La facture d’importation des produits alimentaires en Algérie dépassait les 10 milliards de dollars, en avril 2021. Par conséquent, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural, œuvre, en coordination avec le ministère du Commerce et de la Promotion des exportations, à la révision de la liste des produits agricoles importés. Une décision qui, pourtant, laisse dubitatifs bon nombre d’observateurs, pour qui les mesures protectionnistes ne peuvent avoir d’effets positifs, que si toute la chaîne de production est parfaitement maîtrisée en amont et en aval, avec une organisation logistique rodée.
Par Réda Hadi
Pour le ministre de l’Agriculture et du développement rural, Abdelhafidh Henni, la politique de développement du secteur s’appuie principalement sur l’encouragement de la production locale en la soutenant face au produit importé, dans la mesure où certaines filières agricoles ont besoin d’une protection, d’où la nécessité de revoir la liste des produits agricoles importés.
Des spécialistes de la question agricole, reconnaissent que cette décision est justifiée dans le fond, mais pas dans la forme. En effet, pour ces spécialistes, cette interdiction relève plus du «cadre politique qu’économique».
Un avis partagé par M. Radja Ahmed, ingénieur agronome et consultant à la FAO, pour qui «interdire l‘importation, peut être contreproductif». L‘expert explique, en effet, que «nous évoluons dans un marché globalisé, et les partenaires peuvent avoir recours aux mêmes rétorsions. Au lieu d’interdire, il faut jouer sur les taxes comme le font les Européens. Entre autres solutions, il faut choisir, par exemple, la période d‘interdiction pour favoriser la production locale.»
Dans cet ordre d‘idées, nous explique-t-il, la forme n‘y est pas dans le sens où, «avant d’interdire il faut savoir produire. Or, nos agriculteurs ne sont pas formés à l’excellence». De plus ajoute, M. Radja, « à quoi cela sert-il d‘interdire alors que certains importateurs ne maîtrisent pas la question, et ne veulent que tirer profit, en important des produits bas de gamme, et vendus comme préférentiels ?»
La question d‘interdire l‘importation de produits agricoles, pour des économistes, devrait être plus économique et pragmatique. A cela, M. Radja estime, que «si l‘environnement agricole était adéquat, la production nationale serait suffisante et de qualité. Nul besoin d’interdire quoi que ce soit alors. Nous sommes engagés avant tout, dans la sécurité alimentaire, et interdire l‘importation de certains produits ne résout pas la question»
Et si pour M. Henni, «la politique de développement du secteur s’appuie principalement sur l’encouragement de la production locale en la soutenant face au produit importé», elle reste pour M. Radja «assujettie à de véritables performances agricoles, mais pas que dans la quantité, mais surtout dans la qualité. Mais pour cela, il faut une vraie politique d‘encouragement, de la technicité, de la formation, et bien sûr, un environnement favorable»
R.H.