Bonne nouvelle pour les industriels et opérateurs économiques: la condition d’âge des chaînes de production rénovées sera bientôt supprimée. Un texte de loi a été présenté, récemment, lors d’une réunion du gouvernement par le ministre de l’Industrie, Ahmed Zeghdar. Néanmoins, des experts, avertissent quant au fait que l’importation d’équipements rénovés est une arme à double tranchant, dans la mesure où, entre autres, le matériel d’occasion, s’il ne coûte pas cher, entretien, toutefois, induit des dépenses importantes…
Akrem R
L’autorisation d’importation de ces équipements permettra, selon le ministre, de réduire la facture d’importation des équipements de production dans la mesure où il s’agit d’équipements moins coûteux et dans un parfait état de marche, acquis dans les marchés internationaux ayant été impactés par la conjoncture économique mondiale, induite par le Covid-19. Une crise qui a causé la fermeture de nombreuses usines. Ce cadre réglementaire a inclus, lors de son entrée en vigueur en novembre 2020, un critère sur l’âge des lignes de production afin d’assurer leur efficacité économique. Toutefois, il a été constaté que les prix de ces lignes et équipements de production restent relativement élevés puisqu’ils sont presque neufs, a-t-il détaillé, relevant que la condition d’âge pour ces équipements avait été supprimée pour ne compter que sur les capacités effectives de ces lignes, l’Organisme algérien d’accréditation (Algerac) ayant été associé pour certifier les rapports des bureaux d’expertise quant à l’état et l’efficacité des lignes.
En effet, à travers cette mesure exceptionnelle, le gouvernement veut renforcer les outils de production nationale afin d’atteindre l’objectif escompté, à savoir, la diversification de l’économie nationale. Tout producteur ou industriel, activant dans le domaine des services ou de la production, pourrait importer des équipements rénovés, à condition de présenter les documents attestant de leur fiabilité. En somme, cette nouvelle mesure est considérée comme étant une opportunité en or pour les industriels et investisseurs nationaux pour la délocalisation de certaines unités de production à l’arrêt, notamment, en Europe. Dans ce cadre, le directeur de la compétitivité industrielle au ministère de l’Industrie, Abdelaziz Guend, a déclaré, hier, que «nous sommes à la recherche de solution efficace pour le renforcement de l’outil de production nationale et également, pour la diversification de notre économie».
Il a précisé que le recours à l’importation de chaînes rénovées, vise la relance de l’investissement et à mettre à la disposition des opérateurs économiques des équipements rénovés à des prix très compétitifs. Durant la période de 2017 à 2019, seulement 51 chaînes de production rénovées ont été importées pour un montant de 12 millions de dollars, a-t-il fait savoir, en notant le peu d’engouement des opérateurs algériens pour ce genre d’équipements, et ce, en dépit des prix très compétitifs qu’ils présentent. Guend, a indiqué qu’un cadre réglementaire est mis en place afin de contrer le phénomène d’escroquerie et transfert illicite de l’argent. Une fois l’opérateur ou l’industriel, ayant déniché une d’affaire, explique-t-il, il doit présenter les certificats justifiant l’innovation de la ligne de production en question, garantissant au moins une durée supplémentaire d’exploitation entre 10 à 20 ans. Pour l’expert en investissement, Mohamed Sayoud, l’importation d’équipements rénovés est une arme à double tranchant, dans la mesure où, explique-t-il, si le matériel d’occasion ne coûte pas cher, son entretien induit, néanmoins, des dépenses importantes. Pour lui, il est préférable d’acquérir de nouvelles lignes de production neuves de la Chine à des prix abordables.
A. R.
Hamza Boughadi, expert en économie : « C’est une mesure avec ses avantages et inconvénients… »
L’expert en économie, Hmaza Boughadi, a indiqué que la suppression de l’âge d’équipements rénovés, est une mesure qui a ses avantages et ses inconvénients. « Quand on parle de certains équipements neufs qui sont inaccessibles, très chers, surtout, ceux de certaines activités de pointe, et dont on a besoin urgemment, il est recommandé de recourir à cette option pour la diversification de l’économie nationale et multiplier les unités de production. Mais l’importation de ces équipements doit être soumise à certaines conditions», a-t-il souligné.
Pour notre interlocuteur, on doit, absolument, disposer au niveau des douanes, d’experts qui mesurent et évaluent ces équipements. Ces derniers doivent disposer des informations sur les équipements neufs et avoir des relations leur permettant d’avoir une idée sur les prix de ce genre d’équipements afin de faire de la comparaison outre qu’ils doivent être au fait de la faisabilité de ces lignes de productions. « Une fois la demande d’’importation faite, on doit la soumettre à une enquête pour faire la comparaison entre le prix du matériel neuf et celui rénové. Dans le cadre des achats directs, lorsque l’opérateur achète avec son propre argent, il n’y pas de problème. Mais lorsque l’opérateur est contraint de recourir à un crédit bancaire, là, la mission devient complexe. Il sera confronté au problème de l’amortissement, financièrement, de l’équipement. Ceci posera la problématique de savoir, comment connaitre la durée de vie de l’équipement en question? Sûrement, le vendeur va vous dire 5 à 10 ans, mais le rendement pourrait ne pas dépasser pas les 3 ans !», détaille-t-il. A cela, s’ajoute le fait qu’il y a le problème de précision et de la catégorisation. En effet, il est difficile de connaitre avec exactitude les performances de ce matériel. «C’est une mesure qui va faciliter et donner de la souplesse à l’acquisition des équipements pour les opérateurs et permettre l’acquisition de nouvelles machines, à de bons prix, ce qui permettra d’épargner des devises, mais à des conditions et une manière de faire. Si nous n’arrivons pas à établir une manière de faire, une inspection sur l’âge des équipements, sur la performance, le calibrage, la comparaison des prix, l’origine des équipements… si on ne fait pas un travail organisé et bien élaboré, cela va provoquer des risques pour le consommateur, l’opérateur et l’économie nationale, d’une manière générale», résume-t-il.
Propos recueillis par A. R.