Intégration agriculture-élevage : Un système à renforcer en Algérie

Intégration agriculture-élevage : Un système à renforcer en Algérie

Les systèmes agricoles intégrés, combinant la production végétale et l’élevage, accroissent la quantité des produits générés. Ils permettent d’utiliser des résidus de cultures pour produire de la viande, du lait et d’autres denrées, tout en produisant du fumier pour améliorer la fertilité et la qualité du sol cultivé. Sur le plan économique, la coordination des cultures et de l’élevage permet d’accéder à une certaine autonomie du système technique et engendre une moindre dépendance aux marchés des intrants.

Par Akrem R.

Dans les pays en développement, l’intégration agriculture-élevage (IAE) est considérée comme moyen d’intensification de l’agriculture à l’effet d’augmenter la productivité de la terre et d’améliorer le revenu des agro-éleveurs.

En Algérie, l’association de l’élevage aux différentes cultures a été impulsée par l’État dans les bassins laitiers créés dans le cadre des programmes de développement dès l’année 1964.

L’objectif était d’augmenter la production de lait pour réduire les importations et d’améliorer les rendements des cultures, notamment ceux des agrumes dans la Mitidja, qui pâtissaient d’un manque de fertilisation. Le secteur de l’agriculture et de l’élevage en Algérie présente, toutefois encore beaucoup d’insuffisances. Celles-ci se définissent par de faibles dotations en ressources naturelles ((sols et eaux) (soit 0,19 ha/habitant, contre 0.45 pour la Tunisie et des conditions agro-climatiques très difficiles, limitant singulièrement les possibilités d’intensification des activités agricoles.

Les exploitations laitières algériennes dans leur écrasante majorité possèdent moins de 5 vaches laitières (86 %) et occupent moins de 10 ha (70%) (RGA6 , 2001), avec une charge animale très élevée (Srairi et al, 2013). En effet, les fourrages artificiels représentent 10% de la surface agricole utile (SAU), soit 923 569 ha et 20% des cultures herbacées, dominées par les cultures céréalières.

Les cultures fourragères conduites en pluvial constituent 81% des superficies consacrées aux fourrages artificiels. Les superficies occupées par les fourrages naturels, particulièrement les prairies naturelles, sont pour leur part, insignifiantes (0.6% de la SAU).

Insuffisances

A ces insuffisances, s’ajoute le fait que l’élevage est menacé par l’inflation des prix des intrants agricoles importés, notamment ceux des aliments concentrés du bétail. De plus, la production bovine laitière en Algérie, à l’instar de celle des pays du Maghreb, est caractérisée par une offre fragmentée, issue de petites exploitations agricoles familiales.

La productivité des élevages laitiers est faible (2500 à 3500 kg/vache/an) malgré les potentialités génétiques des vaches laitières importées (Holstein, Montbéliarde,…).

De ce fait, les rendements laitiers se trouvent assujettis aux contraintes écologiques (aléas climatiques), techniques et socio-économiques, qui limitent la rentabilité des élevages et les possibilités de leur développement.

En effet, le stress hydrique et thermique entraîne de nombreuses conséquences négatives pour l’animal (troubles physiologiques et comportementaux) et des pertes importantes de production laitière, ceci d’autant plus que les conditions de confort dans les étables (aération, climatisation, espace réservé à chaque vache) ne sont pas respectées.

Les facteurs écologiques ont, également, des répercussions sur l’alimentation du cheptel , exprimées par l’insuffisance des ressources fourragères, du fait que l’eau constitue un facteur limitant.

Des contraintes telles que les ruptures fréquentes d’approvisionnement (aliments du bétail, produits vétérinaires,…), l’insuffisance du suivi sanitaire, le faible niveau de formation technique des éleveurs, la faiblesse du prix du lait produit et les difficultés d’encaissement des primes de la production laitière (Semara, 2018,) limitent, également, la productivité des élevages laitiers.

Les exploitations laitières de la plaine de la Mitidja dans la wilaya de Blida, souffrent de l’ensemble des insuffisances évoquées ci-dessus. Ces dernières années, ladite plaine est affectée, de façon récurrente, par un déficit hydrique et une irrégularité des précipitations.

L’élevage ovin se localise dans différentes communes de la Wilaya de Blida. Il est pratiqué généralement avec de petits troupeaux en raison de la rareté ou de la difficulté d’accès aux aires de pâturage.

Néanmoins, et occasionnellement, il est procédé à l’engraissement de troupeaux plus importants, destinés à la vente pour la fête religieuse de l’Aïd El-Adha, en recourant aux fourrages secs (paille) et à l’orge en grains.

Le caprin, l’aviculture et l’apiculture ne sont pas très présents dans la Mitidja, mais ils s’y développent ces dernières années.

Dans une étude publiée par le Cread sous le thème : «Les formes d’intégration agriculture- élevage. Le cas des systèmes de polyculture-élevage bovin laitier de la plaine de la Mitidja – Algérie», les chercheurs ont expliqué comment se met en œuvre, concrètement, l’intégration agriculture-élevage dans la plaine de la Mitidja au sein des petites exploitations laitières familiales, quelles sont les différentes modalités de cette intégration, et quel est l’apport des ressources végé- tales locales à l’alimentation des vaches laitières.

Cette étude a pour objectif de mesurer le niveau d’intégration agriculture-élevage bovin lait au sein des différents systèmes de culture dans la plaine de la Mitidja.

Un premier travail de terrain a été effectué en 2014 dans la wilaya de Blida (Mitidja-centre) auprès de 75 éleveurs de bovins laitiers pour caractériser les types d’intégration par le biais des flux échangés entre l’élevage bovin laitier et les autres cultures des exploitations.

En second lieu, une enquête plus approfondie auprès de 30 éleveurs a été réalisée en 2017, pour calculer le niveau d‘intégration selon la contribution de chaque catégorie d’aliment dans les apports alimentaires fournis au bétail.

«Nous montrons que l’élevage bovin est très intégré au marché international avec un taux de 45%, par le recours aux aliments concentrés. L’intégration de l’élevage aux ressources fourragères produites au sein des exploitations laitières représente 29% des apports. Ce faible niveau d’intégration est expliqué par les difficultés d’accès aux ressources (terre et eau) pour produire des fourrages verts au sein des exploitations laitières, qui sont concurrencées par le maraichage et l’arboriculture. L’intégration de voisinage par le biais du fauchage des herbes spontanées, le pâturage sur les jachères et les chaumes des céréales et la distribution des sous-produits des cultures maraichères est faible. Elle est de 16% du total des apports. L’intégration de l’élevage au marché national pour l’achat des aliments grossiers représente 10% des apports», indiquent-ils.

En somme, le renforcement de l’intégration agriculture-élevage devrait se faire par la valorisation des ressources locales (sous-produits agricoles (paille, feuille de choux, déchets des carottes et de la betterave, …) et agro-industriels (son de blé, déchets des agrumes et des tomates industrielles, …), par la mise de ces ressources à la disposition des éleveurs surtout lorsqu’on sait que les ressources telles que l’eau et terres sont limitées.

La politique de subvention du son de blé a permis un recours massif des éleveurs à sa distribution sans pour autant prendre en considération un bon rationnement des vaches laitières.

Cette subvention doit être accompagnée par un encadrement des éleveurs, qui peut s’effectuer par des formations et des journées de sensibilisation et de vulgarisation. Les efforts et le volontarisme des pouvoirs publics d’insérer l’élevage bovin au sein du système de polyculture paraissent laborieux au vu des multiples contraintes et conditions d’élevage.

A. R.

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