La sécurité sanitaire figure parmi les priorités de l’Algérie. Une stratégie globale est mise en œuvre pour promouvoir la production pharmaceutique nationale et réduire la facture des importations, notamment en matière de traitements innovants destinés aux patients atteints de cancer.
Par Akrem R.
Une nouvelle étape vient ainsi d’être franchie avec le lancement imminent d’un projet de fabrication de médicaments anticancéreux innovants. D’ailleurs, une usine sera réalisée à Constantine par le groupe Saidal, leader de l’industrie pharmaceutique en Algérie, dans cette wilaya reconnue comme le pôle biotechnologique du pays.
Un accord de coopération a été signé à Alger entre le groupe Saidal et le groupe chinois Truking, une entreprise spécialisée dans l’ingénierie pharmaceutique. Cette dernière conçoit et fabrique des équipements destinés à la production de médicaments, notamment des lignes de remplissage pour formes liquides (injectables, perfusions), des machines de conditionnement, des autoclaves, des stérilisateurs et des systèmes de traitement de l’eau pharmaceutique.
La cérémonie de signature s’est déroulée sous la supervision du ministre de l’Industrie pharmaceutique, Dr. Ouacim Kouidri, au siège du ministère, en présence de cadres des deux groupes partenaires.
Ce projet, souligne Saidal dans un communiqué, incarne son engagement à fournir des médicaments anticancéreux innovants au profit des patients algériens. Il s’agit, selon la même source, d’une étape stratégique vers l’autosuffisance nationale dans ce domaine hautement sensible, garantissant un accès sûr et durable aux traitements modernes contre le cancer.
Un médicament innovant déjà sur le marché
Le ministre de l’Industrie pharmaceutique a déclaré, jeudi dernier, que le groupe Saidal avait entamé la production d’un médicament innovant destiné au traitement de certains types de cancer, désormais commercialisé depuis le début de l’année par l’intermédiaire de la Pharmacie centrale des hôpitaux (PCH).
Dr. Kouidri a précisé que Saidal a réussi à produire localement le Pembrolizumab Saidal, un médicament particulièrement onéreux sur les marchés mondiaux. 22 000 doses ont déjà été distribuées via la PCH.
S’exprimant en marge de la cérémonie d’installation d’un groupe de travail conjoint entre le ministère et le Conseil du renouveau économique algérien (CREA), qu’il a co-présidée avec M. Kamel Moula, président du CREA, le ministre a souligné que ce partenariat vise à lever les obstacles à l’investissement et à accompagner les porteurs de projets.
Il a également annoncé que six nouveaux projets de production de médicaments anticancéreux seront lancés prochainement, en complément des quatre entreprises déjà actives dans ce domaine. Il a rappelé que Saidal développe actuellement 24 médicaments anticancéreux et entend élargir cette gamme.
Partenariat et transfert de technologie
De son côté, Mourad Belkhelfa, consultant scientifique au sein du groupe Saidal, a indiqué à l’APS que la production locale du Pembrolizumab s’est faite en partenariat avec un opérateur étranger spécialisé dans les traitements anticancéreux. Ce médicament est destiné au traitement de plusieurs cancers, notamment du poumon, du sein et de la peau.
Il a précisé que la production locale est réalisée par étapes à l’unité Saidal de Constantine, en attendant la finalisation du transfert de technologie par le partenaire étranger, prévue avant la fin de l’année 2025.
Belkhelfa a souligné que le groupe prendra en charge la réalisation des examens cliniques nécessaires à la prescription du médicament, afin de garantir son efficacité. Il a rappelé que le médicament a démontré son efficacité lors des essais cliniques de phase III. La fabrication locale permettra, selon lui, de réduire considérablement les dépenses liées à l’importation.
Booster l’investissement pharmaceutique
À travers la mise en place d’un groupe de travail conjoint entre le ministère et le CREA, le gouvernement affiche clairement sa volonté de booster l’investissement dans ce secteur stratégique. L’objectif est de lever les blocages entravant les projets, afin de renforcer la souveraineté sanitaire du pays.
Ce groupe se réunira chaque mois pour identifier les obstacles concrets, formuler des solutions pragmatiques et proposer les mécanismes d’accompagnement nécessaires à la concrétisation des projets.
Cette initiative s’inscrit dans la mise en œuvre des orientations du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, en faveur d’une relance économique basée sur l’innovation, l’industrialisation et la substitution aux importations.
L’objectif stratégique reste clair : satisfaire durablement les besoins du marché national tout en préparant une présence compétitive sur les marchés régionaux et internationaux.
Le ministre a également appelé les investisseurs à adhérer à la stratégie nationale de renforcement de l’autonomie pharmaceutique, soulignant que ce marché en pleine croissance offre des perspectives prometteuses, notamment la création de milliers d’emplois directs et indirects, avec l’émergence d’environ 5 000 start-up spécialisées.
Vers une industrie pharmaceutique robuste et compétitive
Une politique de localisation de la production de certains médicaments a été adoptée par le groupe Saidal, dans le but de renforcer l’industrie locale, réduire les importations et conquérir des parts de marché à l’international.
Kamel Moula, président du CREA, a insisté sur le potentiel pharmaceutique algérien, affirmant que le groupe de travail œuvrera à son exploitation efficace. L’une des premières missions consistera à établir une liste des médicaments et fournitures médicales actuellement importés, dans le but de relocaliser leur production, en priorité les matières premières, levier-clé de la souveraineté pharmaceutique.
Actuellement, la production « made in Algeria » couvre près de 80 % des besoins nationaux, avec l’ambition d’atteindre 85 % d’ici fin 2025. Toutefois, un travail important reste à faire, notamment en ce qui concerne les traitements innovants pour des pathologies encore fortement dépendantes de l’importation.
Sur un total de 5 462 médicaments enregistrés, 4 120 sont fabriqués localement et destinés aux officines. Quant aux hôpitaux, la part de marché des produits locaux via la Pharmacie centrale représente 24,69 %, soit 262 médicaments produits localement sur 1 061 référencés dans la nomenclature nationale.
Afin d’encourager l’investissement, le ministre avait proposé six mesures, à savoir l’amélioration de la performance de l’Agence nationale des produits pharmaceutiques (ANPP), l’encouragement de la fabrication des médicaments anticancéreux, de l’insuline et des vaccins, le renforcement de l’intégration industrielle, l’attraction de l’investissement étranger direct, le soutien à la recherche et au développement, ainsi que la coopération intersectorielle.
A.R.
