L’accès aux services publics : Des progrès, mais aussi des «zones d’ombre»

La mise en avant de la société civile au cours de ces deux dernières années, outre le fait qu’elle reconfigure quelque peu le champ politique post- Hirak, a fortement agi sur la notion de service public, en le présentant, comme l’a répété comme un leitmotiv le président de la République, comme une priorité pour casser le mur de la bureaucratie et faire valoir le droit du citoyen à un traitement empreint de dignité et de respect de la part des institutions sous leurs différentes déclinaisons. Si les résultats sont en-deçà des attentes, la problématique, quant à elle, jouit d’un peu plus de visibilité. 

Par Amar Naït Messaoud

Il est clair que la « machine » administrative ne peut se dégripper du jour au lendemain. Il y a même, de sa part, des formes de résistance qui tente de l’éloigner de la perspective de transparence et d’ouverture vers le public.

Ainsi, les retards dans la numérisation, ne sont pas toujours liés à un retard technologique ou un manque de financement. La tentation de faire garder des privilèges ou des pouvoirs discrétionnaires à certains segments de l’administration participent aussi à susciter cette forme d’ «allergie» à la numérisation des pièces et des documents administratifs.

La transparence des transactions, par l’usage du chèque,  de façon à réduire les évasions fiscales, par exemple, ainsi que la traçabilité rigoureuse des documents fonciers au niveau des Domaines et du Cadastre, de façon à asseoir une gestion moderne du foncier qui lui fait éviter les détournements et qui facilite les opérations d’investissement, sont en contradiction avec les intérêts étroits de certains groupes ou coteries.

Il se trouve que le président de la République revient à la charge de façon presque régulière pour mettre en exergue le droit du citoyen à un service public moderne, qui s’inscrit dans le principe de permanence et d’équité. Le retour sur le sujet signifie que, dans ce domaine, rien n’est vraiment acquis de façon définitive.

L’arrogance et la tentation « cachotière » de certains services publics (administration locale, établissement de service public,…) sont parfois difficiles à congédier 

LES MÉDIATEURS DE LA RÉPUBLIQUE SUR TOUS LES FRONTS 

La création en 2016 de  » l’Observatoire national du service public » ne semble pas avoir résolu tous les problèmes des citoyens face à la lourdeur bureaucratique, ou face, parfois, à la tentation corruptrice de certains agents de l’État.

Au vu des difficultés et des écueils auxquels butent toujours les citoyens- que ces derniers soient désignés des termes « public », abonnés, clients ou patients, selon les services sollicités (mairie, service fonciers, Sonelgaz, ADE, dispensaires, hôpitaux,…)-, l’on est en droit de chercher des solutions institutionnelles plus adaptées et plus efficaces.

Souvent, toutes ces notions de « public », « abonné », « patient », avaient évolué, par une espèce de morbide processus d’opacification de la relation gouvernants-gouvernés, en termes de : pétitionnaire », protestataire, manifestant,…etc. Il est difficile de canaliser une requête relevant de cette forme, même si son contenu peur, parfois, se révèle d’une extrême banalité.

Le service public vit parfois des moments difficiles. Lorsque la sécheresse s’installe pour trois ans et des barrages se vident, il n’est pas surprenant que la tension sur la distribution de l’eau augmente et se fasse connaître, au moins par le canal des réseaux sociaux.

Même si les solutions ne sont pas toujours à portée de main, les gestionnaires locaux- à commencer par le wali, jusqu’au président de l’Apc, en passant par les directeurs d’exécutif de wilaya et les chefs de daïras, ont instauré des journées de réception pour les citoyens, avec des registres de doléance et un système de suivi.

Mieux encore, un service interface citoyens-administration a été crée, dirigé par un Médiateur de la république au niveau central, avec une représentation dans chaque wilaya.

Ces représentants sont sur tous les « fronts », recevant des requêtes de toutes natures et que, après examen, ils transmettent aux administrations ou établissements concernés ou « mis en cause », avec obligation, pour ces derniers, de donner suite aux requêtes reçues.  

ATTRIBUTS DE LA CITOYENNETÉ

Si les motifs de « dissuasion » du public étaient, auparavant, riches de leurs explications: « revenez après les élections », « après l’Aïd », « la semaine prochaine »,…etc., ils sont aujourd’hui, dans certaines régions,  renforcés par les terme « magiques », le deus ex machina qui délivre les ronds-de-cuirs de leur impasse: « Il n’y a pas de budget, et pourtant nous avons demandé l’inscription de ce projet ».

Par le moyen de ce ‘’croque-mitaine’’, on compte repousser les sollicitations des administrés, en leur expliquant qu’il n’y a plus d’argent pour réparer l’éclairage public, les fuites d’eau, les réseaux d’assainissement…etc. 

Et pourtant, lorsqu’il arrive que les collectivités locales soient parfois bien ‘’inspirées’’ ou instruites expressément pour hiérarchiser et planifier leurs propositions de projets de développement, de notables «avancées sont réalisées. Il en a été ainsi de ce programme intitulé « Zones d’ombre » ayant été lancé au début 2020.

Dans plusieurs bourgades isolées de l’arrière-pays rural (steppique, montagneux ou saharien), le cadre de vie des habitants (adduction et transfert d’eau, électrification, centres de santé, éclairage public, aménagement des écoles, assainissement,…) a été sensiblement amélioré.

Il est évident que la notion de service public ne signifie pas, ipso facto, performance économique, création de richesses et d’emplois. Ces derniers sont tributaires du redémarrage de la machine économique du pays et de la promotion de la politique de l’entreprise.

Des efforts sont accomplis dans ce sens, même si la ressource humaine, dans ses volets formation et compétence, continue à constituer la pierre d’achoppement pour une telle ambition. 

Indubitablement l’amélioration des servies publics- sur les plans de la qualité des prestations, de la performance et de la fluidité de leur réalisation- constitue une rampe vers les autres attributs constitutifs de la citoyenneté.

A.N. M.

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