Rentrée des classes : L’école face aux nouvelles ambitions de la société

Après une saison estivale caniculaire : L’épreuve de la rentrée sociale

Avec la rentrée scolaire 2024/2025, les rues algériennes reprennent leurs couleurs, avec une population scolaire de plus de onze millions d’élèves, encadrés par près de 6000 enseignants. À eux seuls, ces chiffres, qui, dans certaines régions du monde de modeste dimension, forment la démographie totale du pays, interpellent, aussi bien les pouvoirs publics- à travers le budget de l’État, la préparation pédagogique, l’évaluation et la préparation aux études supérieures et au monde du travail-, que les parents d’élèves et la société dans sa globalité.

 Par Amar Naït Messaoud

Si l’on adjoignait à cette population scolaire les stagiaires de la formation professionnelle près de 700 000- et les universitaires en graduation et post-graduation- près de deux millions-, le nombre de jeunes algériens en formation frôle 14 millions.

Au-delà la population scolaire, l’administration a l’habitude, à chaque rentrée, de dresser un tableau statistique des nouvelles infrastructures éducatives réceptionnées et d’équipements acquis au profit des élèves (livres scolaires édités, collèges, lycées et écoles livrés, nombre d’enseignants, transport scolaire, restauration,…).

Ce sont là des préoccupations d’intendance et de logistique, certes, lourdes sur le plan budgétaire, mais, reconnaissons-le, sont loin de donner l’image exacte de la réussite pédagogique et sociale de notre école.

Les réalisations en matière d’infrastructures au cours des vingt dernières années ont profité au secteur de l’Éducation, sans doute mieux que pour les autres secteurs.

Des centaines de nouvelles infrastructures scolaires ont été réalisées, les salaires des enseignants ont été revalorisés, des efforts méritoires ont été déployés dans la dotation des écoles en cantines et bus scolaires, outre l’aide apportée à certains élèves de familles nécessiteuses.

Néanmoins, les lourdes interrogations inhérentes à la déperdition scolaire, au niveau général de l’enseignement, aux mécanismes d’insertion de la formation dans les grandes problématiques se la société algérienne (adéquation avec le champ économique, relève de l’élite nationale, formation à l’esprit de citoyenneté), sont, demeurent toujours pendantes, même si beaucoup d’effort a été accompli au niveau universitaire pour l’aide apportée aux start-up et au développement de l’entreprenariat.

Remédier aux déperditions

L’important accompagnement d’intendance et de logistique, qui est venu remédier aux insuffisances héritées des années 1980 et aux dégâts occasionnés par la décennie noire des années 1990, est censé conduire le système éducatif, et de formation en général, à aboutir à des données tangibles sur le plan des résultats scolaires.

Le système de réalisation docimologique-évaluations successives par des examens à mi-parcours ou des examens finaux- peut indiquer la tendance générale et les efforts investis dans l’enseignement et la formation, mais n’exprime pas toute la problématique du niveau pédagogique et de l’efficience de l’enseignement reçu.

Par exemple, le taux de réussite au baccalauréat exprime une partie de la performance de l’enseignement au niveau des lycées. L’autre partie sera évaluée et connue à partir des résultats de la première année de l’Université.

En effet, il y a moins de dix ans, le constat a été fait par les autorités officielles établissant que plus de la moitié des étudiants de première année universitaire ont redoublé l’année en raison, pour la plupart, de la langue d’enseignement, passant du lycée, où toutes les matières sont dispensées en arabe, à l’université où beaucoup de spécialités techniques et scientifiques sont dispensées en français.

De même, les statistiques du ministère de l’Éducation avaient fait état, il y a quelques années, de la dure réalité de la déperdition scolaire, à savoir que, sur 100 élèves qui entrent en première année primaire, seuls 4 arrivent à l’examen du baccalauréat ! Et sur ces 4, seuls deux obtiennent le fameux sésame, le baccalauréat.

Un continuum pédagogique

La relation entre l’enseignement général, et principalement le cycle du lycée, d’une part, et l’Université, d’autre part, s’impose d’elle-même, du fait qu’elle tient d’un continuum pédagogique qu’il y a lieu d’évaluer et de refonder. Il y a lieu de l’élargir à un troisième acteur, celui de la Formation et de l’Enseignement professionnels.

C’est ce triptyque- éducation nationale, enseignement supérieur et formation professionnelle- qui est aujourd’hui censé accompagner les interrogations et les ambitions de la société algérienne dans un contexte- qui a acquis un caractère de durabilité et de chronicité- de grands défis mondiaux liés au progrès scientifique, à l’accès aux nouvelles technologies numériques, aux avancées biotechnologiques, ainsi qu’aux changements climatiques, lesquels risquent de faire peser leur hypothèque sur la sécurité hydrique et alimentaire du pays.

Ce qu’attend la société, singulièrement dans le contexte actuel, caractérisé par des défis multiformes- politiques, géopolitiques, économiques, sociaux, culturels,…- est que son école puisse faire partie des solutions que ré- clame l’œuvre de redressement.

Autrement dit, aujourd’hui, il est espéré et attendu du système scolaire algérien, lourd sur le plan budgétaire et très prégnant socialement au vu de la taille de la population scolaire, qu’il constitue la locomotive du développement national, loin de l’esprit « harga » et de la fuite des cerveaux.

A. N. M.

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