Tandis que le discours officiel tend vers l’apaisement social, à travers des mesures pour juguler, sinon freiner la hausse de la mercuriale, des tensions existent sur certains produits et particulièrement l’huile de table avec son corollaire, la spirale spéculative qui semble se mettre en place, d’ores et déjà. La hausse des prix touche particulièrement deux produits essentiels à la consommation des ménages : l’huile de table et la volaille. Quelles en sont les causes ? Experts, gouvernement et professionnels y vont, chacun de leurs explications.
Par Réda Hadi
A seulement 3 semaines du mois de Ramadhan 2021, les prix des légumes et fruits connaissent une hausse considérable. La pomme de terre oscille entre 30 et 70 DA le kilo, les petits pois à pas mois de 130 DA, la tomate joue la vedette et est proposée a 90 DA le kilo. Une situation qui inquiète énormément les ménages algériens, en cette période propice aux nécessaires fortes dépenses. Si la viande rouge, reste l’apanage des familles aisées, la viande blanche connait aussi une flambée.
Mais le plus inquiétant est la tension sur l’huile. Alors que le principal producteur affirme haut et fort que sa production est largement suffisante pour couvrir les besoins, l’huile reste introuvable sur les étals. Alors, pénurie aidant, dans certaines grandes surfaces d’Alger, le bidon de 5 l d’huile est proposé à 1500 DA. De quoi inquiéter la ménagère. Même l’huile en bidon de 4 litres, est vendu plus chère, (quand on la trouve) à 900 DA.
Pour beaucoup d’observateurs, la hausse serait due, entre autres, à la baisse de la valeur du dinar algérien, et à la mainmise des spéculateurs sur le marché. D’autres avancent l’inefficacité des contrôles des prix, ajoutée au disfonctionnement du circuit de distribution.
Si les ménages pointent du doigt les commerçants, les accusant d’être derrière cette hausse, d’autres facteurs sont à l’origine de cette flambée des prix. Entre autres, selon des économistes, la baisse de la valeur du dinar algérien qui a impacté directement les intrants des matières premières, ce qui s’est répercuté directement sur les prix de certains produits de large consommation.
Dans de telles conditions, les spéculateurs ne ratent pas l’occasion et manipulent l’offre et la demande. Les huiles de table qui ont, elles aussi, connu une hausse des prix ces derniers temps, provoquent l’indignation des détaillants et surtout des consommateurs. Là aussi, le principal producteur de ce produit alimentaire essentiel, en l’occurrence, le groupe Cevital, a réagi en expliquant aussi la hausse des prix de certaines gammes de ses produits par l’augmentation des prix des matières premières sur les marchés internationaux.
Face à cela, tout le monde se rejette la balle. Pour M. Nabil Djemaa, expert en économie et en finances, les circuits de distribution et la situation de monopole influe directement sur les prix, en ce sens que «les circuits de distributions qui étaient auparavant du domaine de l’Etat, ont été disloqués et laissés aux mains du privé. Maintenant, avec l’augmentation du prix du transport international qui a quadruplé (de 10 dollars la tonne à 40 dollars), il est naturel que le circuit de distribution augmente. Ce qui aurait changé si l’on avait laissé l’Etat se charger de la distribution comme c’était le cas auparavant avec les souks el fellah, Edga, et autres Onaco, ces entreprises publiques n’ayant aucun intérêt à une quelconque spéculation».
Pour cet expert, la crise actuelle est la conséquence d’un manque de vision stratégique. La gestion d’avant avait quelque avantage tout de même, selon lui, avec l’existence d’un ministère de la planification. «A ce jour, nous n’avons pas de stocks stratégiques, alors la spéculation fait rage, et la distribution est à plus de 90 % aux mains du privé», a-t-il souligné
En ce qui concerne la «pénurie» d’huile, elle serait due, selon lui, à la situation de monopole de Cevital. «C’est vrai que les prix de transport et des intrants ont fortement augmenté sur les places internationales, il n’en demeure pas moins que ce groupe fait pression sur les pouvoirs publics en demandant un démantèlement tarifaire comme en 2011 (exonération de la TVA, droits douaniers, et charges fiscales)».
Pour cet expert, le circuit de distribution long et court devait être réétudié pour «plus d’efficacité».
En attendant, dans les marchés, il est toujours difficile de remplir son couffin, et les jours à venir seront cruciaux.
R. H.