En mars 2020, les ministres africains des finances ont appelé à un plan de relance de 100 milliards de dollars pour offrir aux gouvernements la marge de manœuvre budgétaire et les liquidités dont ils ont vraiment besoin. Une année après, quel bilan pourra être fait ?
La sous-secrétaire générale des Nations Unies et conseillère spéciale pour l’Afrique, Christina Duarte, estime que l’Afrique devrait embrasser une nouvelle approche du financement du développement, une approche qui sera comme un levier de ses systèmes et ses institutions afin d’améliorer au plus vite possible la mobilisation des ressources nationales pouvant financer l’essentiel de son développement et redresser sa situation.
En expliquant cette nouvelle approche, Mme Duarte déclare que «le défi de l’Afrique n’est pas l’absence de liquidités ou de fonds pouvant financer son développement. Ses problèmes résultent de flux financiers illicites massifs qui drainent les capacités de financement et le manque d’appropriation des ressources naturelles, associés à toute une histoire construite autour de la gestion de la pauvreté plutôt que du développement, et décrivant l’Afrique comme un continent pauvre ayant besoin de l’aide à tout moment de la communauté nationale.»
L’Afrique perd ainsi 89 milliards de dollars par an, soit environ 3,7% de son produit intérieur brut (PIB) en flux financiers illicites, selon les chiffres avancés par la conférence des nations Unies sur le commerce et le développement (CNUDEC).
L’organisation indique que la réduction de ces flux pourrait permettre au continent de conserver des fonds substantiels qui pourraient être affectés à la lutte contre la pandémie de Covid-19 et au développement.
Une nouvelle approche est nécessaire
Mme Duarte qui dirige le bureau du conseiller spécial pour l’Afrique des nations Unies (OSAA) qui travaille avec l’UA et d’autres institutions multilatérales pour assurer un soutien cohérent au continent, estime que les pays africains, ainsi que les systèmes financiers et multilatéraux internationaux, doivent changer leur approche du financement du développement en Afrique. Cela implique de passer d’un paradigme essentiellement axé sur la gestion de la pauvreté à une approche de gestion du développement.
L’approche de la gestion de la pauvreté se focalise sur l’allégement de la dette et l’aide publique au développement (APD), considérés comme les principaux outils de financement du développement, à contrario de l’approche de la gestion du développement qui se concentre davantage sur la mobilisation des ressources intérieures comme moyen fondamental de garantir un financement durable. Cette dernière est plus perpétuelle et contribue à préserver l’appropriation de leurs ressources par les pays en développement.
«Les pays africains ont la responsabilité de construire le nouveau récit de l’Afrique en changeant la façon de penser et en ne comptant plus sur l’aide extérieure, qui est très nécessaire, mais en s’appuyant d’abord sur les capacités et les compétences intérieures et nationales»,déclare Mme Duarte.
Lutte contre la corruption, la fraude fiscale et les flux financiers illicites
Il faut ajouter que la lutte contre la corruption, la fraude fiscale et les flux financiers illicites sont les pierres angulaires d’une mobilisation réussie des ressources intérieures. Les dirigeants africains doivent également honorer les engagements pris dans le cadre du programme d’action D’Addis-Abeba de la troisième conférence internationale sur le financement du développement, notamment pour réduire sensiblement les flux financiers illicites, lutter contre la fraude fiscale et la corruption, réduire le coût des transferts de fonds et soutenir d’autres efforts visant à renforcer la mobilisation des ressources nationales.
Cette nouvelle façon de penser signifie également un changement dans la perception de l’Afrique en tant que continent bénéficiaire de l’aide, qui devient une partie prenante et un acteur clé sur la scène mondiale, avec les mêmes droits et statuts que toute autre région au sein des Nations Unies et d’autres organisations internationales.
Flory Musiswa
Ce nouveau paradigme est vraiment nécessaire maintenant, avec une nouvelle approche offensive du développement .