Gestion du foncier industriel : Une rampe de lancement pour la production locale

Foncier industriel

La nouvelle législation sur le foncier destiné à servir d’assiette pour l’investissement (loi n° 23-487 du 28 décembre 2023) est destinée à mettre de l’ordre dans l’octroi du foncier économique (industrie, tourisme,…) pour réaliser des projets d’investissement par les entreprises.

Par Amar Naït Messaoud

Dans la phase actuelle de l’évolution et de la transition de l’économie algérienne, toutes les institutions et tous les acteurs ont intérêt à ce que la production locale et les investissements y afférents puissent être encouragés aussi bien sur le plan administratif que sur le plan fiscal.

Il serait fortement dommageable que, pour un pays aussi vaste que l’Algérie, la question relative à l’offre foncière se transforme en parcours du combattant.

Le réajustement législatif qui vient d’être opéré dans la mise à disposition du foncier économique est venu à point nommé afin de permettre à la machine économique de décoller dans le sens de la création de richesses, de la valeur ajoutée et de l’emploi, mais aussi pour diversifier au maximum les recettes en devise hors hydrocarbures, situées actuellement aux environs de 7 milliards de dollars/an.

La gestion du foncier industriel, et plus généralement économique, destinés à recevoir les investissements réalisés par des entreprises, avait souffert de beaucoup d’aléas où s’étaient « ligués » des facteurs de bureaucratie, de déficit de compétence et d’intrication de prérogatives relevant de plusieurs institutions.

La meilleure preuve de cette gestion problématique, telle qu’elle a été menée au milieu de la deuxième décennie de ce siècle, c’est bien la récupération que fait actuellement les administrations de wilaya de plusieurs dizaines d’assiettes foncières soit inutilisées, soit détournées de leur vocation première en vertu de laquelle ces assiettes, relevant du domaine privé de l’État, ont été cédées.

L’ancien ministre de l’industrie, Mohamed Bacha a relevé, en avril 2022, la «non exploitation optimale des ressources du foncier industriel accordées à certains projets d’investissement», citant, comme causes principales de cette situation les «obstacles liés au non aménagement de certaines zones industrielles et au fait que plusieurs structures prennent en charge l’administration du foncier industriel».

La nouvelle loi sur le foncier économique est venue apporter la solution à cette multiplicité des acteurs qui étaient impliqués dans la procédure d’octroi et de gestion des assiettes foncières pour les projets d’investissements économiques.

Désormais, c’est l’Agence algérienne de promotion de l’investissement (AAPI) qui est chargée de mobiliser l’offre du foncier économique et de lancer les procédures y afférentes, y compris, le cas échéant, l’achat de terrain de statut juridique privé lorsque le foncier domaine de l’État n’est pas disponible dans une région ou dans une wilaya.

Cette agence-organisme unique chargé du foncier économique est censée constituer l’«outil principal dans la mise en œuvre de la politique nationale relative au foncier industriel», comme le prévoyait l’ancien ministre de l’Industrie.

Ce dernier n’avait pas manqué de relever que «des superficies considérables accordées restent inexploitées, d’où la proposition d’un projet pour la récupération de ces terres et leur octroi aux investisseurs sérieux qui peuvent réaliser des projets à valeur ajoutée et assurer des postes d’emplois ».

Cette opération de récupération et de redistribution des assiettes foncières a déjà enregistré de fortes avancées dans plusieurs wilayas.

Sécurisation de l’offre foncière

Le dossier du foncier à affecter à l’investissement économique (dans les zones industrielles et dans les zones d’activités) a enregistré beaucoup de retard dans sa stabilisation juridique et dans sa viabilisation technique.

Aussi bien au sein des zones d’activité, de modestes dimensions, implantées dans les communes, que des zones industrielles qui s’étendent sur des centaines d’hectares, la procédure et le processus de mise à disposition du foncier économique ont longtemps pâti de certains impondérables techniques et de gestion qui ne sont pas sans conséquence sur les rythmes des investissements et sur leur durabilité.

Sur le plan de l’identification et de la mobilisation du foncier, des efforts avaient été accomplis par l’Agence nationale d’intermédiation et de régulation foncière (Aniref).

Néanmoins, la suite du processus, à savoir l’aménagement des zones industrielles et surtout le suivi de l’exploitation des assiettes par leurs attributaires, supposés être des investisseurs, avait posé beaucoup de problèmes.

Actuellement, le parc national des zones industrielles dispose de 113 zones industrielles occupant une superficie de 26.763 ha, dont près de 20.000 ha son aménagés.

Le reste est en cours d’aménagement, à l’image de la grande zone industrielle de Lachouaf, au sud de la wilaya de Bouira, d’une superficie de 795, 16 ha, dont 250 sont en cours d’aménagement.

Il est tout à fait logique que l’identification de ces zones soit soumise à des critères de choix prenant en compte un certain nombre de facteurs, à commencer par la nature de la propriété, censée relever du domaine privé de l’État, avec tout l’arsenal de la délimitation cadastrale.

Suivent les études d’impact environnemental et les études géotechniques du site choisi. Outre ces aspects par lesquels s’esquissent les premiers contours de ces zones, le choix du site obéit également au souci de la sécurité des installations et du personnel, la proximité avec les voies de desserte (routes, autoroutes, chemins de fer,…), les espaces à réserver à la circulation à l’intérieur même de ces infrastructures, et, enfin, la proximité des grands réseaux (adduction d’eau, assainissement, énergie électrique, raccordement au gaz, téléphonie et télécommunication).

Un segment majeur dans l’acte d’investir

Ce sont là, à grands traits, les critères et les repères sur lesquels se base le choix géographique de ces sites appelés « zones industrielles » et « zones d’activités » afin permettre au secteur industriel et aux petites et moyennes entreprises d’obtenir leurs assiettes foncières viabilisées et libérées de litiges fonciers qui, par le passé, avaient compromis bien des projets d’investissement. Incontestablement, l’assiette foncière constitue un élément majeur dans l’acte d’investissement à côté des capitaux financiers et des ressources humaines.

Pour ne n’avoir pas été intégré de manière sérieuse dans la stratégie industrielle nationale pendant les années de l’aisance financière, le foncier industriel avait joué un mauvais tour à la relance économique, supposée être bâtie sur la diversification des activités; et il a également découragé bien des volontés parmi ceux qui rares investisseurs animés par l’esprit d’entreprise, avaient, dans l’embrouillamini de ce qui est appelé la « isaba », tenté d’activer dans la production nationale.

Le foncier avait servi à certains faux investisseurs de favoriser leurs desseins spéculatifs, en dé- tournant les assiettes foncières de leur vocation initiale ou en abandonnant complètement leurs projets.

Le constat a été fait non seulement sur les sites destinés à l’investissement industriel, mais également dans certaines zones d’expansion et sites touristiques (ZEST), particulièrement au niveau de la bande littorale.

Même si, au cours de ces dernières années, des projets ont pu être lancés dans certaines activités de services et de transformation- notamment après des dizaines d’opération de dégel à travers plusieurs wilayas-, le rythme attendu pour créer de l’emploi et renflouer les caisses des communes par la fiscalité locale est encore loin du compte, d’autant plus que les taxes et redevances locales représentent plus de 90 % des ressources communales.

A.N.M.

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