour mener à bien cette mission. 

En somme, la configuration des réponses montre combien le processus d’homologation est mal cerné en Algérie et ses acteurs peu visibles.

A. R.

Quitter la version mobile