Performance industrielle, excellence opérationnelle, management, leadership. Autant de concepts en vogue, relayés en abondance sur les réseaux sociaux, suscitant les besoins en formation chez beaucoup d’entreprises qui s’acquittent, ainsi, de la taxe de la formation. Les organismes de formation, de leur côté, ont eu de quoi rentabiliser leurs plans de formation. Kamel Alabane, coach et formateur, consultant aussi pour des entités diverses, nous livre, dans cet entretien, son analyse de ces enjeux contemporains et futurs, fruit de son expérience sur le terrain.
Eco Times : La performance industrielle vise à atteindre l’excellence opérationnelle, dit-on. Comment se présente la situation en Algérie, et quel est votre apport, en tant que coach, dans ce domaine ?
Kamel Alabane : L’industrie est l’un des secteurs-clés en l’Algérie. La performance commence à prendre forme dans les entreprises algérienne privées ou publiques. Le gouvernement a constaté que la diversification des sources de financement afin de garantir une indépendance, est de recourir, de manière stratégique, au partenariat entre les secteurs public et privé, ce qui permet, à moyen terme, d’avoir un retour sur investissement.
Les entreprises, aussi, avaient compris que le développement économique de notre pays doit se faire par les PME/PMI, et admis que, si la compétence n’est pas au diapason international, elles seront amenées à disparaitre, vu la concurrence rude.
La performance industrielle mise sur la satisfaction du client, en assurant une amélioration continue pour atteindre l’excellence opérationnelle.
Cette démarche constitue la première étape du cycle de vie d’un projet, servant d’étude et de connaissance pour la majorité des entreprises, et pour d’autres, qui sont dans la deuxième phase de lancement. Toutefois, il reste plusieurs phases pour atteindre la maturité.
Comme coach, mon rôle est de vulgariser cette approche de la performance industrielle qui permet d’atteindre l’excellence opérationnelle.
Or, l’excellence opérationnelle répond, avant tout, à une excellence de services et de produits, où les coûts doivent être réduits.
Pour la réussite de cette approche, j’accompagne les entreprise à intégrer le développement de la gouvernance, la mise en place d’un bureau de la planification stratégique, l’établissement du diagnostic de l’entreprise et faire sortir les axes d’amélioration dans un plan d’action (formation, accompagnement et coaching) qui sera intégré dans un cadre de gestion projet. Ce plan sera étalé entre 01 à 02 ans. Mon rôle aussi, est de simplifier l’approche qui a révolutionné le monde de l’industrie dès les années 1950, l’administration et le service. Cette approche est le Lean manufacturing et le Lean office. Tout simplement le Lean au service de la performance.
Impliquer les collaborateurs et les PME industrielles, notamment dans les volets organisation et digitalisation, sont les deux leviers de l’excellence opérationnelle. Est-ce faisable dans l’écosystème de notre pays ?
Nous relevons une prise de conscience quant à l’impératif de la digitalisation. D’où la création du Groupement algérien des acteurs du numérique (Gaan) et autres regroupements, qui contribuent au développement d’un écosystème numérique fort. Oui, je demeure convaincu que notre écosystème est favorable pour développer ces deux leviers de l’excellence opérationnelle, à l’exemple du Rwanda et de la Lituanie. Il reste, tout de même, beaucoup à faire dans l’organisation et la digitalisation, terrains toujours vierges. En fin de compte, l’organisation ne pourra pas être figée, mais se développe selon l’environnement et les circonstances, pour assurer l’amélioration continue et atteindre l’excellence. Et ce n’est qu’à ce moment-là, que le digital deviendra un outil d’aide à la réussite. Il est important, dans ce cadre, de communiquer la vision et de définir et repartir les différentes missions. La mission de la digitalisation fait peur aux gens : on doit instaurer tout un système de communication fiable, basé sur la transparence pour vulgariser cette mission et gagner la confiance des utilisateurs dans différents domaines pour qu’ils puissent s’y fédérer.
A l’ère de l’holacratie (gestion horizontale), le leadership dans une entreprise ne sonne-t-il pas comme un anachronisme décisionnel ou de gérance ?
« Tout métier ne peut avancer sans un leader ». Le leadership est la capacité de mobiliser les personnes pour atteindre un but. Pour aboutir à un changement efficace, nous avons besoin d’un leader à la tête de l’entreprise pour orienter l’ensemble dans l’objectif d’atteindre un but bien défini. Nous avons besoin d’un leader à tout moment crucial. Le leader peut provoquer le changement et peut mettre fin aux procédures obsolètes. La gérance, à mon avis, est là pour organiser et développer les processus et les procédures. Dans une entreprise, on a besoin d’un leader et d’un gestionnaire, en même temps.
Un adage journalistique dit que ‘’trop d’information tue l’information’’. Pour extrapoler, ‘’trop de formations ne tue-t-elle pas la formation’’ ? En tant que coach et formateur, que pensez-vous de cette foultitude de formations autour de l’Entreprise ?
Si la vision n’est pas claire et simple pour l’ensemble du top management concernant l’entreprise, ou, à titre individuel, effectivement la formation tue la formation. La formation est un outil stratégique entre les mains du chef d’entreprise, elle permet à l’employeur d’adapter les compétences de ses collaborateurs à leur poste de travail, de maintenir leur employabilité, de développer leurs compétences pour conquérir de nouveaux marchés, de permettre leur reconversion au sein de l’entreprise, qui permettra son épanouissement. A ce sujet, la majorité de nos entreprises sont conditionnées par la taxe de formation de 1%. Il y a des entreprises qui forment leurs salariés, juste par obligation de la taxe, ce qui veut dire qu’elles ne s’appuient sur aucune stratégie et aucun plan de gestion des compétences et de carrières. Heureusement que certaines entreprises ont commencé à prendre conscience de l’enjeu et de l’importance de développer les compétences de leurs salariés pour qu’ils puissent devenir leurs ambassadeurs et les fidéliser. Cette démarche permet de rendre l’entreprise compétitive, de développer les talents et de la pérenniser. Le monde change, les métiers changent aussi, et pour pérenniser l’entreprise, il est impératif d’établir une planification stratégique avec une vision claire. La pérennisation s’effectuera via un plan de formation, issu de la planification stratégique, ciblant toutes les catégories sociales professionnelles.
Entretien réalisé par Zoheir Zaid
Bio express :
Kamel Alabane, 44 ans, marié, 04 enfants, est ingénieur en électronique option communication de l’université Abou Bakr Belkaid de Tlemcen. Il est actuellement consultant et formateur, en freelance, dans ‘’la Performance industrielle et organisationnelle’’, ‘’management de projet’’ et ‘’leadership et management’’. Kamel Alabane, est également fondateur de 2 entreprises, Sarl et Eurl, et ambassadeur du Cluster Digital Africa. Il a exercé comme technicien en informatique, ingénieur de télécommunications chez une multinationale dans la téléphonie, coordinateur dans une multinationale fournisseuse des équipements de télécommunications, chef de projet dans une multinationale et, enfin, directeur général dans une holding algérienne.