La numérisation en Algérie : Une multiplicité de structures pour une vision unique ?

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À l’ère du numérique, où la transformation digitale façonne les économies et redéfinit les interactions sociales, l’Algérie se positionne à la croisée des chemins. Cherchant à moderniser son économie et améliorer la vie de ses citoyens, le pays a entrepris plusieurs initiatives pour embrasser cette révolution numérique. Cependant, la multiplicité des structures et la convergence des missions soulèvent des questions pertinentes sur l’efficacité et la vision de cette transformation. Dans cette note, nous explorerons la dynamique de la numérisation en Algérie, en mettant en lumière les défis, les opportunités et les aspirations pour un avenir numérique prometteur. L’Algérie, consciente de cet impératif, vient d’annoncer la création du Haut Commissariat à la Numérisation. Mais quelle serait sa place dans le paysage déjà dense des structures dédiées à la numérisation ?

Par CARE

Utilité et missions projetées du Haut Commissariat à la numérisation

Dans l’absolu, le Haut Commissariat au Numérique pourrait être le catalyseur d’une transformation numérique plus rapide et plus efficace en Algérie. Sa mission première serait de définir ou asseoir la stratégie nationale de numérisation.

Cette stratégie prendra en compte les spécificités de chaque secteur économique et de chaque type d’organisation, qu’il s’agisse d’administrations ou d’entreprises privées ou publiques.

Le Haut Commissariat au Numérique (HCN) serait-il envisagé comme une boussole guidant l’Algérie à travers les méandres de la transformation numérique?

Devrait-elle, sa création  non seulement être une réponse à la nécessité d’accélérer cette transformation, mais aussi une solution stratégique aux défis rencontrés par les initiatives précédentes?

Au cœur de sa vision, le HCN devrait désormais aspirer à offrir une perspective holistique de la numérisation. Il ne s’agit pas seulement de lancer de nouveaux projets ou d’adopter les dernières technologies, mais de veiller à ce que chaque initiative soit en harmonie avec les aspirations nationales et les besoins spécifiques de chaque secteur, petit ou grand.

Cette vision globale devrait être soutenue par une expertise technique sans pareil, rassemblant des experts du domaine pour s’assurer que l’Algérie adopte les meilleures pratiques disponibles.

Mais au-delà de la simple expertise, le HCN doit se positionner comme un gardien des ressources du pays. En ayant une vue d’ensemble, il est en mesure d’identifier les redondances, les inefficacités, et de s’assurer que chaque dinar investi dans la numérisation apporte une valeur ajoutée à la nation.

En regardant en arrière, vers les actions de numérisation déjà entreprises, le rôle du HCN devient encore beaucoup plus important. L’une de ses missions serait d’évaluer chaque initiative, de célébrer les succès, d’apprendre des échecs et de définir les domaines d’amélioration.

Cette évaluation n’est pas une fin en soi, mais un moyen de redéfinir et de réorienter les efforts pour maximiser leur impact.

La coordination est un autre défi majeur que le HCN devrait être déterminé à relever. Avec tant d’acteurs et d’initiatives sur le terrain, il est impératif d’avoir une entité qui assure une synergie entre les différents efforts.

Que ce soit pour renforcer un projet réussi, redéfinir une initiative moins fructueuse, ou mettre en lumière un domaine négligé, le HCN s’assurerait que l’Algérie avance dans la bonne direction.

La Multiplicité des Structures de Numérisation en Algérie

Au cœur de la stratégie de développement de l’Algérie, la numérisation se présente comme un pilier essentiel. Toutefois, une question se pose avec acuité : pourquoi une telle multiplicité de structures dédiées à la numérisation ?

En effet, avec la création récente du Haut Commissariat à la Numérisation, certains observateurs s’interrogent sur la nécessité d’une telle entité, surtout en présence de ministères et d’agences déjà en place, ayant des missions similaires.

L’Algérie a déjà franchi des étapes significatives dans sa quête de numérisation. Le Ministère de la Numérisation et des Statistiques, créé en 2020, témoigne de cette volonté d’intégrer la transformation numérique dans la stratégie nationale.

De même, le Ministère de la Poste et des Télécommunications et le Ministère de l’Économie de la Connaissance, des Startups et des Micro Entreprises ont des missions qui gravitent tous autour de la numérisation.

Sans oublier l’Agence Nationale de Développement du Numérique1, bien que non encore opérationnelle, qui devait jouer un rôle central dans cette transformation.

Alors, pourquoi le Haut Commissariat à la Numérisation ? Certains avancent que cette nouvelle structure pourrait avoir un rôle plus stratégique, assurant une meilleure coordination entre les différentes entités existantes.

L’objectif serait d’éviter les doublons, d’assurer une meilleure synergie et de garantir une mise en œuvre efficace de la stratégie nationale de numérisation.

Le plan d’actions à mettre en œuvre pour la numérisation de l’économie nationale

Le plan d’actions pour numériser l’économie nationale est un projet ambitieux qui nécessite une approche structurée et multidimensionnelle. Pour y parvenir, il est essentiel de se concentrer sur quatre axes majeurs :

Modernisation des infrastructures numériques

La base de toute économie numérique repose sur des infrastructures solides et fiables, elles sont au cœur de toute transformation.

Il est donc impératif d’étendre la couverture Internet à haut débit à chaque coin et recoin du territoire, garantissant ainsi un accès équitable à tous.

De plus, la mise à niveau des systèmes informatiques des administrations publiques et de toute entreprise est primordial.

Ces systèmes doivent être à la fois robustes pour gérer les demandes croissantes et flexibles pour s’adapter aux évolutions technologiques.

Formation et éducation numériques

La transformation numérique ne se limite pas à la technologie ; elle concerne également les personnes. Il est donc essentiel de doter chaque citoyen des compétences numériques nécessaires pour naviguer dans cette nouvelle ère.

Cela pourrait se traduire par l’intégration de modules de formation numérique dans les programmes scolaires, des ateliers pour les professionnels et des campagnes de sensibilisation pour le grand public.

Promotion de l’innovation technologique

L’innovation est le moteur de la transformation numérique. Il est donc essentiel de soutenir les startups technologiques, qui sont souvent à la pointe de l’innovation.

De plus, encourager la recherche et le développement dans le domaine du numérique peut conduire à des avancées majeures, positionnant l’Algérie comme un leader dans certains domaines technologiques.

Souveraineté numérique

La souveraineté numérique, dans un monde interconnecté, est devenue une pierre angulaire de la sécurité et de l’indépendance nationales. Pour l’Algérie, cela signifie prendre le contrôle intégral d’au moins ces sept domaines-clés :

Les infrastructures : Il est vital de posséder et de contrôler les infrastructures numériques sur lesquelles repose notre économie, garantissant ainsi une autonomie opérationnelle.

L’industrie numérique et diversification économique : En développant une industrie numérique robuste, l’Algérie peut réduire sa dépendance envers les acteurs étrangers et diversifier son économie, renforçant ainsi sa position sur l’échiquier mondial.

Les données : Contrôler nos propres données est essentiel. Cela signifie non seulement les protéger, mais aussi les valoriser, en s’assurant qu’elles servent d’abord et avant tout les intérêts nationaux.

La cybersécurité : Dans un monde où les menaces sont omniprésentes, garantir la sécurité de nos systèmes et de nos données est une priorité. Cela nécessite des investissements continus et une veille constante.

La réglementation de l’espace numérique : Pour naviguer dans cet espace complexe, des réglementations claires et robustes sont nécessaires. Elles doivent protéger les citoyens tout en encourageant l’innovation.

La ressource humaine et développement des compétences numériques : Une nation numériquement souveraine a besoin d’une main-d’œuvre qualifiée. Cela implique de former nos citoyens aux compétences numériques de demain et de les préparer à être les acteurs de cette transformation.

La coopération internationale : Bien que la souveraineté numérique implique une certaine autonomie, la coopération internationale reste essentielle. Travailler avec d’autres nations peut renforcer notre position tout en partageant les meilleures pratiques.

Conclusion

La numérisation, bien au-delà d’une simple évolution technologique, est une transformation profonde qui touche à la fois la culture, la structure et l’avenir d’un pays. L’Algérie, face à cette mutation, a choisi de mettre en place diverses structures pour piloter cette transition.

Toutefois, la création d’une agence, de trois ministères, et maintenant d’un Haut Commissariat à la Numérisation, tous ayant des missions similaires ou fortement interdépendantes, soulève des questions légitimes.

Est-ce vraiment efficace de multiplier les structures pour répondre aux défis de la numérisation ? Ne risque-t-on pas une dilution des responsabilités, des efforts redondants ou, pire, des initiatives contradictoires ?

Il est indéniable que le Haut Commissariat à la Numérisation pourrait apporter une valeur ajoutée, en particulier en termes de coordination et de vision stratégique.

Cependant, il est essentiel de veiller à ce que cette nouvelle entité ne devienne pas une autre couche bureaucratique, mais plutôt un catalyseur efficace pour la transformation numérique du pays.

La volonté d’innover et de progresser en Algérie est indéniable, mais la clé du succès réside dans la capacité du pays à coordonner efficacement ces entités pour éviter les pièges du trop-plein institutionnel et garantir une transformation numérique cohérente et efficiente.

CARE-Août 2023

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