Troisième partie
Si l’Algérie avait su tirer profit de ses potentialités naturelles, le tourisme aurait été sa plus grande chance ! Encore plus porteuse que le pétrole, l’agriculture ou l’industrie. Fausse ou vraie, cette affirmation mérite aujourd’hui réflexion et étude.
Par Boubekeur Abid,
Expert et Ex-Cadre du Tourisme
1- Le potentiel de l’industrie touristique algérienne
Selon l’organisation britannique «British Backpacker Society» (BBS), leader dans le tourisme d’aventure, «l’Algérie posséderait le meilleur potentiel en termes de tourisme d’aventure qui pourrait la propulser comme première destination mondiale pour partir en voyage d’aventure. Eu égard aux attractions manifestes du pays en termes de voyage d’aventure et au nombre extrêmement faible de voyageurs visitant l’Algérie aujourd’hui, le potentiel de l’industrie touristique Algérienne est inégalé en ce moment».
La B.B.S qui regroupe plusieurs experts dans le tourisme d’aventure dans le monde, souligne qu’avec : «Des politiques gouvernementales astucieuses favorables au tourisme et une campagne internationale de marketing efficace, l’industrie touristique Algérienne pourrait vraiment enregistrer des records mondiaux de croissance pour les dix prochaines années».
La B.B.S évoque un pays «béni» par des paysages désertiques époustouflants, des gens hospitaliers, des ruines antiques mais aussi par une proximité géographique de l’Europe, qui regroupe les plus importantes communautés de touristes, adeptes du voyage d’aventure.
L’Algérie a longtemps été l’une de mes destinations de voyage préférées. Il est formidable de voir les membres de B.B.S voter cette année pour donner à l’industrie touristique du pays la reconnaissance qu’elle mérite», déclare Samuel Joynson FRGS, Président de B.B.S.
«L’ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit.» Aristote.
Les touristes du monde entier seraient ravis de visiter tous ces paysages naturels exceptionnels et ces lieux historiques uniques au Monde. A nous de créer les conditions pour les accueillir et tirer profit de ces richesses naturelles, historiques et culturelles. C’est une manne pour l’état, les investisseurs et l’emploi des jeunes. Cela peut aussi contribuer à améliorer la qualité de vie de nos concitoyens sur l’ensemble du Pays.
En effet, une dynamique de développement de ce secteur prometteur pour la stratégie de diversification est perceptible. On le voit à travers les efforts de modernisation engagés par l’État pour moderniser ces structures touristiques publiques à travers le territoire.
Ces efforts conjugués au développement de l’infrastructure aéroportuaire, à l’ouverture de nouvelles lignes aériennes internationales, au développement du réseau routier et des lignes maritimes avec l’Europe, sont de nature à permettre à l’Algérie de progresser dans la mise en place des conditions favorables à l’accueil de touristes.
Mais il faut savoir que le développement de ce secteur est tributaire d’une offre compétitive, en terme de rapport qualité / prix. Les décideurs doivent ainsi améliorer la qualité de service et avoir des prix attractifs comparables à ceux offerts par nos voisins. Cela permettra même le développement du tourisme interne et on verra, des habitants de l’ouest visiter l’Est Algérien et vice-versa, ceux du Nord visiter le Sud et vice-versa.
Toutes ces actions s’inscrivent dans le cadre d’élargir le marché du tourisme, qui ne sera plus cantonné à la saison estivale. Un vrai gisement d’emplois s’ouvrira alors pour nos jeunes et des recettes fiscales pour nos régions et territoires.
Il va sans dire qu’il y a un gros travail sur les mentalités et les comportements en interne, pour accepter l’idée de l’ouverture aux touristes étrangers et améliorer la qualité de service, et à l’international pour promouvoir la destination Algérie. A titre d’exemple, les jeux méditerranéens 2021 prévus à Oran sont une excellente opportunité pour ça. Saisissons-là ! Il est donc indispensable d’adopter les méthodes managériales modernes et les nouvelles technologies qui sont à même d’aider à bénéficier pleinement de ce gisement économique.
2. Promouvoir le tourisme en Algérie
Aujourd’hui, l’Algérie est un des pays les plus fermés du bassin méditerranéen ,des millions d’Algériens qui partent chaque année en villégiature vers de nouveau horizons géographiques, et même des destinations extrêmes pour respirer, décompresser, voir d’autres paysages, d’autres visages. La Tunisie reste en tête des destinations des Algériens à cause du rapport Proximité/Qualité/Prix.
Pourtant une bonne partie de ces Algériens, qui vont flamber leurs économies ailleurs auraient certainement voulu rester en Algérie. Mais avec des chambres d’hôtel hors de prix, des prestations où la qualité est la grande absente, c’est un pari juste impossible. C’est que les responsables Algériens, dans leurs ignorance, imaginent qu’il suffit d’avoir des Hilton, Sheraton, Marriott, Mercure et autres enseignes étoilées pour faire du tourisme !
Le tourisme, c’est une culture, c’est un savoir-faire que l’Algérie a laissé se perdre au fil des années. Au point d’être actuellement un des pays les plus fermés du monde avec notre voisin libyen et la Corée du Nord. Même Cuba, coupé du monde pendant les décennies du castrisme révolutionnaire ouvre portes et fenêtres pour faire valoir les infinies richesses artistiques, balnéaires, culinaire de l’ile sur laquelle souffle une brise de fraicheur et liberté.
L’Algérie est le pays méditerranéen dont l’activité touristique est la plus faible, c’est en substance le constat des différents experts et organismes nationaux et internationaux. En Algérie, la politique en matière de développement de l’activité touristique est restée en décalage par rapport aux pays voisins de la rive sud de la méditerranée, malgré les fortes potentialités naturelles et patrimoniales des différentes régions Algériennes.
La nouvelle donne économique va conforter à notre avis, la place du secteur du tourisme comme un vecteur essentiel de développement stratégique et prioritaire pouvant être une alternative à la dépendance aux hydrocarbures. Le nouveau discours des pouvoirs publics de promouvoir désormais le tourisme peut augurer de perspectives intéressantes pour un secteur pourvoyeur de richesses, de valeur ajoutée, de plus-values économiques, d’emplois et une stabilité pour notre pays.
Le tourisme balnéaire
Le tourisme balnéaire joue un rôle fondamental dans le développement économique des pays des deux rives du bassin méditerranéen. Climat tempéré, plages sablonneuses et beauté du paysage naturel côtier représentent le support à cette nouvelle activité. Si dans beaucoup de pays, comme l’Espagne, le Maroc, la Tunisie, la France, l’Italie, une large surface du littoral est mise en tourisme, les aménagements touristiques restent en Algérie très ponctuels et en décalage avec la demande réelle de la population interne et des étrangers.
La volonté de faire du tourisme balnéaire une activité génératrice de richesse dans l’objectif d’atténuer la dépendance de l’économie au secteur des hydrocarbures, rencontre beaucoup de difficultés telles la question des enjeux fonciers et les dysfonctionnements entre les outils d’aménagement et ceux de protection de la nature. L’entretien des infrastructures existantes et le nettoyage des plages est encore une affaire de saison.
Aux nombreuses lacunes connues, on n’omet pas d’évoquer l’éternel casse-tête de l’encombrement de la circulation, l’aménagement des parkings pour éviter leur squat et le comportement incivique des citoyens, peu enclins à s’intéresser à la chose touristique.
Le littoral a été tout le temps un espace convoité, la concurrence sur l’appropriation de son foncier et l’exploitation de ses ressources menacent l’équilibre de ses écosystèmes. La valorisation de ses potentialités pour le développement de l’activité touristique balnéaire s’est faite dans le cadre d’une vision socio-économique sans prendre en charge la question paysagère ou environnementale.
La prise en charge de l’élément naturel dans l’aménagement touristique n’a commencé que vers le début des années 2000, mais la mise en œuvre des recommandations formulées par les différents instruments reste difficile. La faiblesse des outils de protection face aux décisions centralisées pour occuper le littoral et la faible conscience de la part des gestionnaires locaux à l’égard de la fragilité des écosystèmes côtiers rendent difficile une mise en tourisme intégré et durable de l’espace littoral.
Les pouvoirs publics doivent favoriser activement un développement du tourisme porteur de bénéfices économiques, mais aussi d’avantages d’ordre plus général pour les territoires, les populations locales, les entreprises, les employés et les visiteurs.
Il est donc nécessaire d’assurer l’accès à la formation et l’intégration de la population locale à la chaîne de valeur touristique, de façon à exploiter de nouveaux créneaux économiques porteurs pour le développement régional. Il est donc nécessaire de mener une réflexion stratégique, d’adopter de nouveaux textes et d’agir en vue de maximiser les possibilités qu’offre le secteur dans son ensemble. Les pouvoirs publics ont un rôle important à jouer dans la mise en place des conditions idoines pour que toutes les intervenants prennent part à la transformation de fond en comble de ce secteur stratégique.
Les villes balnéaires
L’objectif est, à travers le cas d’un littoral, et d’analyser l’évolution des dispositions institutionnelles en matière du tourisme balnéaire et de leurs mises en œuvre sur le terrain toute en analysant les spécificités du contexte socioéconomique et naturel à une échelle locale.
Les touristes appartiennent à des classes moyennes, ce sont généralement des fonctionnaires, des commerçants, des artisans ou de jeunes étudiants. Pour ces usagers de la côte, deux catégories sont à distinguer : ceux originaires de la même région littorale, et des régions limitrophes, qui viennent à la plage pour la journée, et ceux originaires de régions plus lointaines, comme les wilayas de Sud, qui parcourent parfois plus de mille kilomètres. Ces derniers optent souvent pour une location chez l’habitant, un phénomène qui prend de l’ampleur ces dernières années, répond au déficit de structures d’accueil et au coût élevé des locations au niveau des hôtels.
À l’image des villes côtières, la demande de nouvelles surfaces à urbaniser a commencé à atteindre des niveaux élevés dès les années 1980. En l’absence d’instruments de protection des littoraux, le Plan Directeur de l’Aménagement et de l’Urbanisme (PDAU 1990) d’une ville côtière prévoit une extension du tissu urbain sur la partie côtière, sur les formations dunaires le cas échéant, des programmes engagés sur les sites sont composés de logements sociaux, d’habitats promotionnels et d’auto constructions, le reste de l’occupation du sol regroupe des équipements de proximité et des espaces verts ou de loisirs.
Un exemple, qui ne connait pas la corniche Djidjillienne, en effet dans la wilaya de Jijel, le secteur touristique est plus que jamais otage des projets qui ne se concrétisent pas. Depuis de longues années, on ne cesse d’évoquer l’imminence du lancement de tel ou tel opération, sans qu’aucune nouvelle infrastructure, n’arrive à voir le jour.
Et pourtant, Jijel est de plus en plus considérée comme l’une des meilleures destinations touristiques du nord du pays. La vocation balnéaire de la région, la beauté de ses sites, ses plages dorées, ses parcs naturels et ses grottes, restent la seule et unique attraction des visiteurs. Célèbre par sa corniche, réputée l’une des plus belles, Jijel demeure, comble du paradoxe, encore loin de bénéficier de la réalisation d’infrastructures, qui lui ouvrent la voie pour s’ériger en un pôle touristique de choix.
Le tourisme saharien
L’Algérie Saharienne, à la reconquête de son passé d’antan, elle doit reconquérir sa place. Les différents acteurs doivent agir pour redonner au tourisme saharien la place qui est la sienne. Les investissements doivent être encouragés dans ces localités lointaines et isolées, à travers l’assouplissement des procédures administratives susceptibles de permettre la création de véritables unités hôtelières, villages et autres campings touristiques.
Les représentants d’agences de voyages du sud ont toujours posés, le problème de la délivrance des visas, auprès des sections consulaires des ambassades d’Algérie en Europe. Chaque année, l’association programme des groupes en provenance de l’Europe, mais lorsque les touristes demandent les visas d’entrée en Algérie, ils sont bloqués. Un programme varié doit être élaboré entre les différents opérateurs pour privilégier le tourisme saharien.
Le sud de notre pays offre des sites aussi variés qu’uniques dans leur genre : TIMIMOUN, DJANET et la région du Tassili, TAMANRASSET et la région du Hoggar, EL OUED, GHARDAIA et le M’Zab, pour ne citer que ceux-là constituent des destinations touristiques exceptionnelles que beaucoup de pays nous envient.
3. Quelques réalités & vérités amères a dire !
Baie de Chetaïbi : Triste sort pour celle qui fut l’une des plus belles au monde
De la première, pendant des années, à la 8ème en 2007, puis à la dernière place mondiale pour disparaître totalement, la Baie de Chetaïbi où la situerait-on de l’autre côté de la Méditerranée ? On ne le sait plus. Parce que l’on pouvait s’en passer, la participation Algérienne à l’opération marketing mondiale de classement et de reclassement des plus belles baies de la planète relève désormais de la vieille histoire.
De tout temps classée «la plus belle au monde», la baie de Tekkouche, depuis la nuit des temps, Herbillon sous l’occupation française et Chetaïbi après l’indépendance, n’existe plus pour les membres du Club des plus belles baies mondiales (CBM). La dernière fois qu’ils en avaient entendu parler c’était en 2007 lorsqu’ils s’étaient réunis à Paris. Le représentant de notre ministère du Tourisme de l’époque, qui devait fournir au CBM des données réactualisées sur la baie de Chetaïbi et faire connaître les atouts de cette merveille naturelle où se confondent mer, forêt et montagne avec comme décor une façade maritime étalée sur plus de 5 km, était absent , faisant l’impasse sur la réunion parisienne, sa mission principale.
Cela s’était passé au moment même où du côté des dirigeants du Tourisme national on s’enorgueillissait des «efforts» déployés en vue de stimuler le secteur à travers la multiplication des opérations de marketing à l’international, l’amélioration de l’image, l’insertion de la «Destination Algérie» dans les circuits touristiques internationaux et l’augmentation des flux et la diversification des recettes en devises.
Ainsi, la baie de Chetaïbi, incluse sur la liste du CBM en octobre 2005, lors d’une assemblée en Turquie, n’intéresse plus personne. Et ce, bien qu’une ressortissante Algérienne, native de Chetaïbi et établie à Paris, ait tenu, en l’absence de l’envoyé spéciale du ministère, à défendre, la demande d’adhésion auprès du club. Ce dernier compte aujourd’hui une trentaine de pays membres d’Europe, d’Amérique, d’Asie et d’Afrique. Le CBM, faut-il le souligner, est très influent au sein des tours opérateurs et des animateurs du tourisme mondial.
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