Attendu depuis quelques mois déjà, un nouveau mécanisme de régulation du marché des produits agricoles vient d’être élaboré et mis en œuvre en remplacement au Syrpalac (Système de régulation des produits de large consommation), dont l’abandon définitif a été confirmé en avril dernier par le directeur de la Régulation et du développement des productions agricoles au ministère de l’Agriculture et du développement rural, M. Ali Zoubar.
Par Mohamed Naïli
Tel que présenté, hier, par le directeur général du BNEDER (Bureau national d’études et de développement rural), affilié au ministère de l’Agriculture et du développement rural, Khaled Ben Mohamed, le nouveau mécanisme de régulation du marché qui vient d’être déployé aura pour objectif essentiel la mise en œuvre d’une démarche en mesure d’ « assurer la disponibilité des produits agricoles de large consommation, garantir un stockage sain tout au long de l’année, remettre la production dans un circuit commercial formel ».
En procédant ainsi, le ministère de l’Agriculture cherche à travers ce nouveau système à remédier à deux contraintes majeures qui ont toujours empêché de stabiliser le marché en dépit de tous les efforts consentis dans ce sens par les pouvoirs publics. Il s’agit en premier lieu de consolider la chaîne de distribution, et ce, en assurant un stockage en quantités suffisantes pour garantir une disponibilité des produits en permanence durant toute l’année pour en finir avec les ruptures et les pénuries qui touchent durant certaines périodes des produits stratégiques, comme la pomme de terre notamment.
L’autre contrainte que la tutelle vise à endiguer, voire éradiquer, concerne les circuits informels, que ce soit au niveau de la production ou de la commercialisation des produits agricoles. Dans ce sens, il est question ainsi d’inciter les producteurs et les intervenants dans la commercialisation de fruits, légumes et viandes à intégrer le circuit formel et réglementaire.
Dans un exposé qu’il a présenté hier lors de son passage à la chaîne 3 de la radio nationale, le DG du BNEDER, a détaillé les leviers auxquels la tutelle a fait recours pour la mise en œuvre de ce nouveau système de régulation du marché, en précisant qu’ « il s’agit d’un système qui s’appuie sur des capacités de stockage des surplus de production, avec un dispositif de régulation, notamment les chambres froides et les silos ».
Pour pallier aux insuffisances qui empêchaient auparavant d’atteindre les objectifs assignés à l’ancien système Syrpalac, M. Ben Mohamed a affirmé que le nouveau dispositif « est une démarche similaire à l’Office des Fruits et Légumes d’Algérie (ex-OFLA), mais un peu plus modernisée, à travers les nouveaux mécanismes, gérés par l’Office National Interprofessionnel des Légumes et des Viandes (ONILEV) ».
En plus de ce nouveau système de régulation du marché, il y a lieu de relever que les responsables sectoriels s’inspirent de plus en plus des anciens dispositifs de gestion du secteur agricole mis en œuvre et qui ont montré leur efficacité durant l’ère antérieure à la libéralisation de l’économie, au début des années 1990, comme l’encouragement des agriculteurs à se fédérer dans le cadre de coopératives agricoles pour se mutualiser et coopérer entre eux pour le partage de technicité, du savoir-faire et du matériel.
160 000 m3 de stockage sous froid
Pour ce qui est des infrastructures logistiques à travers lesquelles fonctionne le nouveau mécanisme de régulation du marché, M. Ben Mohamed a précisé que « le système travaille avec des opérateurs publics comme FRIGOMEDIT qui dispose de 13 infrastructures de stockage sous froid, soit 160 000 m3, en voie de finalisation, et une trentaine de silos qui sont prévus, dont 16 sont pratiquement réceptionnés par l’OAIC (Office algérien interprofessionnel des céréales), soit une contenance de 2,5 millions de quintaux. »
Outre l’infrastructure relevant des opérateurs du secteur public, le DG du BNEDER a précisé aussi que, dans les situations de surplus et d’abondance de la production qu’enregistrent certaines filières, à l’instar de la pomme de terre, l’oignon ou les viandes blanches, « les opérateurs publics peuvent faire recours à la location d’infrastructures privées, avec des engagements contractuels afin de contrôler les flux de stockage et de déstockage de ces denrées. »
Tel qu’il se décline, le nouveau dispositif est en mesure de stabiliser le marché, néanmoins, des mesures de suivi et de contrôle permanent s’imposent afin de s’assurer que les acteurs sur le marché qui intégreront ce mécanisme, que ce soit les producteurs ou les intervenants dans le circuit commercial, agiront en fonction des règles et objectifs tracés dans ce cadre. Faute de quoi, il sera difficile d’éviter la réédition des pratiques spéculatives, l’instabilité des prix et l’apparition de pénuries périodiques qui ont toujours caractérisé le Syrpalac.
En effet, à son lancement, le Syrpalac a contribué à la régulation du marché en récupérant pour stockage les quantités excédentaires, évitant ainsi l’effondrement des prix et des pertes aux agriculteurs, et lesdits stocks sont réinjectés sur le marché durant les périodes de baisse de production, mais, après quelques années seulement, ce système a fini par perdre de son efficacité, en n’ayant aucun impact sur les prix, et ce, suite au désengagement de nombreux agriculteurs estimant que le dispositif est peu rémunérateur compte tenu des prix d’achat que leur proposent les organismes de stockage.
Enfin, l’annonce de la mise en œuvre de ce nouveau dispositif coïncide avec un bilan que vient de présenter le ministre de l’Agriculture, Abdelhafidh Henni, faisant état d’une importante hausse de la production dans les principales filières agricoles durant l’année en cours, notamment la pomme de terre, la tomate industrielle, les viandes rouges et blanches. C’est pourquoi donc la régulation du marché est une étape cruciale pour assurer la disponibilité des produits agricoles en permanence et à des prix acceptables pour les agriculteurs et les consommateurs.
M. N.