Revoir le modèle doctrinal économique prôné par l’Etat depuis l’indépendance du pays, hausser le taux de bancarisation (l’un des plus faibles dans le monde) et aller vers la création de banques privées, relancer la ré-industrialisation et la diversification de l’Economie en déterminant le rôle que doit y jouer l’entreprise publique, réviser le code du commerce qui date de 1993, lister les fautes de gestion et non pas pénaliser l’acte de gestion, libérer la machine judiciaire pour libérer les initiatives visant l’esprit compétitif à l’échelle régional dans le cadre d’un investissement conséquent. Telles sont, entre autres, les principales propositions ayant sanctionné la Journée d’étude sous le thème » Partenariat public/privé et promotion de l’investissement », organisée par l’Union national des entrepreneurs publics (Unep), hier mercredi, à l’Ecole supérieure de l’hôtellerie et de la restauration (Eshra) à Ain Bénian (Alger).
Par Zoheir Zaid
Dans son allocution le président de l’Unep, Lakhdar Rekhroukh, a appelé à la professionnalisation des capitaux marchands, tout en plaidant pour le recours au Partenariat Public/Privé (PPP) comme alternative au financement du Trésor public, désavantagé par la situation critique des finances publiques. Le président de l’Unep a également insisté sur le rôle du PPP pour la réalisation des infrastructures, en citant des secteurs stratégiques pouvant être la locomotive.
Il s’agit du secteur des transports (réalisation et exploitation en concession de nouveaux tronçons de métro, tramway et de chemin de fer, ainsi que le cabotage et le ferry en ce qui concerne le transport maritime), de l’énergie (production de l’électricité à partir des énergies renouvelables »EnR » respectueuses de l’environnement), et les travaux publics (réalisation et exploitation en concession de tronçons d’autoroute). Rekhroukh a aussi souligné que les entreprises publiques et privées ont les mêmes droits mais pas les mêmes obligations.
Pour sa part, le directeur des Méthodes à la Caisse nationale pour d’équipement pour le développement (Cned), Salim Tedji, a rappelé dans sa communication ‘’Partenariat Public-Privé’’, que le PPP en usage dans beaucoup de pays, sert d’outil aux politiques d’industrialisation et aussi à la réalisation d’infrastructure de différents caractères (hôpitaux notamment), citant les exemples de la Turquie (classée première mondiale), la Corée, la Chine, mais aussi l’Australie et le Royaume-Uni.
Toutefois, le passage vers le PPP nécessite l’élaboration d’un arsenal juridique (harmonisation du cadre législatif du PPP avec les lois sectorielles), le développement de l’expertise en matière de financement et d’évaluation des risques au sein du secteur bancaire et de l’expertise en matière de préparation de projets PPP dans les entreprises algériennes. Il a également rappelé que l’Algérie compte quelques PPP, dont 11 stations de dessalement et 2 centrales électriques sous forme de BOO (Build Own Operate) menés par Algerian Energy Company (AEC). Pour le financement du PPP, l’intervenant souligne la possibilité de l’avoir par subventions, capitaux propres, prêts (bancaire ou obligataire) et même dans le cadre de la finance islamique (sukuk).
Le conférencier tient à rappeler que « le PPP est un arrangement contractuel sur le long terme (20, 25 ou 30 ans) par lequel le secteur public transfère au secteur privé tout ou partie des responsabilités de conception, de financement, de construction, d’exploitation et de maintenance d’une infrastructure économique (ex: énergie, transport, eau);ou sociale (ex : éducation, santé). »
Parmi les avantages du PPP, Salim Tedji a cité avoir moins de recours au budget de l’Etat via la mobilisation du financement privé, étalement des dépenses de l’Etat sur une longue durée. Quant aux inconvénients, il avancera les coûts et délais des montages juridiques et financiers importantset les risques liés au non-contrôle du partenaire privé : le contrôle doit impérativement être effectué durant toute la durée du contrat.
Ils ont déclaré:
Mohammed Chérif Belmihoub, ex-ministre délégué auprès du Premier ministre chargé de la Prospective dans le gouvernement de Djerad :
« Créer une Agence nationale des participations de l’Etat »
« Il faut supprimer la tutelle des entreprises publiques. L’idéal est de mettre en place une Agence nationale des participations de l’Etat, sous tutelle du Conseil des ministres, et quitte à la renforcer par des compétences de la diaspora. Aussi, je propose de revenir aux réformes de 1988, qui au moins, avaient le mérite d’être claires. Et de transformer les EPE (entreprise publique économique) en EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial). Je pense que nous sommes à la veille d’une transformation industrielle importante.»
Le professeur de droit à l’Ecole supérieure algérienne des affaires (Esaa), Ali Mebrouckine :
« Associer les magistrats »
« Associer les magistrats dans l’acte de dépénalisation de la faute de gestion. Lancer l’idée de délégation de pouvoir au sein des entreprises publiques, manière de connaitre »qui fait quoi dans l’entreprise », tout en déchargeant le manager de tout chapeauter tout seul. »
Le président de la Confédération des industriels et producteurs algériens (Cipa), Abdelwahab Ziani:
« Une nouvelle géostratégie s’est mise en place du fait du Covid-19′ »
« La Covid-19 a tout chamboulé, en mettant en place une nouvelle géostratégie, qu’il faut prendre en considération pour repenser le développement du pays, en ne se basant plus sur des législations et des pratiques très éculées. Je préfère plutôt l’appellation d’entreprise de droit algérien et non celle d’entreprise publique et entreprise privée, qui ne doit plus être de mise. J’en appelle à l’organisation d’un autre rencontre pour aller en profondeur dans les débats liés au PPP. »
PPP en Algérie :
11 stations de dessalement et 2 centrales électriques sous forme de BOO (Build Own Operate) menés par Algerian Energy Company (AEC) (déjà cités)
Une centrale hybride (gaz et solaire) menée par New Energy Company (NEC)
3 Concessions de terminaux à conteneur ( les ports d’Alger, de Béjaia et de Djen Djen)
4 Contrats de management pour la gestion de l’eau potable(Alger/Tipaza, Oran, Constantine, Annaba/Tarf), la gestion de l’aéroport d’Alger et l’exploitation du métro et tramway
Chiffres à retenir :
Salaire net moyen dans l’entreprise publique économique : 57 300 DA
Salaire net moyen dans l’entreprise privée économique : 33 400 DA
Le P-dg d’une entreprise publique économique a passé en moyenne 100 jours dans les Conseils d’administration, l’équivalent de la moitié des jours ouvrables hors son entreprise (dixit : Si Mokrane Arab, modérateur)
Z. Z.