L’Algérie dépendante de l’importation pour répondre à ses besoins en tout types de papiers (emballages, carton, papier pour l’impression …) risque de connaitre des pénuries et hausse conséquente des prix de cette matière, dans les prochains jours.
Par Akrem R.
Le constat est déjà là, et les prix du papier à impression connaissent une flambée. Ainsi, la rame de papier est passée de 500 DA à 900 DA ! Même chose pour les cahiers scolaires. Des grossistes alertent et annoncent que les prix vont doubler à partir de la rentrée scolaire. Idem pour des filières industrielles, notamment, celle du ciment et le médicament, surtout.
En effet, le prix de la tonne de cette matière première a connu une hausse de 150 à 200 euros, a fait savoir la directrice générale du Groupe industriel du papier et de la Cellulose (GIPEC), Mme Leila Kouadri.
La crise sanitaire de la pandémie de la Covid-19 qui perdure depuis 3 ans maintenant, et la guerre en Ukraine sont à l’origine de ces fluctuations des prix des matières premières sur le marché mondial, explique-t-elle. Il y a même certains types de papier qui sont en rupture de stock sur le marché international, dira la même responsable qui s’exprimait, hier, sur les ondes de la radio «Chaîne II», citant l’exemple du papier compact, utilisé pour la fabrication de boites pour médicament.
« On n’arrive pas à trouver des fournisseurs pour ce genre de papier. Nos appels d’offres sont déclarés infructueux. Pas de soumissionnaires», regrette-t-elle. D’ailleurs, cette nouvelle donne a imposé au groupe de revoir à la hausse ses prix avec les clients.
La DG du GIPEC a noté que l’entreprise publique trouve des difficultés pour s’approvisionner en matière première, contrairement aux privés qui peuvent saisir des opportunités pour acheter du papier facilement. Ils ont plus de souplesse dans la passation des marchés. «Les fournisseurs refusent de nous garantir un prix pour une année. Ils peuvent seulement nous le garantir pour un mois, et ce, vu les fluctuations que connait le marché mondial de cette matière».
La production nationale ne couvre que 5% des besoins
L’intervenante a assuré que le groupe a réussi, pour l’instant, à gérer des ruptures de stocks. Chiffres à l’appui : sur un objectif initial de 3,100 milliards de DA en 2021, seulement 2,7 milliards ont été réalisés, soit une baisse de 6%. Et ce, en raison de l’indisponibilité de la matière première, explique-t-elle.
En clair, les prix de plusieurs produits finis connaitront une hausse dans les prochains jours. Cela impactera, négativement, le pouvoir d’achat des ménages déjà en pleine régression. Face à cette situation inédite, il y a lieu de relancer l’industrie nationale du papier, en investissant, notamment, dans le recyclage de cette matière. Actuellement, la production locale ne représente que 5% de la demande globale de l’Algérie, soit 30.000 tonnes/an sur un volume des besoins nationaux de 680.000 tonnes tout type de papier/an. Ainsi, les deux usines (celle de Baba Ali et de Mostaganem), spécialisées dans la production de la matière première sont à l’arrêt, faute de la disponibilité de la patte vierge (fibre Alfa et bois) et, également, de l’obsolescence de la technologie. La mise à niveau de ces usines est, par conséquent, nécessaires. La seule matière qu’on peut produire, dira-t-elle, c’est le recyclage du vieux papier pour la production du papier ondulé.
Vers la relance de l’usine de Saïda
D’ailleurs, la valorisation de ce gisement avec la collecte de 200.000 tonnes permettra à l’Algérie de réduire sa facture de 220 millions de dollars. Un gros effort reste à faire dans ce domaine, du fait que seulement des quantités minimes sont transformées en local et les grandes quantités sont exportées en brut ! Une convention a été signée, récemment, entre le groupe GIPEC et celui de Tonic pour l’augmentation du taux de collecte à 120. 000 tonnes/an.
Questionnée sur les dispositions à mettre en place pour faire face à cette problématique, Mme Leila Kouadri a insisté sur la nécessité de diversifier nos partenaires et même d’alléger les procédures d’achats pour satisfaire la demande nationale en papier compact et sacs pour ciment.
S’agissant du papier ondulé, la responsable a annoncé la relance des activités d’une usine de production à Saïda, à l’arrêt, depuis 2021. Elle devrait produire 225.000 tonnes/an. Un appel à manifestation d’intérêt sera bientôt lancé dans l’espoir de trouver un partenaire local ou étranger, a-t-elle fait savoir.
«Des partenaires ont déjà manifesté leur intérêt et n’attendent que la promulgation du nouveau Code de l’investissement. Ça sera une opportunité pour attirer les investisseurs étrangers», souligne-t-elle, également. En outre, il y a le programme du ministère de l’Industrie pour la restructuration de l’usine Tonic. Cette dernière peut assurer la transformation de 15.000 à 30.000 tonnes/an.
Outre le recyclage du papier, le gouvernement compte sur la recherche scientifique pour le développement de la matière première en local. Un master papier a été créé au niveau de l’Université de Bab Ezzaouar afin d’étudier le processus de fabrication du papier. En collaboration avec l’université d’Oran, une étude est lancée pour trouver une fibre cellulosique pour produire de la patte vierge, précise la responsable, appelant à la généralisation de la numérisation pour réduire l’utilisation du papier.
A.R.