Une nouvelle organisation pour les opérations d’exportation de produits de large consommation s’impose. Le système en place a montré ses «limites» et le ministère du Commerce et de la Promotion des exportations est appelé à innover afin d’éviter toute perturbation où pénurie sur le marché local. Ce qui n’était pas respecté durant les deux mois derniers (janvier et février courant). Ce qui a dicté au gouvernement la nécessité de suspendre toute opération d’exportation de csertains produits de large consommation.
Par Akrem R.
Des opérations d’exportations de pattes alimentaires, d’huile de table et sucre blanc, ont été réalisées par des opérateurs en mode troc, au niveau de nos frontières Sud (In Gazem), durant la période de décembre 2021 et début 2022, et ce, au moment même où le marché national connaissait une perturbation dans l’approvisionnement en ces produits. En clair, ces opérateurs économiques ont manqué à leur engagement. «Au moment où le marché national connait une tension sur certains produits alimentaires de large consommation, en particulier, l’huile de table, un opérateur avait formulé une demande pour l’exportation de 170 000 litres de ce produit, tout en s’engageant à ce que le marché ne connaitra pas de pénurie! Un engagement manqué, et qui n’a rien à voir avec la réalité du marché national», lit-on dans une note adressée par le Premier ministre, Aïmen Benabderhamane, en date du 7 février 2022, au ministre du Commerce et de la promotion des exportations. La même source n’écarte pas l’existence d’autres opérations d’exportation «frauduleuses».
En effet, et avec l’approche du mois de Ramadhan, durant lequel la demande de ces productions de large consommation (sucre, huile et autres), connaitra une hausse, le Premier ministre a, par conséquent, instruit le ministre Kamel Rezig de geler toute opération d’exportation de ces produits, tout en procédant à une révision du cadre réglementaire régissant les mécanismes d’exportation. Ainsi, ajoute la même source, le ministère du Commerce est appelé à réagir avec plus de vigueur contre tout opérateur ne respectant pas son engagement et ne prenant pas en considération la situation du marché nationale.
Il est à noter, qu’en dépit du dispositif de contrôle en place au niveau de nos frontières, le phénomène de la contrebande fait toujours rage. Des quantités importantes de produits alimentaires subventionnés à coût de milliards de DA par l’Etat, continuent d’être exportées illégalement vers des pays limitrophes.
D’ailleurs, parmi les raisons de la récente pénurie d’huile de table dans les supermarchés et magasins d’alimentation générale, se trouve la contrebande qui le transfert vers un pays voisin en grande quantité.
Des photos, des vidéos et même des publications sur les réseaux sociaux l’ont prouvé. L’Association pour la protection du consommateur et de son environnement (APOCE), a dévoilé, en effet sur sa page sur les réseaux sociaux, des offres de vente de marques d’huile de table algérienne exposées dans des page Facebook destinées au marché tunisien.
Par ailleurs, et en prévision du mois de Ramadhan, les membres de la commission des affaires économiques, du développement, de l’industrie, du commerce et de la planification de l’Assemblée populaire nationale (APN), ont décidé d’auditionner des opérateurs économiques pour parer à une éventuelle pénurie de certains produits alimentaires de base durant le mois sacré.
«Il a ainsi été convenu d’auditionner le président de la confédération des viandes rouges, les membres de la Chambre de commerce et d’industrie Mezghena-Alger et le président de la fédération des producteurs de pommes de terre».
A. R.
Ishak Kherchi, expert en économie : «Il faut élaborer une liste des produits exportables»
L’expert en économie Ishak Kherchi a jugé anormal que des produits alimentaires de large consommation soient exportés sur un simple engagement de l’opérateur économique.
Qualifiant la décision du Premier ministre de «logique» et même, de «salutaire», surtout avec l’approche du mois de Ramadhan où la consommation atteint son pic, l’intervenant a recommandé de revoir le dispositif actuel, basé sur l’engagement de l’opérateur, tout en mettant en place des mécanismes claires. Kherchi, qui est également enseignant universitaire, a estimé nécessaire d’élaborer une liste des produits subventionnés par l’Etat, dont l’exportation est strictement interdite quelle que soit la conjoncture. « L’autorisation d’exportation des produits subventionnés drainera des gains important pour les opérateurs au détriment du Trésor public», dira-t-il.
En deuxième lieu, l’expert a appelé, également, à l’élaboration d’une liste des produits de large consommation, dont l’exportation, à l’instar de la pomme de terre et d’autres produits agricoles, est interdite durant certaines périodes de l’année, comme le mois de Ramadhan, l’arrière saison, etc,. Ainsi, pour un meilleur contrôle, il est recommandé d’associer les services des Douanes dans l’élaboration de ces listes, préconise-t-il. « Une fois ce système opérationnel, c’est au ministère du Commerce et aux services compétents d’autoriser ou pas un produit à l’exportation. Je trouve anormal qu’un opérateur s’engage sur la stabilité du marché, une fois que le produit concerné est exporté ! Sur quelle base il va se prononcer?
C’est au ministère du Commerce d’assumer sa responsabilité en supprimant l’exportation sur la base d’un engagement et de le remplacer par ce système de listes», recommande-t-il. Pour atteindre ces objectifs, ajoute-t-il, il ya lieu de procéder à un recensement général des producteurs, des quantités produites, des besoins du marché national. «C’est à ce moment-là, qu’on pourra décider de l’exportation d’un produit ou pas», dira-t-il, tout en rappelant qu’il avait déjà mis en garde contre les conséquences de l’exportation intensive sur la stabilisation du marché local. Le Cnese et l’ONS sont appelés, indique-t-il, à apporter le soutien nécessaire au ministère du Commerce dans cette mission «difficile» à travers la numérisation de toutes les opérations (production, consommation…) et également de procéder à l’actualisation des listes mensuellement.
Propos recueillis par A. R.