La liste des activités économiquement viables de l’agriculture de montagne est longue. Le problème qui se pose est comment faire pour ressusciter certaines cultures et les développer pour qu’elles soient le moteur de l’activité économique de la région et génératrices d’emplois. Pour M. Radja Ahmed, ingénieur agronome, expert en agriculture de montagne, et membre de la CEACE (Chambre des experts agréés Communauté européenne), ce type d’agriculture existe déjà chez nous, mais est confronté à la tradition vivrière qu’il a suscitée, et au morcellement des terrains.
Eco Times : Comment définiriez-vous l’agriculture de montagne en Algérie, et quels en sont les problèmes entravant son expansion ?
Radja Ahmed : L’agriculture de montagne a toujours existé en Algérie, mais n’a jamais évolué pour être productive. C’est un type d’agriculture vivrière, avec en plus des terrains morcelés issus d’héritage, donc difficiles à gérer. Pourtant, les zones de montagne, s’étendant sur le long de la partie nord du pays et en bordure des hautes plaines steppiques, sont d’une importance capitale dans le développement socio-économique du pays. Elles représentent un espace potentiel pour le redéploiement de certaines activités et la mise en place d’infrastructures de base nécessaires au maintien des populations et à l’attractivité territoriale.
Les choix stratégiques qui ont été faits auparavant lui ont été défavorables. Il faut souligner aussi que le morcèlement des terrains, issus d’un patrimoine hérité, a considérablement contribué à faire stagner ce type d’agriculture.
Vous pensez, donc, que l’option «tout-pétrole» est une erreur ?
Pas complètement. Mais sur la diversité économique, oui, cela a été une erreur. Il ne fallait pas mettre de côté toutes les opportunités qui pouvaient exister. Pourtant, les zones de montagne, s’étendant sur le long de la partie nord du pays et en bordure des hautes plaines steppiques, sont d’une importance capitale pour le développement socio-économique. Elles représentent un espace potentiel pour le redéploiement de certaines activités et la mise en place d’infrastructures de base nécessaires au maintien des populations et à l’attractivité territoriale.
Vous parliez de choix stratégiques. Pouvez-vous être plus clair ?
On a opté pour le tout-pétrole. Aussitôt, on a tout importé, même les œufs. C’est une aberration économique. Cette option a accéléré un exode rural qui a fait que beaucoup de personnes sont venues grossir les villes et faire la queue dans les souks el fellah. Plus de production locale donc. L’heure était à la consommation facile. L’agriculture de montagne a été freinée par la production pétrolière, et est restée, par conséquent, concentrée sur le côté vivrier. Le jardin potager est devenu la seule facette de l’agriculture de montagne.
Si l’agriculture de montagne peut avoir un rôle à jouer dans celle des plaines, avons-nous les capacités techniques et la culture appropriée, pour la faire évoluer ?
On peut faire développer ce type d’agriculture pour peu que l’on se donne les moyens. Regardons ce qui se passe autour de nous. En Indonésie ou au Japon, par exemple, on a mis à profit le relief pour développer ce type d’agriculture, au point où c’est devenu plus que rentable et ils exportent aussi.
Il faut pour la faire sortir de l’ornière, procéder à une vaste réorganisation, et promouvoir un vrai accompagnement tant structurel qu’infrastructurel.
Nous devons régler, au préalable, les problèmes d’héritage qui existent pour ensuite, constituer des coopératives.
Il faut savoir aussi développer l’arboriculture propre à chaque région, et surtout, prévoir des points de collecte. Il faut absolument faire émerger les coopératives, sans quoi, c’est vers l’échec que l’on se dirige.
De plus, il faut savoir organiser les productions et les canaliser. Une formation est aussi nécessaire, pour redonner goût à ce genre de culture, et faire intéresser les personnes concernées, par des prêts attractifs, des exemptions d’impôts durant une période donnée par exemple.
Juste pour rappeler les potentialités. L’activité agricole représente la base de subsistance principale des populations qui y vivent, soit près de 7 millions d’habitants, soit 17% du total national. La population active en agriculture est de 639 065 (soit 23% de la population active totale), selon des statistiques de 2017.
Entretien réalisé par Réda Hadi