Le Ramadhan 2021 n’a pas dérogé à la règle des années précédentes, notamment en ce qui concerne la flambée des prix. Au contraire, cette hausse a connu une deuxième vague durant le troisième jour de ce mois sacrée, notamment pour les viandes blanches et la pomme de terre, ayant atteint les 100 DA/kg.
Akrem R.
Une situation qui s’explique par le dysfonctionnement du marché national, d’une part, et par l’interférence des pouvoirs du contrôle et de la régulation entre le ministère de l’Agriculture et celui du Commerce, d’autre part, dira Mustapha Zebdi, président de l’Association de protection de consommateurs (APOCE). Lors de son passage au forum d’El Wassat, M. Zebdi a souligné également que les autorités de régulation ne maitrisent pas les «coulisses» du marché.
« Nous, en tant qu’association de protection des consommateurs, nous trouvons anormale que les mécanismes de régulations appartiennent au ministère de l’Agriculture et que les mécanismes de contrôle se trouvent au ministère du Commerce. Ceci engendre un dysfonctionnement au niveau des marchés. La poudre du lait est importée par le ministère du l’Agriculture, alors le contrôle se fait par le ministère du Commerce. Même chose pour les viandes rouges, et les bananes. Nous estimons que le ministère de l’Agriculture est appelée à développer la production agricole, tout en laissant le contrôle au ministère du Commerce qui possède les moyens de contrôle et qui connait mieux la réalité du marché», a -t-il détaillé. Dans le même contexte, Mustapha Zebdi a appelé à la révision et l’amendement d’une série de lois et circulaires.
D’ailleurs, des propositions ont déjà été faites par l’association dans le cadre des réformes en cours visant la moralisation de l’activité commerciale. S’agissant des recommandations pour lutter efficacement contre la spéculation, un phénomène qui bat son plein durant ce mois sacré, M. Zebdi a estimé que la solution passe inéluctablement par la limitation de la marge bénéficiaire de certains produits alimentaires. «Ce sont les producteurs et agriculteurs qui doivent fixer le prix à la vente de certains produits, à l’instar de la pomme de terre, tomate et autres produits», a-t-il suggéré.
Outre la limitation de la marge bénéficière, le président de l’APOCE a demandé la suppression de la TVA qui est de l’ordre de 19% pour certains produits de large consommation, tout en relevant que cette taxe va directement vers les producteurs et que l’Etat n’en est pas bénéficière. Afin d’étayer sa proposition, Zebdi a rappelé que plusieurs pays recourent à cette pratique, dans le but de préserver le pouvoir d’achat des citoyens. « Comment assujettir au même taux de la TVA celui qui achète de l’huile de table et celui qui achète du caviar ?» s’est-il interrogé.
Évoquant la tension que connait le lait en sachet, l’intervenant a noté que cette crise n’est pas nouvelle et que le problème se pose au niveau du contrôle et chaine de la distribution.
Nécessité d’une cartographie nationale du produit
«Les mécanismes de contrôle et de régulation doivent être changés. Les 100 contrôleurs de l’ONIL ne peuvent pas assurer un contrôle efficace, mais si on les mettait sous la tutelle du ministère du Commerce avec ces 9 000 agents de contrôle, le mécanisme fonctionnera mieux», a-t-il expliqué, en plaidant pour la réforme du système de la subvention. « Tous les produits subventionnés connaissent des perturbations. Pour cela, nous demandons de revoir cette politique en ciblant directement les nécessiteux», a-t-il affirmé. Questionné, par ailleurs, sur la culture du consommateur algérien, dont le gaspillage est le maitre mot, Zebdi a répondu que son association vise la promotion d’une culture de consommation saine et rationnelle, tout en reconnaissant que le chemin est encore long. «Le consommateur peut réguler le marché, en rationalisant ses achats et sa consommation», a-t-il ajouté.
Par ailleurs, le président de l’APOCE a appelé à l’ouverture de l’investissement aux différents opérateurs économiques, ce qui permettra de promouvoir et de développer l’économie nationale. Ainsi, ajoute-t-il, c’est à travers l’investissement créateur de richesses et valeur ajoutée qu’on peut lutter efficacement contre le phénomène du monopole et de la spéculation. Toutefois, l’intervenant a déploré l’absence de statistiques claires sur les niveaux de la production nationale. « Nous avons besoins d’une cartographie nationale pour la production. Sans cela on ne peut pas réguler le marché», a-t-il conclu.
A. R.