Lorsque, la semaine dernière, le ministre de l’industrie a dit niet à des opérateurs économiques sollicitant la création d’une nouvelle zone d’activités pour accueillir des investissements industriels dans la wilaya de Blida, les regards sont vite braqués sur cette nouvelle volonté du gouvernement à faire le ménage dans l’affectation du foncier aux secteurs économiques selon l’ordre de priorité.
Par Mohamed Naïli
A Blida justement, où les services agricoles de wilaya se sont opposés à la création de cette nouvelle zone d’activités, le membre du gouvernement a précisé : « La protection des terres agricoles dans la Mitidja est une priorité (…) Le foncier n’est pas forcément à Blida mais dans d’autres wilayas », avant d’inviter les porteurs de projets à caractère non agricole à se diriger vers les zones industrielles de Boughezoul, Boukadir, Aïn Defla, entre autres, où des assiettes foncières sont disponibles, selon lui.
Néanmoins, orienter les investisseurs potentiels vers ces pôles appelés zones industrielles ou zones d’activités n’est pas une fin en soi, même si chaque wilaya en dispose en bon nombre. Pour preuve, quelques jours seulement après sa visite à Blida, le premier responsable du Département de l’industrie, Ahmed Zeghdar, a dû le constater, ce lundi, dans la wilaya de Boumerdès, où le parc industriel de Larbatache est dans un état on ne peut plus désolant.
Levée des contraintes
Dans cette zone, sise à la sortie ouest de la wilaya de Boumerdès et dont la création remonte à plus de dix ans dans le cadre du projet du gouvernement de l’époque comprenant la création de 50 zones industrielles de grande envergure à travers les quatre coins du pays, il faut noter que les fonds qui y sont consommés pour sa viabilisation se chiffrent en dizaines de milliards, mais plus de 10 ans plus tard, ce vaste terrain de près de 140 hectares tarde encore à donner l’apparence de parc industriel que les initiateurs du projet ont voulu lui imprimer. A présent, sur les 250 entreprises attendues dans ce site, quatre porteurs de projets seulement ont lancé les travaux de réalisation. La raison ? Les travaux de viabilisation ne sont pas achevés. « Comment parler de zone industrielle alors que les raccordements aux réseaux d’électricité, gaz ou d’évacuation des rejets ne sont pas encore faits ? », s’interroge un investisseur qui attend depuis des années pour lancer son projet à Lartabache et qui a préféré rester anonyme par crainte d’éventuelles « déconvenues supplémentaires au niveau de l’administration », comme il le dit.
Sur place, les ministres de l’Industrie et de l’Energie ont promis lors de leur déplacement sur les lieux lundi dernier de régler tous les problèmes qui y perdurent avant la fin de l’année en cours. Mais, pour les membres de l’association des opérateurs économiques de Boumerdès cela risque de s’apparenter à « l’arbre qui cache la forêt ».
Dans la wilaya voisine, Tizi-Ouzou, l’état des sites destinés à l’activité industrielle est similaire à ce qui prévaut à Boumerdès. Sur les bureaux de l’Exécutif local, pas moins de 33 projets sont en attente de « la levée des contraintes » pour leur lancement dans différentes zones d’activités à travers le territoire de la wilaya. Pour tenter de mettre fin à ces blocages d’ordre administratif, le wali de Tizi-Ouzou s’est déplacé avant-hier mardi dans les régions de Fréha et Tizi Rached où il a visité certains de ces projets, dont une unité de production de profilés en plastique comptant 67 salariés et une PME de production agroalimentaire.
Pour sa part, le directeur de l’industrie et des mines de la wilaya de Tizi-Ouzou, M. Madjid Banoun, a fait état d’une commission spéciale installée récemment par le wali et qui doit se réunir chaque semaine pour étudier les dossiers et identifier les éventuels blocages. « A présent, la levée de ces contraintes a concerné 19 projets, dont 15 viennent d’être lancés, pour plus de 1 000 postes d’emploi directs à créer ».
Récupération des excédents
A travers toutes les wilayas du pays, les opérateurs économiques font part d’obstacles, principalement d’ordre bureaucratique, qu’ils rencontrent pour accéder aux zones industrielles.
Au niveau de l’administration en revanche, le défi est de garantir l’occupation effective et la gestion rationnelle de ces espaces. Pour ce faire, le ministère de tutelle place en priorité la récupération des assiettes attribuées et non exploitées. Au mois de mars dernier, le ministre de tutelle, Ahmed Zeghdar, a fait état de la récupération de pas moins de 1 200 hectares répartis en 3 000 lots au niveau des zones industrielles, gérées par l’ANIREF, et zones d’activités, gérées par le groupe Divindus affilié au ministère de l’Industrie et les agences foncières de wilayas.
Outre les lots inexploités au niveau desdites zones, le ministre vient d’annoncer aussi une nouvelle procédure de récupération des excédents fonciers attribués dans le passé aux entreprises publiques pour leur réaffectation à de nouveaux projets tout en assurant que, à travers sa démarche, « dorénavant, chaque projet sera bien étudié et le foncier industriel sera attribué de manière rationnelle. Un projet qui nécessite un hectare ne se verra pas attribuer deux hectares », a-t-il déclaré jeudi dernier à partir de Blida.
Si elle s’applique sur le terrain comme elle est conçue, cette nouvelle approche contribuera à coup sûr à remettre de l’ordre dans l’affectation des assiettes foncières selon la vocation de chaque région et de chaque site.
M. N.