L’Algérie va-t-elle exploiter les énergies non conventionnelles, notamment le gaz du schiste? C’est une question cruciale qui refait surface, notamment, durant cette conjoncture marquée par des bouleversements géopolitiques alimentés par la crise entre l’Ukraine et la Russie.
Par Akrem R.
Une éventuelle rupture du gaz russe mettrait en péril le Vieux continent, notamment l’Allemagne, dépendant de 56% du gaz russe. D’ailleurs, le chancelier allemand, Olaf Scholz, a déclaré publiquement que son pays est appelé à y trouver d’autres alternatives. Selon des échos médiatiques, l’Algérie avait été déjà sollicitée pour augmenter ses d’exportations vers l’Europe.
Toutefois, les capacités de production actuelles ne le permettent pas. À cet effet, l’Algérie avec ses partenaires doivent consentir des investissements colossaux pour le développement des nouveaux gisements existants, dont l’exploitation du gaz du schiste. Une solution préconisée par l’ex-vice-président du groupe Sonatrach, Ali Hached. Pour lui, il est plus que vital pour notre pays de recourir à l’exploitation des réserves non conventionnelles du gaz naturel. Cette solution s’impose avec acuité, surtout avec le retard accusé dans le lancement du programme des EnR et l’augmentation de la consommation interne en gaz, avec un taux de croissance de 8 à 10%, annuellement.
Les EnR tardent à se développer
« Les réserves existantes vont rapidement décliné, surtout avec le rythme de croissance de consommation actuelle. Les sources alternatives existent mais tardent à se concrétiser sur le terrain. Ainsi, le problème des 1000 MW ne va économiser qu’entre 300 à 400 millions de M3. Et vous pensez que ces quantités vont régler le problème? Même si le programme des 15 000 MW était réalisé, seulement 4 à 5 milliards de M3 seront économisés, soit l’augmentation de la consommation de deux années», a précisé Ali Hached, hier, lors de son passage sur les ondes de la radio nationale, « Chaîne III».
En clair, si l’Algérie veut devenir un acteur majeur sur le marché mondial gazier, « elle doit absolument mettre le paquet pour le développement et l’exploitation du gaz du schiste».
« À long terme, si vraiment on met le paquet sur le développement de nos réserves, elles pourraient rapidement et en quelque années, produire des quantités supplémentaires (une dizaine de milliards de m3) à mettre sur le marché. On peut facilement revenir à nos niveaux d’exportation de 2000 qui étaient de 65 milliards de m3. C’est à travers l’exploitation du gaz du schiste qu’on pourra prolonger la vie de nos réserves gazières», détaille-t-il.
il est à rappeler que le PDG de Sonatrach, Toufik Hakkar, avait déclaré que les réserves de gaz non conventionnel de l’Algérie couvrent l’équivalent de 150 ans de consommation actuelle, soit près de 20 000 milliards de M3.
Pas de contraintes majeures sur l’environnement
Pour illustrer ses propos, l’ex-vice président de la Sonatrach a cité l’exemple des Etats-Unis qui viennent de devenir le premier producteur mondial du gaz, en produisant l’équivalent de 700 milliards M3 en gaz naturel et de schiste et qui se vend partout dans le monde. « Le gaz de schiste ne fait peur à personne. On doit démarrer le programme de l’exploitation des énergies non conventionnelles», a-t-il lancé. Il est à noter qu’en 2014, l’Algérie s’est lancée dans l’exploitation d’un premier puits à In Saleh, mais le gouvernement était contraint de faire marche arrière, suite à une vague de protestations des populations dans le Sud du pays.
Sur ce point, l’intervenant a estimé que la loi environnementale impose aux investisseurs un contrôle strict et la preuve en est que « nous n’avons vécu aucun désastre écologique depuis l’exploitation des hydrocarbures dans notre pays. Ceci dit, il faut que les techniques d’extraction soient maitrisées. Pas de contraintes majeures pour le développement de cette énergie, donc». En somme, toutes les conditions sont réunies, notamment avec la nouvelle loi sur les hydrocarbures (attractive), pour réussir ce programme d’exploitation du gaz non conventionnel, dont l’Algérie est en mesure d’en augmenter les niveaux de production à 100 milliards de M3/an. Des productions permettant de répondre à la demande locale et de conquérir des parts à l’international.
A. R.
Toufik Hasni, consultant en transition énergétique: «Le gaz du schiste, n’est pas rentable»
L’avis de l’ex-cadre de Sonatrach que ne partage pas, cependant, Toufik Hasni, consultant en transition énergétique. Pour lui, l’avenir est dans le développement des énergies renouvelables. Il a précisé que l’exploitation du gaz du schiste est coûteuse. Cette énergie nécessite un investissement de 1,5 milliard de dollars/an pour avoir une production, en 10 ans, entre 10 à 15 milliards M3. Il n’est pas rentable économiquement. L’autre problématique soulignée par le consultant, c’est la rareté des investissements dans les énergies non conventionnelle. « Les banques et les institutions mondiales refusent d’accorder des financements pour les hydrocarbures. Elles ont gardé quelques financements pour le gaz, en attendant l’émergence des EnR», conclut-il.
A R.