Le Président de la république, en ordonnant la création d’une instance pour enquêter sur l’enrichissement des fonctionnaires publics, et le transfert des biens confisqués au secteur public marchand, veut asseoir d’une manière pérenne et définitive, la prévention et la lutte contre la corruption qui ont été renforcées en 2021, à travers plusieurs mesures et mécanismes consacrés dans le dernier amendement constitutionnel.
Par Réda Hadi
«Le Président de la République a décidé la création d’une nouvelle instance pour enquêter sur l’enrichissement des fonctionnaires publics, sans exclusive aucune, à travers des procédures légales rigoureuses pour la lutte contre la corruption et connaître l’origine de leurs avoirs», a indiqué un communiqué du Conseil des ministres, tombée dimanche soir. «Cette création intervient dans le cadre de l’organisation, de la composante et des prérogatives de la Haute autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption», ajoute la même source. De même que, lors de ce même Conseil des ministres, Tebboune a ordonné, d’achever l’opération de transfert des biens confisqués au secteur public marchand avant la fin du premier trimestre de 2022.
Si les choses semblent aller dans le bon sens, des observateurs relèvent que cette opération «Mani pulite» (mains propres), tant attendue par le peuple algérien «est dans un moment crucial». Pour le Président Tebboune, il s’agit, en fait, de redonner confiance au peuple afin dans ses institutions.
En effet, en plein remodelage de la scène politique, les autorités ont ouvert des enquêtes sur des faits de corruption. C‘est, d‘ailleurs, l’une des premières revendications du «Hirak». La lutte contre la corruption n‘est pas chose aisée dans un pays classé par le world justice Project (WJP), à la 82 place sur 139 pays. Des pays dit «développés» et plus aguerris à la « Res demoscratica», peinent toujours dans cette voie, à l‘instar de l’Italie par exemple. L’Algérie n‘est pas le seul pays à se lancer dans ce genre d’opération, et le semi échec de la révolution tunisienne est là pour rappeler aux initiateurs de ce mouvement, de la difficulté de la tâche.
La prudence est recommandée
Billel Aouali économiste est consultant mesure l’intensité des mesures édictées par le Président Tebboune et assure «qu’il s‘agisse de l’enrichissement illicite de fonctionnaires, ou de la réappropriation des biens, il faut prendre garde aux travers excessifs. A force de vouloir trop faire et vite, on peut aller vers des dérives. Chaque instruction allant dans le sens de la lutte anti-corruption devra être obligatoirement encadrée par la loi», nous dit-il
Et de préciser: «L’Algérie a, certes, ratifié en 2004 la convention de l’ONU en la matière. Elle a ensuite créé en 2006 un « Organe national de prévention et de lutte contre la corruption » (ONPLC), qui mène des actions de formation et de sensibilisation, ou, encore, rédige des rapports, mais beaucoup y voient une coquille vide. D’autres institutions ont, tout simplement, été dissoutes, tel « l’Office central de répression de la corruption » (OCRC), créé en 2010 et fermé fin 2018, pour être remplacé par un pôle financier annoncé en février 2019, qui n’est pas encore effectif. Du point de vue économique, la réussite de cette lutte, entraînera plus de crédibilité au niveau international et captera, ainsi, plus d’investissements».
Des avocats, avancent, quant à eux, «qu’il faut compiler les dossiers de corruption mais qu’ils ne devraient pas être traités maintenant. Il faut d’abord, changer toute la réglementation permissive qui la régit, sinon il y a un risque de politisation des affaires ciblées contre tel ou tel clan, et nous ne voulons pas d’une lutte contre la corruption sélective»
«Le chantier du Président en la matière est énorme» disent des observateurs et soulignent «que le travail vient d’être a peine entamé et que la bataille reste à gagner»
R. H.