Sonatrach a déclaré, dimanche dernier, être prête à fournir davantage de gaz à l’Europe, en l’acheminant, notamment, via le gazoduc Transmed reliant l’Algérie à l’Italie. Ce dernier pays, faut-il le préciser, dépend à 45% du gaz importé de Russie. Toufik Hakkar, le Pdg de Sonatrach, a rappelé que l’Europe est le «marché naturel de prédilection» pour l’Algérie, contribuant à hauteur de 11% à ses importations de gaz. Dans ce contexte de crise entre la Russie et l’Ukraine, l’Italie est, quelque peu privilégiée, étant donné ses investissements chez nous et ses liens historiques avec notre pays.
Par Réda Hadi
Une délégation du groupe énergétique italien ENI était à Alger ce dimanche 3 avril,
pour entamer des discutions avec le groupe Sonatrach, dans le cadre de la coopération énergétique entre les deux pays, et particulièrement, pour un réapprovisionnement en gaz de l‘Italie.
Le géant italien dispose d’importants investissements en Algérie mais on ne peut pas dissocier la visite en cours des tensions mondiales sur le gaz depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine. L’Algérie est parmi les alternatives envisagées pour le remplacement du gaz russe par l’Union européenne, grâce à ses réserves et ses gazoducs qui desservent directement les côtes sud de l’Europe. Deux pays, l’Italie et l’Espagne, sont particulièrement intéressés par l’augmentation des livraisons algériennes via ces gazoducs. Avant même le début de la guerre en Ukraine, on a assisté à un bal diplomatique des responsables de ces deux pays pour convaincre Alger de fournir plus de quantités.
Le 28 février, le ministre italien des Affaires étrangères Luigi Di Maio s’est rendu à Alger pour le même objectif. Si les choses se sont corsées entre-temps avec l’Espagne à cause de son revirement sur la question du Sahara occidental, ça se passe nettement mieux avec l’Italie.
Le PDG de Sonatrach, Toufik Hakkar qui donc rencontré, dimanche à Alger, le PDG du groupe italien Eni, Claudio Descalzi, a évoqué avec lui les moyens de renforcer le partenariat entre les deux groupes
Les choses semblent s’accélérer avec l’Italie, qui veut diminuer sa dépendance au gaz russe, et ce, d‘autant plus que l’Italie, de par ses positions géostratégique et ses investissements dans notre pays, occupe une place privilégiée par rapport à l‘Espagne, qui le 18 mars dernier, a annoncé son soutien au plan d’autonomie marocain, un revirement dénoncé à Alger comme une «deuxième trahison» du peuple sahraoui
Selon une source non nommée par journal espagnol El Confidencial «les répercussions pourraient être aussi énergétiques car l’Algérie respectera ses engagements en matière de livraison des quantités contractuelles de gaz pour honorer sa signature en relation avec les clauses contractuelles, tout en prévoyant la révision périodique des prix en fonction de l’évolution des prix du marché »
«L’Algérie modulera ses relations en direction de certains partenaires de l’Europe du sud qui ont investi en Algérie et qui entretiennent d’excellentes relations traditionnelles avec notre pays» a déclaré Tewfik Hakkar dans un entretien à l’agence APS, samedi 2 avril.
Renforcement de la coopération bilatérale
Le ministre italien des Affaires étrangères Luigi Di Maio s’est déjà rendu en Algérie pour discuter avec son homologue d’une augmentation des fournitures de gaz pour compenser une éventuelle baisse côté russe. «nos discutions portent sur le renforcement de la coopération bilatérale, en particulier pour répondre aux besoins en matière de sécurité énergétique européenne, à la lumière du conflit en Ukraine», a tweeté M. Di Maio peu après son arrivée à Alger
Nabil Djemaa expert judiciaire en opérations financières estime pour sa part« l’Algérie dispose du gaz et ENI va investir. Mais vu le manque d’investissements durant 7 ans, rattraper le retard ne sera pas chose aisée. Il faut dire pour l’histoire que l’Italie, et à travers elle, l’Europe, aurait pu connaître une situation plus difficile si elle n’avait pas renouvelé, le 16 mai 2019, le contrat de vente/achat de gaz naturel à long terme destiné au marché italien. En vertu de cet arrangement, Sonatrach et l’Office d’hydrocarbures italien «ENI» se sont engagés à le prolonger jusqu’en 2027, soit 10 ans de plus avec une option de deux années supplémentaires jusqu’en 2029. Cet accord, qui date de 1977, venait à expiration en septembre 2019»
Par-delà ces éclairages, c’est dans cet esprit qu’il importe de comprendre les propos faits ces derniers jours par le chef du gouvernement italien Mario Draghi. Tout en regrettant les mauvais choix du passé, il a déclaré que «l’Italie compte diversifier au plus vite ses sources d’énergie pour réduire sa dépendance au gaz russe».
Avant le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le gaz algérien a été cité parmi les alternatives à la dépendance de l’Europe au gaz russe. La Russie fournit plus de 40% des besoins en gaz de l’Europe et l’Algérie 11%.
R. H.