Le développement du gaz de schiste en partenariat entre Sonatrach et la société américaine Exxon Mobil : Opportunités et risques

2ème partie et fin

Par Abderrahmane MEBTOUL

Troisièmement, le gaz de schiste est concurrencé par d’autres énergies substituables et que les normes internationales donnent un coefficient de récupération moyen de 15/20% et exceptionnellement 30%, pouvant découvrir des milliers de gisements mais non rentables financièrement, les réserves se calculent selon le couple prix international des énergies et coût- Quatrièmement, il faut perforer des centaines de puits pour avoir 1 à 2 milliards de mètres cubes gazeux par an, plus de 1000 puits pour dépasser plusieurs dizaines de milliards de mètres cubes gazeux, chaque puits ayant un volume de production spécifique – Cinquièmement, la durée de vie d’un puits ne dépasse pas cinq années, devant se déplacer vers d’autres sites assistant à un perforage sur un espace déterminé comme un morceau de gruyère.

Sixièmement, pour s’aligner sur le prix de cession actuel, devant tenir compte de la profondeur pour la technique traditionnelle de la fracturation hydraulique, le coût n’est pas le même pour 600 mètres ou 2000/3000 mètres supposant le bétonnage.

Septièmement, l’exploitation de ce gaz, pour la fracturation hydraulique implique de prendre en compte la forte consommation d’eau douce, et en cas d’eau saumâtre, il faut des unités de dessalement extrêmement coûteuses, autant que les techniques de recyclage de l’eau Huitièmement, il s’agit de prévoir les effets nocifs sur l’environnement, (émission de gaz à effet de serre), la fracturation des roches pouvant conduire à un déséquilibre spatial et écologique.

Et en cas de non maîtrise technologique, elle peut infecter les nappes phréatiques au Sud, l’eau devenant impropre à la consommation avec des risques de maladies comme le cancer Neuvièmement, peu de pays excepté les USA, maîtrisent, cette technologie et donc un co-partenariat incluant des clauses restrictives avec d’importantes pénalités en cas de non-respect de l’environnement et la formation des Algériens pour tout opérateur étranger.

3- Afin d’éviter les effets négatifs de la fracturation hydraulique, l’Algérie doit, selon l’étude menée sous ma direction, négocier l’amélioration de la technique de la fracturation hydraulique et d’autres techniques maîtrisées seulement par les USA qui pourraient protéger l’environnement, économiser l’eau et les produits chimiques.

Aujourd’hui, pour récupérer le gaz de schiste, la technique utilisée est la fracturation hydraulique, consistant à injecter un fluide consistant d’environ 90% d’eau, 8 à 9,5% de « proppants » (sable ou billes de céramique) et 0,5 à 2% d’additifs chimiques – sous très haute pression. Au niveau, tant de la communauté scientifique que des opérateurs, l’objectif premier est d’améliorer la fracturation hydraulique.

Les recherches s’orientant sur la réduction de la consommation d’eau, le traitement des eaux de surface, l’empreinte au sol, ainsi que la gestion des risques sismiques induits.

Concernant le problème de l’eau qui constitue l’enjeu géostratégique fondamental du XXIème siècle (l’or bleu), selon les experts, trois types de fluides peuvent être utilisés à la place de l’eau : le gaz de pétrole liquéfié (GPL), essentiellement du propane, les mousses (foams) d’azote (N2) ou de dioxyde de carbone (CO2) et l’azote ou le dioxyde de carbone liquides. L’utilisation des gaz liquides permet de se passer complètement ou en grande partie d’eau et d’additifs.

Pour les mousses, par exemple la réduction est de 80 % du volume d’eau nécessaire étant gélifiées à l’aide de dérivés de la gomme de Guar.

Ainsi sans être exhaustif, du fait de larges mouvements écologiques à travers le monde, des alternatives à la fracturation hydraulique sont encore à un stade expérimental et demandent à être plus largement testées, l’objectif étant de minimiser l’impact environnemental de la fracturation hydraulique tant pour les volumes traités que pour la qualité des eaux et de diminuer significativement la consommation d’eau et/ou d’augmenter la production de gaz.

La fracturation au gel de propane est en cours d’utilisation sur environ 400 puits au Canada et aux États Unis (plus de 1.000 fracturations déjà effectuées).

L’eau pourrait aussi être remplacée par du propane pur (non-inflammable), ce qui permettrait d’éliminer l’utilisation de produits chimiques. Les premiers puits utilisant cette méthode ont été fracturés avec succès en décembre 2012 aux États-Unis.

Nous avons la fracturation exothermique non-hydraulique (ou fracturation sèche) qui injecte de l’hélium liquide, des oxydes de métaux et des pierres ponce dans le puits, la fracturation à gaz pur peu nocive pour l’environnement surtout utilisée dans des formations de roche qui sont sensibles à l’eau à maximum 1500 m de profondeur ; la fracturation pneumatique qui injecte de l’air comprimé dans la roche-mère pour la désintégrer par ondes de chocs, n’utilisant pas d’eau, remplacée par l’air mais utilisant certains produits chimiques en nombre restreints ; enfin la stimulation par arc électrique (ou la fracturation hydroélectrique) qui libère le gaz en provoquant des microfissures dans la roche par ondes acoustiques, utilisant selon les experts pas ou très peu d’ eau, ni proppants ou produits chimiques, mais nécessitant beaucoup d’électricité.

Selon certains experts, à l’horizon entre 2027/2030 2030/2040, l’hydrogène vert, bleu et blanc souvent oublié est une piste sérieuse enrichissant le « mix » ou le bouquet énergétique mondial, pour le transport et le stockage des énergies intermittentes et pourrait aussi permettre de produire directement de l’énergie tout en protégeant l’environnement. L’hydrogène en brûlant dans l’air n’émettant aucun polluant et ne produisant que de l’eau.

Des études internationales à partir de tests expérimentaux montre qu’un (1) kg d’hydrogène libère environ trois fois plus d’énergie qu’un (1) kg d’essence, mais que pour produire autant d’énergie qu’un litre d’essence, il faut 4,6 litres d’hydrogène comprimé à 700 bars (700 fois la pression atmosphérique).

Cette étude rappelle également qu’il suffit d’un kilo de d’hydrogène (H2), stocké sous pression, (représentant un coût d’environ huit euros) pour effectuer une centaine de kilomètres dans un véhicule équipé d’une pile à combustible.

A terme, avec le développement conjoint des véhicules à hydrogène et des piles à combustible destinées aux bâtiments et logements, on peut tout à fait imaginer le développement d’un réseau de production et de distribution transversale et décentralisée d’énergie.

Dans ce schéma, organisé à partir de réseaux intelligents « en grille », les immeubles de bureaux et les habitations produisaient ou stockaient leur chaleur et leur électricité sous forme d’hydrogène et pourraient également alimenter en partie le parc grandissant de véhicules à hydrogène.

Mais ce concept fonctionnerait également dans l’autre sens et les voitures à hydrogène, lorsqu’elles ne seraient pas en circulation, deviendraient autant de microcentrales de production d’énergie qui pourraient à leur tour contribuer à l’alimentation électrique des bâtiments et logements.

En résumé, il faut éviter des dé- bats stériles sur un sujet très sensible en clarifiant le rôle des institutions et seul le conseil national de l’Energie sous la haute autorité du président de la république est habilité à tracer la politique énergétique future du pays.

L’objectif stratégique du développement du gaz de schiste est de l’insérer dans le cadre de la transition énergétique reposant sur un mix énergétique, développement des hydrocarbures traditionnels, efficacité énergétique pour des économies d’énergie, développement des énergies renouvelables dont le solaire (3000 heures en Algérie) et l’hydrogène, pouvant être une opportunité mais devant évaluer les risques.

Mais attention devant éviter toute utopie : le développement de l‘Algérie doit reposer non sur une rente éphémère, dont le prix échappe aux décisions internes, mais sur une économie diversifiée compétitive, s’adaptant aux nouvelles mutations technologiques mondiales, devant reposer sur une bonne gouvernance et la valorisation du savoir.

A. M.

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