Les modalités de partage de l’actif et du passif des wilayas mères et nouvelles wilayas viennent d’être édictées par décret exécutif n° 21-197 du 29 Ramadhan 1442 correspondant au 11 mai 2021, et doit être achevé avant le 31 décembre 2021
Le nouveau découpage qui a mené à la création des nouvelles wilayas, vise à «renforcer la décentralisation, assurer une répartition équilibrée du territoire, améliorer son attractivité de manière à répondre aux exigences du développement socio-économique au profit des citoyens, notamment dans les régions frontalières, et rapprocher les services publics de ces régions», rappelle un communiqué du Premier ministère.
Par Réda Hadi
Certaines formations politiques ont fait remarquer l’ «illégalité» de cette décision du fait que «le découpage territorial relève de la loi qui devrait être adoptée par le Parlement», conformément au dernier amendement de la Constitution. Les économistes quant à eux se posent la question du poids budgétaire que cela va représenter au pays en pleine crise économique accentuée par la Covid 19, tout en relevant la problématique du timing. Des observateurs font remarquer que cette décision répond surtout aux vœux de la population de ces régions devenues wilayas.
La centralisation a freine le développement local
A titre d’exemple, la centralisation de l’administration, des directions de la santé, de l’éducation, de l’état-civil, des travaux publics, de l’emploi, etc. rend difficile la vie des citoyens vivant parfois à plusieurs centaines de kilomètres du chef-lieu de la wilaya. Dans certaines régions, il faut traverser toute une partie du gigantesque désert pour signer un document, se soigner, passer un concours pour un emploi ou une épreuve spécifique du baccalauréat. Entre le chef-lieu de la wilaya d’Adrar et la daïra de Bordj Badji Mokhtar, par exemple, il y a plus de 700 kilomètres ! Par ailleurs, seules les wilayas concentrent les enveloppes budgétaires locales et peinent souvent à faire rayonner les projets d’infrastructures sur des territoires très vastes, surtout dans le Grand Sud. La centralisation, donc, a énormément freiné les différents projets de développement
Les nouvelles wilayas opérationnelles dans 5 ans
Billel Aouali, économiste, souligne à cet effet que «selon les chiffres du gouvernement, 63 % des Algériens vivent dans le Nord, soit 4 % du territoire national, 28 % sur les Hauts-Plateaux, soit sur 9 % du territoire, alors que le Sud, c’est-à-dire 87 % du territoire, n’accueille que 9 % de la population. Pour créer une wilaya avec tous ses services, il faut des budgets considérables, des recrutements en masse ainsi que des infrastructures à bâtir»
Cette décision est salutaire en en sens, pour peu que les pouvoirs publics prennent en compte les spécificités de chaque nouvelle wilaya, et leur étendues géographique.
Pour Nabil Djemaa, expert agrée en économie, même si ce nouveau découpage répond à une logique d’épanouissement du citoyen, cela prendra du temps pour que celles-ci soient effectivement opérationnelles. «Même si ce projet de découpage est ancien, on aurait dû faire au préalable des études d’impacts financiers, et de stratégie surtout. C’est assurément une décision précipitée » et d’ajouter que « le décret exécutif explique donc les modalités de partage sous forme de péréquation. Au début il est normal que la région qui a le plus de revenus partage avec l’autre. Ce n’est qu’au bout de 4 à 5 ans, que les nouvelles wilayas seront autonomes. Ce laps de temps permettra aux nouvelles venues d’avoir des financements gouvernementaux, d’établir un inventaire détaillé de ses ressources et biens».
L’expert a tenu à nous préciser que «l’autre gros enjeu de ce nouveau découpage reste stratégique, et inhérent aux risques sécuritaires dans la région sahélienne. Nous avons déjà un déficit d’une vingtaine de villes sur la ceinture frontalière sud. Fixer les populations dans les régions de l’extrême sud (proches des frontières avec le Mali, le Niger et la Libye) est une des priorités des plans d’aménagement du territoire depuis une dizaine d’années, et de rajouter, «on doit penser à créer une force spatiale chargée de protéger les frontières avec les dernières technologies, sans avoir recours à une légion de militaires et de camions. Une seul drone suffit à surveiller la frontière», estime-t-il.
R. H.