Mise en œuvre d’une nouvelle carte sanitaire: Refermer la plaie des disparités régionales

Conçue, en s’appuyant sur les données démographiques, épidémiologiques et économiques, mais aussi, en références aux recommandations contenues dans le Schéma national d’aménagement du territoire (SNAT), lui aussi en cours d’étude pour son renouvellement, une nouvelle carte sanitaire vient d’être mise en place, dont l’objectif est d’assurer une couverture globale et équilibrée à travers les différentes régions du pays.

Par Mohamed Naïli

C’est ce que vient d’annoncer le ministre de la Santé et de la population, Abdelhak Saïhi, jeudi dernier lors d’une session consacrées aux questions orales au Conseil de la nation. Dans ses réponses aux questions des sénateurs, le membre du gouvernement est revenu aussi dans le détail sur les différentes infrastructures de son secteur mises en services ces derniers mois ou celles en cours de réalisation et/ou d’étude dans plusieurs wilayas du pays.

A l’instar de nombreux autres pays dans le monde, y compris ceux industrialisés en Europe  ou en Asie, la question de l’équilibre en matière de couverture sanitaire,  que ce soit en ce qui concerne la disponibilité de structures d’accueil ou de personnel médical, est récurrente et c’est pourquoi d’aucuns s’attendent à ce que cette nouvelle carte sanitaire que vient d’annoncer le ministre de tutelle parvienne à relever ce défi.

En matière de nombres de médecins par rapport à la population totale du pays, ce qu’il y a lieu de souligner est que l’Algérie est au milieu d’un classement mondial réalisé en 2020 par l’OMS (Organisation mondiale de la santé), sur la base de données de 2018, fournies par des instituts nationaux de santé de différents pays. Avec une disponibilité de 1,83 médecin pour 1 000 habitants, l’Algérie est ainsi classée au 83ème rang mondial, surclassant même la Chine qui vient derrière à la 84ème place avec 1,79 médecin/1 000 habitants. 20 ans auparavant, en 1999, la couverture sanitaire en Algérie en nombre de médecins a déjà été de 1 médecin/1 000 habitants.

Outre la disponibilité du personnel médical, il est utile de relever que, selon une étude publiée aux Cahiers du CREAD (Centre de recherche en économie appliquée pour le développement), l’Algérie répond dans une proportion de 80% aux normes de l’OMS en la matière. Les normes de l’Organisation onusienne sont, entre autres, « 4 lits d’hospitalisation pour 1 000 habitants, une polyclinique pour 30 000 habitants, un centre de santé pour 5 000 habitants, une salle de consultations pour 2 000 habitants, un médecin pour 1 200 habitants, un dentiste pour 5 000 habitants, un pharmacien pour 6 000 habitants et un paramédical pour 300 habitants ».

Pour sa part, dans une réflexion intitulée « les déserts médicaux ou inégalités territoriales en matière de répartition de l’offre de soins », le professeur Larbi Abid de l’hôpital de Bologhine, à Alger, avance que, sur la base des statistiques du ministère de la Santé pour l’année 2015, pas moins de 40 000 médecins généralistes, 17 000 spécialistes et 120 000 paramédicaux exercent dans le secteur public de la santé.

Attirer les médecins vers les régions déshéritées

Néanmoins, précise Pr Abid, « même si globalement les indicateurs de santé sont relativement bons, le pays est cependant confronté à un défi majeur de santé publique lié aux fortes inégalités territoriales en matière de santé des populations et de répartition de l’offre de soins. Il existe, en effet, des zones sous médicalisées dans lesquelles les citoyens éprouvent des difficultés à accéder aux soins dans des conditions de proximité et de délais satisfaisantes ».

Dès lors, la question qu’il y a lieu de poser est de savoir pourquoi les professionnels de santé boudent-ils certaines régions du pays et refusent d’y aller exercer. Sans aller de trente six chemins, le professeur Abid est catégorique : « Des éléments tels que le logement, l’emploi du conjoint, l’offre culturelle ou commerciale, les possibilités de scolarisation des enfants sont des facteurs primordiaux. Ils relèvent plus des politiques d’aménagement du territoire que des politiques de santé. Pour cela, la participation des autorités régionales et locales à l’amélioration des conditions d’accueil et de vie des médecins constitue un facteur favorisant l’installation de ces derniers dans des territoires ruraux et/ou enclavés. La coordination des politiques de santé et des politiques d’aménagement du territoire apparaît plus que nécessaire ».

C’est donc à ce niveau qu’il faudra axer les efforts consentis par les pouvoirs publics pour le renforcement de la couverture sanitaire et son extension à toutes les régions du pays. C’est d’ailleurs en s’inscrivant dans cette démarche que le Département de la santé a annoncé en avril dernier que le développement de l’infrastructure sanitaire « dans les régions du sud et des Hauts Plateaux est un des principaux objectifs que le secteur entend atteindre selon une stratégie assurant une couverture sanitaire universelle ».

Toutefois, dans un rapport de l’OMS sur la situation de la couverture sanitaire universelle en Algérie pour la période 2016-2020, d’importants points positifs ont été relevés à plusieurs niveaux, comme c’est le cas de la lutte contre certaines maladies et leur prévention par le biais de la vaccination.

A ce propos, le rapport de l’Organisation onusienne relève qu’au chapitre des maladies évitables par la vaccination en Algérie, « le Programme élargi de vaccination (PEV), conforme aux recommandations de l’OMS, est obligatoire et gratuit. Le taux de couverture nationale est supérieur à 90 %. Les processus de certification par l’OMS de l’élimination (de maladies comme) le tétanos néonatal et de l’éradication de la poliomyélite sont en cours. Si la quasi-disparition des maladies ciblées par le PEV est une preuve de l’efficacité de ce programme, la pérennisation de ces acquis est un défi réel. »

M. N.

Quitter la version mobile