Par Lyazid Khaber
L’idée n’est pas nouvelle certes, mais elle mérite bien d’être mise en relief. L’alimentation des populations devient de plus en plus un sujet de préoccupation. Tout comme dans les pays développés où l’on souffre notamment de ce qui est communément appelé «maladies des riches», nos contrées ne sont pas pour autant épargnées, tant l’évolution des modes de consommation des populations, concomitamment avec l’évolution du niveau de vie de larges couches de la société, pose désormais la question de savoir comment permettre une alimentation saine pour tous, et par conséquent réduire les coûts des prises en charge sanitaires, souvent mal évaluées et même passées sous silence?
Pourtant, dans un pays comme le nôtre, le Trésor public paye le gros de la facture consistant en l’assurance du service public de santé, les équipements, mais aussi, particulièrement, la médication. Ainsi, il serait bien logique d’intervenir en amont en assurant une alimentation saine pour tous, pour éviter de payer la facture salée du médicament. Puis, cette idée d’une assurance sociale de l’alimentation, aura également un double objectif, à savoir, non seulement l’assurance d’une alimentation saine, mais également lutter efficacement contre la sous-alimentation et la… faim. Mieux encore, cette assurance d’un nouveau genre peut s’avérer un moyen efficace pour permettre plus d’équité sociale, mais également transformer notre modèle agricole et prendre ainsi soin de l’environnement. Que veut le peuple !
Oui, ces derniers temps, et particulièrement depuis l’avènement de la crise sanitaire induite par la Covid-19, et tout récemment, par les effets de la guerre russo-ukrainienne (deux pays super producteurs de céréales notamment), on en est revenus à parler souvent de «souveraineté alimentaire», ce qui, par ricochet, incite les uns comme les autres, à mettre en place des modèles agricoles performants. L’Algérie n’était pas en reste. Des mesures ont été prises pour encourager les agriculteurs, notamment au Sud du pays, pour au moins satisfaire les besoins locaux. Mais force est de constater qu’après deux ans de pandémie, avec tout ce qu’elle a eu comme conséquences sur le marché local, nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge. En effet, la disponibilité assurée des produits agricoles, notamment les fruits et légumes, n’a pas endigué le problème, ni celui de la qualité alimentaire de ces produits, encore moins celui de l’accessibilité, vu les prix à la consommation qui demeurent encore hors de portée pour de larges couches sociales, notamment dans les milieux ruraux et défavorisés. Pourtant, il aurait fallu d’un peu d’ingéniosité pour promouvoir une agriculture plus économe, autonome et solidaire visant à nourrir, préserver et employer dans les territoires.
Pourtant le «droit à l’alimentation» devrait être reconnu pour tous, comme le soulignait Olivier De Schutter (rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, en 2010), en parlant du «droit d’avoir un accès régulier, permanent et non restrictif, soit directement ou au moyen d’achats financiers, à une alimentation quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions culturelles du peuple auquel le consommateur appartient, et qui lui procure une vie physique et mentale, individuelle et collective, épanouissante et exempte de peur».
Cela dit, une véritable politique alimentaire, passe inexorablement par la mise en place d’une «sécurité sociale de l’alimentation». Pour ce faire, il faudra penser à sanctuariser un budget dédié exclusivement à une alimentation saine et équilibrée par personne et par mois, et l’intégrer dans un régime général de sécurité sociale. Du coup, plusieurs problèmes seront réglés en même temps. Sauf que, il faudra compter sans l’influence des réseaux d’affairistes et la vision néo-libérale qui ne cesse de s’emparer des esprits.
L. K.