Huitième partie
On pense pouvoir relancer le tourisme par des recommandations intéressantes sur papier, mais malheureusement elles atterrissent au fond des tiroirs. Une destination touristique se construit dans la durée, avec du concret et non avec des mots et des décrets.
Par Boubekeur Abid,
Expert et Ex-Cadre du Tourisme
1. RENCONTRE INTERNATIONALE SUR LA THERMALISME ET LA THALASSOTHERAPIE
Par ailleurs, une rencontre internationale sur le Thermalisme et la thalassothérapie, s’est tenue à l’Hôtel Sofitel le 18 Février 2019 organisé par le Groupe HTT.
Atelier N°1 : protection et valorisation du potentiel thermal.
Les travaux de cet atelier ont porté sur la protection et la valorisation de la ressource thermale. Le débat a fait ressortir les recommandations suivantes:
• Définir le périmètre de protection rapproché pour les sources thermales d’importance nationale à travers la réalisation des études hydrogéologiques et les plans d’aménagement.
• Améliorer l’environnement immédiat des établissements thermaux.
• Réguler et rationaliser l’utilisation de l’eau thermale.
• Régler le problème lié au payement de la redevance de relative à l’utilisation de l’eau thermale.
• Imputer sur les taxes un taux dédié au marketing et à la communication sur le thermalisme.
• Echange d’expériences avec les pays leaders dans le domaine thermal.
• Prise en charge immédiate des sources thermales en voie de dégradation.
• Harmoniser les tarifs des cures médicalisées.
• Créer une plateforme internet dédiée à l’investissement dans le domaine thermal.
• Compléter le plan de développement par la mise en place de mécanismes relatifs à la de rationalisation, la préservation et la récupération de l’eau thermale.
• La rationalisation de l’utilisation de l’eau thermale à travers la dotation des établissements thermaux d’eau douce dans les structures d’hébergement et les services annexes.
• Dégager des assiettes foncières au niveau des wilayas côtières pour abriter des projets de centres de thalassothérapie, comme les plages inaccessible à la baignade.
• Combiner entre le produit thermal et le climatique.
• Faciliter les mécanismes de financement pour les produits touristiques à vocation thermale.
• Mettre en place un mécanisme local de coordination entre secteurs pour le développement du tourisme thermal.
• Donner les bains traditionnels en concession à des investisseurs professionnels.
• Créer une fédération nationale des acteurs dans le domaine du thermalisme.
Atelier n°2: Développement et normalisation des pratiques thermales dans les stations thermales et les centres de thalassothérapie.
Lors de cet atelier il a été débattu les axes suivants:
Modernisation des infrastructures thermales et bains traditionnels,
Développement des pratiques thermales: définition, normalisation et valorisation,
Définition de la nomenclature des métiers et professions du thermalisme,
Formation des personnels exerçant dans les stations thermales et les centres de thalassothérapie,
Promotion du produit thermal.
Il est ressorti les recommandations suivantes:
Concernant la modernisation des stations thermales:
• Adopter une démarche Qualité pour l’accompagnement du programme de modernisation des établissements thermaux à travers la normalisation aux standards internationaux de toute la chaine thermale depuis le processus de captage de l’eau thermale jusqu’à l’exercice de la pratique thermale, dans des infrastructures conformément aux normes internationales de qualité.
• Adopter le guide de bonnes pratiques thermales: action à concrétiser avec le secteur chargé de la santé.
Concernant les modalités d’exploitation des sources thermales entre le thermalisme et le tourisme de bien être:
• Permettre l’utilisation des eaux thermales pour la filière du bien-être, des loisirs et de détente avec une optimisation et une rationalisation de l’eau thermale ;
• Intégration des modules liés au thermalisme et à la thalassothérapie dans les programmes de formation des écoles sous tutelle, de la formation professionnelle et au niveau de l’université.
Normalisation des pratiques thermales dans les établissements thermaux:
• Procéder à la codification des pratiques liées au thermalisme, à la thalassothérapie et au tourisme de bien être à travers la réalisation d’un référentiel des pratiques: action à concrétiser avec les secteurs chargés de la santé, de la formation professionnelle et de l’enseignement supérieur ;
• Promouvoir l’investissement hôtelier autour des établissements thermaux en vue d’augmenter la capacité en lits pour cette filière touristique ;
• Renforcer la réglementation en vigueur liée aux pratiques thermales par l’introduction au niveau des unités thermales et de la thalassothérapie de nouvelles pratiques relatives au tourisme de bien être, de loisirs, d’animation et de détente.
Valorisation des établissements thermaux:
• Classement des établissements thermaux par typologie selon les vertus curatives et thérapeutiques des eaux thermales dispensées ainsi que les infrastructures réalisés ;
• Actualisation de la nomenclature des métiers et professions liés au thermalisme, à la thalassothérapie et au bien-être et l’identification de nouveaux métiers dans les domaines des soins thermaux et du bien-être ;
• Elaboration de référentiels de compétence et de validation des acquis professionnels pour les métiers du thermalisme, de la thalassothérapie, et du tourisme de bien être ;
• Normalisation des pratiques de cures thermales de manière à les uniformiser au niveau de tous les établissements thermaux ;
• Elaboration et mise en œuvre des plans de formation professionnelle dans le cadre des conventions cadre entre les Ministères chargés du tourisme, de la santé et de la formation professionnelle ;
• Intégration d’un module sur les pratiques thermales dans les programmes de formation des écoles sous tutelle et ceux de la formation professionnelle ;
• Valorisation des bains traditionnels à travers la régulation de l’ensemble des pratiques et conditions d’exploitation des bains traditionnels ;
• Définir les pratiques pour chaque établissement thermal en fonction de la minéralité et de la qualité physico-chimique des eaux thermales.
Promotion de l’activité thermale :
• Mettre en place un mécanisme de prospective visant à déterminer des indicateurs de performance pour cerner les caractéristiques de la clientèle fréquentant les établissements thermaux.
• Mettre en place une plateforme Internet dédiée à l’activité thermale (potentialités, localisation des établissements thermaux, vertus thérapeutiques…) ;
• Utilisation des technologies de l’information et de la communication dans la gestion et l’exploitation des établissements thermaux (réservation, programmation des cures…) ;
• Implication davantage des agences de tourisme et de voyages dans la promotion et la valorisation des stations thermales et centres de thalassothérapie.
Enfin Messieurs, depuis deux décennies à travers ses rencontres et ses assises ou tout a été dit ou presque dit, les responsables qui se sont succédé à la tête du ministère du Tourisme ne cessent de réaffirmer la volonté des pouvoirs publics de relancer le secteur pour le développement et la diversification d’une économie trop dépendante des hydrocarbures.
Mais, dans le secteur, les professionnels croient de moins en moins à ce genre de discours, pour eux l’Algérie est pratiquement inexistante sur la carte touristique mondiale aujourd’hui.
On pense pouvoir relancer le tourisme par des recommandations intéressantes sur papier, mais malheureusement elles atterrissent au fond des tiroirs. Une destination touristique se construit dans la durée avec du concret et non avec des mots et des décrets.
La planification du tourisme, reconnue à travers le monde comme partie intégrante de l’économie d’un pays ou d’une région, doit s’effectuer dans le cadre de tous les autres secteurs de la vie économique et socioculturelle du pays, ou de la région considérée et en parfaite coordination avec ces secteurs et ces régions.
Le bien-être d’une nation constitue une référence en son genre pour les professionnels du développement et de la politique de planification, pour les étudiants comme pour les chercheurs qui s’intéressent aux questions d’environnement, de développement Touristique, de politique publique ou de gestion des ressources.
En attendant un éveil salutaire et une véritable prise de conscience, de nombreux problèmes continuent à ronger le secteur.
2. CONCLUSION
Depuis une dizaine d’années, et sur les recommandations des différentes assises tenues en Algérie, l’Etat a encouragé le secteur privé à investir dans l’hôtellerie et le tourisme pour combler le déficit hôtelier de notre pays par l’octroi aux investisseurs d’avantages financiers et parfois par l’attribution d’assiettes foncières relevant du domaine privé de l’Etat.
Dans le même temps, les groupes hôteliers publics ont accéléré leur programme de rénovation et de réalisation de nouveaux hôtels haut de gamme. Ceci sans qu’il y ait, une planification préalable pour équilibrer l’offre et la demande hôtelières. On comprend bien les raisons de cette politique volontariste du fait que notre pays a manqué cruellement de capacités hôtelières tant en quantité qu’en qualité depuis notre indépendance.
Mais cette évolution récente a engendré un déséquilibre du marché hôtelier, principalement dans les plus grandes villes du pays, un déséquilibre qui a affecté la viabilité et la rentabilité des investissements non seulement privés mais aussi publics. Cette situation où l’excédent de l’offre hôtelière devient préoccupant et où les secteurs public et privé se livrent à une concurrence déloyale.
Si le préjudice subi par le secteur public du fait de cette situation peut être géré et accompagné par l’Etat, il n’en est pas de même pour le secteur privé qui risque d’être découragé et mis en situation de difficulté. Si on peut regretter aujourd’hui une telle situation, il convient à l’avenir et dans l’intérêt général d’agir autrement.
A notre avis, pour y remédier, le rôle de l’Etat doit consister non seulement à satisfaire les besoins du marché, mais aussi à réguler et pérenniser les investissements consentis, pour cela, il faut:
Fixer les grandes orientations, les grandes impulsions, car on ne peut pas s’occuper de tout.
Avoir le souci de la proximité avec tous les investisseurs et intervenants qui ont à cœur de promouvoir le tourisme Algérien, de lui faire rattraper son retard.
Veiller à la mise en œuvre des projets dans une optique de cohérence, de faisabilité technique et économique vérifiée et de durabilité.
S’assurer de la bonne planification et de la bonne articulation des actions dans la durée et l’espace.
Associer au ministère du Tourisme, un ministère de la Culture fort de ses compétences et de son budget, un ministère de la Communication percutant et un ministère des Collectivités locales géré par des experts ; il lui faut aussi, en appoint, un secteur bancaire réformé, affranchi de ses carcans et des partenaires privés nationaux ou étrangers mus par l’esprit gagnant-gagnant.
Engager une réflexion à tous les niveaux, avec tous les opérateurs concernés, pour dégager une véritable politique touristique bien pensée, bien structurée et bien projetée qui reposerait surtout sur une implication fiable, convaincue et convaincante.
Donner la priorité au tourisme interne; en commençant déjà par réhabiliter les plages interdites à la baignade pour cause de pollution pour qu’elles soient traitées selon les normes requises et mises à la disposition des vacanciers.
Livrer bataille aux gardiens de parkings qui font la loi ainsi que les «gros bras» qui sont les maîtres des plages où la baignade est autorisée et dont l’accès, selon les pouvoirs publics, était censé gratuit.
Examiner toutes les propositions, d’où qu’elles viennent, à même d’augmenter les capacités d’accueil des infrastructures hôtelières.
Militer pour la réduction des tarifs des billets d’avion du réseau intérieur, même si la compagnie nationale Air-Algérie a réduit de moitié ses tarifs à destination du sud .
Se rapprocher également du ministre des affaires étrangères pour l’allégement de l’octroi des visas aux étrangers désirant visiter notre pays.
Avoir à cœur de relancer le tourisme saharien de l’extrême Sud en organisant des circuits d’expédition en véhicules tout-terrain, et le tourisme itinérant en autobus, à travers la boucle des Oasis et celle de la Saoura.
Soutenir la réduction de la TVA sur les prestations liées aux activités touristiques, car cette mesure permettra aux hôteliers et aux restaurateurs de réduire les prix de leurs prestations et d’attirer le maximum des clients nationaux, y compris ceux qui ont fait de la Tunisie leur destination annuelle.
Faire en sorte que la formation de la ressource humaine soit une priorité.
S’engager à sauver l’artisanat, protéger le patrimoine archéologique, rendre nos villes plus attrayantes, conserver une politique de loisirs, améliorer nos transports, renforcer la sécurité partout, promouvoir la gastronomie et l’habit traditionnel algérien, mettre le wifi partout.
Livrer une lutte sans merci à la bureaucratie, celle-là même qui empêche l’exploitation des zones d’exploitation touristiques (Z.E.T.).
Débarrasser le secteur de tous ceux qui font fuir les investisseurs, lassés d’être rackettés par des responsables beaucoup plus soucieux de leur avenir que de celui du tourisme national.
Engager une réflexion pour la participation aux salons internationaux en termes de marketing pour nos produits phares «saharien, balnéaire & thermal» et cibler la communauté de pieds-noirs, avides de visiter l’Algérie avant de retrouver l’éternel.
Le développement urbain et l’assainissement des villes, dans leur majorité, souffrent d’une mauvaise image liée à un faible assainissement qu’on doit prendre en charge.
Par ailleurs, les loisirs de proximité sont rares. Un programme de développement urbain priorisant l’assainissement permettrait d’améliorer l’attractivité des villes.
Pour ce qui de nos Recommandations pour le Thermalisme, on pourra ajouter la stratégie et le recentrage sur les métiers de base du thermalisme, ou en tout cas, à la diversification à l’intérieur du thermalisme. Il faudra sans doute:
Adopter une approche innovante en matière de besoins/services, prenant en compte les mutations des marchés, le nouvel environnement économique et social, du secteur, et s’appuyant sur une vision prospective des modes de mise en marché, avec le rôle prééminent d’internet, et du E-thermalisme.
Profiter d’un atout unique des stations thermales, avec la concentration du personnel médical et paramédical, et le savoir-faire reconnu dans l’accueil des seniors (la clientèle thermale est en majorité âgée de plus de 65 ans).
Réactualiser et réaffirmer le rôle préventif et d’éducation sanitaire des stations thermales, et développer des services innovants à distance, et tout au long de l’année;
Enfin, privilégier un nouveau modèle de développement en phase avec les évolutions démographiques, et notamment le vieillissement de la population, et concevoir de nouvelles offres d’immobilier et d’hébergement en phase avec les attentes/handicaps/contraintes des seniors: accessibilité, ergonomie, services etc., et intégrant les nouveaux services d’aide à la personne âgée.
Lire la suite dans notre prochaine édition.
