Les ménages, déjà éprouvés par de longs mois de confinement, de chômage forcé et des dépenses du Ramadhan, font face aujourd’hui à une hausse de certains produits de consommation. Certes, si dans leur ensemble, les prix ont stagné, ils n’en demeurent pas moins élevés, impactant de facto les petites et moyennes bourses. Une virée dans les principaux marchés de la capitale, nous donne un aperçu de l’érosion du pouvoir d’achat. Les étals sont achalandés, mais c’est surtout vers la pomme de terre et les oignons que les chalands se dirigent. Les légumes ont connu une légère baisse, mais pas les fruits qui continuent d’être hors de portée. Aussi, face à la politique d’austérité et la crise économique que traverse le pays, les Algériens vivent donc des fins de mois de plus en plus difficiles, entre changement des habitudes, privations ou dettes. Du côté du ministère des Finances, et par la voix du directeur général de la régulation et l’organisation des marchés, on ne parle pas de hausse mais de déséquilibre du marché.
Par Réda Hadi
En effet, Sami Kolli, directeur général de la régulation et l’organisation des marchés, répondant à des confrères, a nié l’existence d’une hausse des prix, soulignant que ce sont des déséquilibres de prix et non une hausse exagérée, comme cela s’est produit au mois de Ramadan.
En ce qui concerne les hausses déjà existantes, il les justifie par la crise sanitaire et par la hausse significative des prix de certaines matières sur le marché mondial, comme l’huile, le sucre, le blé, ainsi que la hausse des coûts du fret (de 3 000 $ à 17 000 $), à cela, s’ajoute la dévaluation du dinar.
Une situation déjà évoquée par des économistes qui appellent à des mesures réactives de la part des pouvoirs publics.
Pour M. Zebdi Mustapha, président de l’Apoce (Association de Protection et Orientation du Consommateur et son Environnement), quelle que soit la sémantique utilisée, « c’est le pouvoir d’achat qui baisse ».
M. Zebdi soutient que face à la cherté de la vie, l’érosion de pouvoir d’achat et les dépenses interminables, « le consommateur subit des secousses sociales ».
Cette situation de précarité sociale que subit le consommateur algérien est d’autant plus alarmante qu’elle s’inscrit dans une tendance lourde, nécessitant un traitement de choc, lequel nécessite à son tour, une bonne dose de volonté politique et une adhésion de l’ensemble des couches sociales et politiques.
Pour l’Apoce, « il est urgent de revenir à une stabilité sociale, par des solutions rapides et efficaces. » Précisant la position de son organisation, M. Zebdi nous a rappelé que cela «passe aussi par l’exonération de la TVA pour les produits de première nécessité».
Le casse-tête des subventions
S’agissant des subventions, celui-ci suggère de les réorienter vers les familles qui en ont le plus besoin ou alors « partager la somme globale allouée aux subventions à tous les ménages » par un simple virement bancaire. Mais face à la complexité de cette opération et selon l’Apoce «les familles qui en ont le plus besoin pourrait se faire déclarer et bénéficier directement de ces subventions».
Par ailleurs, et toujours dans le même contexte, celui-ci nous a précisé que l’on «pourrait toujours prendre exemple sur des pays d’Amérique Latine qui ont réglé ce problème de subventions ».
En dernier lieu, le président de l’Apoce émet le vœu «d’une réunion multilatérale, qui réunirait, les pouvoirs publics, les associations de consommateurs, des syndicalistes, bureaux d’études et des économistes, pour clore définitivement ce chapitre »
Le ministère du Commerce, quant à lui, a souligné que le plus grand défi est de réconcilier le citoyen avec le produit national malgré la concurrence féroce, pour faire redémarrer la machine et relancer la consommation, ce qui fera baisser les prix.
Pour Nabil Djemaa, expert agréé en économie : «2020 a été une année difficile pour les ménages en raison du confinement et du chômage forcé, mais cette année 2021 s’annonce encore plus sombre que les précédentes sur le plan économique. Les majorations sur les prix de biens de consommation et de services ont atteint pour certains produits, les 50% et avec la nouvelle dépréciation de la monnaie nationale, les prix risquent de s’envoler davantage. Cette hausse des prix des biens de consommation et de services, n’est que la partie apparente de l’iceberg. L’envolée des prix est provoquée par l’inflation importée ou inflation par les coûts », selon l’économiste.
R. H.