Terres agricoles fertiles, eaux de surface mobilisables, l’Algérie a tous les atouts nécessaires pour redevenir le grand pays agricole qu’elle était et les dernières performances enregistrées, prouvent que notre agriculture a repris du poil de la bête.
Par Akrem R.
Les résultats atteints par ce secteur attestent de la vitalité du renouveau agricole dans notre pays. Mais ces belles performances risquent d être terriblement handicapées par un manque chronique de main d ‘œuvre.
En effet secteur de l’agriculture a du mal à attirer les jeunes en situation de recherche d’emploi, notamment durant les périodes de plantation, de traitement des cultures ou de récolte, où les exploitants agricoles expriment un grand besoin en main d’œuvre saisonnière.
Ce manque de main d’œuvre étonne autant qu’il inquiète les producteurs bios qui ne comprenaient pas cette désaffection.
Un maraicher se dit étonné par l’attitude des jeunes chômeurs qui refusent carrément de travailler et préfèrent rester inoccupés. «Je viens de préparer une parcelle de 5 hectares pour faire de la pastèque, mais, pour la plantation, il me faut au moins une dizaine de travailleurs que je n’arrive pas à trouver», se confie un agriculteur avec regret.
A la question de savoir si ce n’est pas la rémunération ou la pénibilité du travail qui fait fuir les jeunes du travail dans les champs, celui-ci réfute catégoriquement ces suppositions qu’il considère comme «des clichés sur le travail agricole», parce que, explique-t-il «les travailleurs saisonniers durant la période de l’été commencent à 6h ou 6h30 et à 10h30 ou 11h, ils rentrent chez eux, ils sont payés à 2.000 dinars la journée.
Mais, malgré de tels traitements, les jeunes sont de plus en plus rares à s’intéresser au travail dans les champs. Ils préfèrent s’adonner à des activités faciles comme la vente à la sauvette dans les villes, ou des gardiens de parkings sauvage. Ils sont habitués au gain facile ou rêver de partir à l’étranger.
Une opinion partagée par un propriétaire d ‘un Vignole de 6 hectares qui dit «Nous avons trois employés permanents dans l’exploitation, mais durant la période des récoltes nous avons besoin de saisonniers, mais nous rencontrons d’énormes difficultés pour les trouver, pourtant le travail n’est pas aussi dur, nous les traitons avec souplesse et, pour le paiement, nous les faisons choisir s’ils préfèrent une rémunération journalière ou à la tâche, en quantité cueillie».
Les chômeurs boudent le travail de la terre
Autant d’incompréhensions qui suscitent la déception et la colère des exploitants agricoles. C’est surtout le courroux de ces agriculteurs qui ne comprennent pas pourquoi les chômeurs boudent-ils à ce point le travail dans les champs que vient d’exprimer un paysan de l’est du pays dans une vidéo partagée des milliers de fois sur les réseaux sociaux ces derniers jours qui adresse un message direct au chef de l’Etat pour lui demander de suspendre l’allocation chômage instruite il y a quelques mois.
«Cette allocation est une prime pour encourager l’oisiveté, les jeunes ne veulent pas travailler, ils veulent l’argent sans fournir d’efforts en contrepartie. Nous, les agriculteurs, ne trouvons personne pour travailler. Des champs entiers de tomate, pomme de terre, melon, pastèque, qui ne trouvent pas qui ramassera les récoltes», décrit-il en montrant de vastes étendus de produits maraichers en attente d’être récoltés.
Pour ces agriculteurs, l’allocation chômage de 15.000 DA attribuée aux chômeurs âgés de moins de 40 ans en situation de recherche d’emploi, n’a d’autres effets que d’encourager les jeunes catégories à se désintéresser du travail, en les habituant à la rémunération sans efforts.
Au moment où la mécanisation demeure très peu développée, notamment pour les cultures maraichères, les exploitations agricoles expriment une forte dépendance de la main d’œuvre saisonnière pendant les périodes charnières de l’itinéraire cultural, mais, face à la pénurie en la matière, chaque agriculteur tente de trouver des solutions de rechange selon les moyens de bord dont il dispose.
C’est le cas de ce producteur d’ail de la région de Mila qui, dans une vidéo diffusée par la Chambre de l’agriculture de ladite wilaya, dit n’avoir trouvé que les migrants subsahariens pour récolter ses champs, qu’il paye au quintal récolté.
Aussi, les agriculteurs sont eux aussi de plus en plus nombreux à faire appel aux migrants subsahariens qu’ils jugent «travailler honnêtement et ne trichent pas pour gagner du temps à travers les sillons»,
Des spécialistes en sciences humains expliquent ce manque d’engouement pour le travail agricole par l’absence d’un cadre législatif qui puisse protéger les droits socioprofessionnels des ouvriers agricoles. A cet égard, ils citent entre autres, l’absence d’un système de sécurité sociale et d’assurance maladie, une rémunération peu attrayante et surtout l’absence de perspectives d’évolution de carrière pour le salarié.
Ainsi, dans un contexte où l’agriculture occupe une place stratégique dans la politique de développement économique du gouvernement, n’est-il pas temps de mettre en place un tissu juridique à même de donner plus de considération au travail agricole et autres mesures incitatives pour encourager les jeunes chômeurs à s’insérer dans le travail de la terre tout en protégeant leurs intérêts socioprofessionnels.
Ces problèmes de manque de main d’œuvre existe au Sud du pays, qui connait ces dernières années une explosion de parcelles exploitées, car région considérée comme le futur El Doradio de l’agriculture en Algérie.
Alors que les surfaces agricoles explosent la main-d’œuvre agricole, c’est près de 20% des emplois de la région.
Un constat amer pour des jeunes investisseurs qui se trouvent face à une situation à laquelle , ils ne s’y attendaient nullement. Une crise réelle qui a fait dire à Zoubir , nouvel agriculteur à Oued Souf qui ne cache pas son désarroi : « j ai contracté un prêt et investi beaucoup d ‘efforts dans mon exploitation, et voila que je me trouve face à un manque de personnel. Faudrait faire appel aux femmes de la famille comme de manière traditionnelle, comme au Maroc ou en Tunisie? C est ma première récolte de pommes de terre et je serai contraint d’avoir recours illégalement à la main d’œuvre subsaharienne que je ne peux déclarer, faute d ‘un permis du travail. Mais je ne peux me permettre de perdre ma récolte »
En raison de ce potentiel économique, la disponibilité de la ressource humaine et naturelle favorise l’investissement agricole, les autorités se doivent prendre en charge ce problème sans états d’âme et trouver des solutions.
Par A. R./Agence