La 32ème réunion ministérielle des pays OPEP-non OPEP (OPEP+), qui examine la situation du marché pétrolier international et ses perspectives d’évolution à court terme, le cours du pétrole a été coté le 04 septembre 2022 à 93,28 dollars le Brent et à 87,25 dollars le Wit pour un cours de 1,01 dollar un euro
Par Abderrahmane MEBTOUL
Professeur des universités
Expert international
Les 13 pays membres de l’OPEP sont: l’Arabie saoudite, l’Irak, les Émirats arabes unis, l’Iran, le Koweït, le Nigéria, la Libye, l’Algérie, l’Angola, le Venezuela, le Congo, le Gabon, et la Guinée équatoriale. Les 10 autres pays producteurs réunis au sein de l’OPEP+ mais non membres de l’OPEP sont: la Russie, le Mexique, le Kazakhstan, Oman, l’Azerbaïdjan, la Malaisie, Bahreïn, Brunéi, le Soudan et le Soudan du Sud. Précisons que 3 pays de l’OPEP sont exemptés d’un effort de réduction de leur production, à savoir l’Iran, la Libye et le Venezuela.
Lors de leur dernière réunion en avril 2021, les 20 autres pays au sein de l’OPEP+ se sont engagés à limiter leur production cumulée de pétrole brut à 37,3 Mb/j en mai 2021, soit près de 15% de moins que leur «production de référence» (niveau d’octobre 2018, sauf pour l’Arabie saoudite et la Russie, pays pour lesquels la production «de référence» est fixée à 11 Mb/j).
Rappelons que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés, désignés sous le nom Opep+, ont décidé, lors de leur 30ème réunion ministérielle une augmentation mensuelle de 400.000 barils/jours avant de passer à 432.000 barils/jour, puis 648.000 barils/j. Les quotas de production pour août 2022 pour chaque pays participant à l’accord de coopération de l’Opep+, selon le communiqué final en unités mille barils/jour) sont les suivants: -Algérie, 1.055 -Angola , 1.525 –Congo, 325 -Guinée équatoriale, 127 –Gabon, 186 –Irak, 4.651 -Kuwait , 2.811 –Nigeria, 1.826 -Arabie Saoudite, 11.00 -Emirats arabes unis , 3.179 -Azerbaïdjan,717 –Bahreïn,205 -Brunai ,102 –Kazakhstan,1.706 -Malaisie ,594 -Mexique ,1.753 –Oman,881 -Russie ,11.004 -Soudan , 75 et Soudan du sud 130. Ce qui donne 26,6859 pour les pays OPEP et 17,165 pour les Non OPEP présent à la conférence, donc un total OPEP+ de 43,854 sur une estimation pour 2022, selon l’Agence internationale de l’Énergie. Le plus grand producteur mondial reste les Etats Unis d’Amérique, plus de 11 millions de barils jour, grâce au pétrole et gaz de schiste, sur une production totale de 99,7 millions de barils/j projection pour 2022 et si cette tendance devrait aussi se maintenir pour l’année 2023, 101,8 millions de barils/j. Avec 71,5% des réserves mondiales, les pays du Moyen-Orient appartenant à l’OPEP représentent une part de marché dans la production mondiale estimée à 41%, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) étant un acteur central du marché pétrolier.
Ainsi, il est prévu 842 milliards de dollars de revenus bénéficiant de cours élevés et de volumes en hausse. Et sans compter les importants bénéfices des autres membres non OPEP, où pour la Russie par exemple, selon une étude de l’Institut Montaigne de juin 2022 , les ventes de pétrole russe ont atteint 179 milliards de dollars en 2021, contre 62 milliards pour le gaz, et si l’augmentation des cours de l’or noir devrait encore accroître les recettes en 2022 où à 100 dollars le baril en moyenne, celles-ci s’élèveraient à 306 milliards de dollars, soit 18% du PIB russe.
Les tensions énergétiques concernent également le gaz du fait des tensions en Ukraine et de la stratégie de Gazprom (l’Europe dépendant de plus de 40% du gaz russe), prix déconnecté du cours du pétrole, le cours fin août 2022 ayant dépassé les 300 euros le mégawattheure. Précisons que les réserves pétrole-gaz sont fonction à la fois du coût et du vecteur prix international, plus le prix est élevé plus certaines réserves marginales deviennent rentables.
Quels sont les sept déterminants du cours des hydrocarbures?
Premièrement, l’élément central de la détermination du prix du pétrole est la croissance de l’économie mondiale et les tensions géostratégiques, facteur déterminant du cours du pétrole. Aucun expert ne pouvant prévoir au-delà de 2025, du fait d’importantes nouvelles mutations du modèle de consommation énergétique. Pour le court terme en raison des tensions géostratégiques, la Russie et l’Ukraine représentent 30% des exportations alimentaires mondiales, peuvent créer une véritable crise alimentaire, source de déstabilisation de bon nombre de pays notamment africains.
Les tensions en Ukraine ont exacerbée les tensions énergétiques avec un taux d’inflation élevé dans la zone euro, aux États-Unis, l’inflation devant atteindre en 2022 environ 6,6% dans les pays avancés et 9,5% dans les pays émergents et les pays en développement, ce qui a provoqué un durcissement des conditions financières mondiales et s’étant étendue à de nombreux pays sous l’effet des tensions sur les prix provoquées par les perturbations des chaînes d’approvisionnement et une pénurie de main-d’œuvre historiquement forte.
Selon la banque mondiale l’Europe, nous devrions assister à une baisse de la croissance en 2022 des trois locomotives de l’économie mondiale à savoir les USA, la Chine et l’Europe. Selon les prévisions de la BM, la croissance globale devrait ralentir, passant de 6,1% en 2021 à 3,2% en 2022, soit 0,4 point de pourcentage de moins que prévu dans l’édition d’avril 2022. Deuxièmement, le respect des accords de l’OPEP+ en n’oubliant pas que trois pays ne sont pas soumis aux quotas à savoir le Venezuela, l’Iran, et la Libye. Le retour sur le marché de la Libye, sous réserve d’une stabilisation politique à, 42 milliards de barils de pétrole, plus de 1500 milliards de mètres cubes gazeux, pour une population ne dépassant pas 6,5 millions d’habitants, pouvant aller facilement vers 2 millions de barils/jour, de l’Irak avec 3,7 millions de barils jour, réservoir mondial à un coût de production inférieur à 20% par rapport à ses concurrents, pouvant aller vers plus de 8 millions/jour et surtout l’Iran s’il y a accord sur le nucléaire avec la nouvelle administration américaine ayant des réserves de 160 milliards de barils de pétrole lui permettant facilement d’exporter entre 4/5 millions de barils jour de pétrole et ayant le deuxième réservoir de gaz traditionnel mondial, plus de 30.000 milliards de mètres cubes gazeux derrière la Russie( 45.000) et avant le Qatar (environ 20.000) sans compter qu’il aura alors accès aux quelques 100 milliards de dollars bloqués dans les banques étrangères, qui pourront augmenter ses exportations et attirer les investissements étrangers.
Troisièmement, du côté de l’offre, nous assistons à une hausse plus rapide que prévu de la production de pétrole (non conventionnel) des USA qui a bouleversé toute la carte énergétique mondiale. Les gisements de pétrole et gaz de schistes moyens américains, la rentabilité est entre 60 dollars pour les petits gisements, 40 dollars pour les gisements moyens et pour les grands gisements 30 dollars. Les Etats-Unis, importateur par le passé, sont devenus le plus grand producteur de pétrole brut devant l’Arabie Saoudite et la Russie. Selon The Telegraph, les Etats-Unis devraient pénétrer fortement le marché mondial avec des quantités sans précédent de gaz naturel liquéfié (GNL) 30 projets sont en cours de réalisation, grâce au gaz et le pétrole de schiste pesant ainsi sur le marché mondial du GNL.
Quatrièmement, la stratégie expansionniste russe pour le gaz (45.000 milliards de mètres cubes gazeux de réserve) qui pour lever les sanctions s’orientent vers l’Asie avec deux gros consommateurs d’hydrocarbures à savoir l’Inde et la Chine où Russie a ouvert de nouveaux gisements en Sibérie dont le fameux gazoduc Sibérie Chine.
Cinquièmement, les nouvelles découvertes dans le monde notamment en offshore notamment en Méditerranée orientale (20.000 milliards de mètres cubes gazeux expliquant en partie les tensions au niveau de cette région), et en Afrique dont le Mozambique qui pourrait être le troisième réservoir d’or noir en Afrique et en n’oubliant l’important gisement qui est rentré en production au Kazazthan fin 2016.
Sixièmement, la crise énergétique actuelle combinée aux dangers du réchauffement climatique où, selon le rapport de l’ONU, une sécheresse sans précédent frappera l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne entre 20205/2030, posant la problématique de l’eau et de la sécurité alimentaire, poussent les grands pays Inde, Chine, USA Europe à accélérer la transition énergétique étant prévu sur les 30 prochaines années 4000 milliards de dollars d’investissement dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, avec une prévision de réduction de 30/40% de la consommation des énergies fossiles horizon 2030, l’énergie de l’avenir horizon 2030/2040 étant l’hydrogène où la recherche développement connaît un réel essor.
Car si les chinois, les indiens et les africains avaient le même modèle de consommation énergétique que les USA et l’Europe il faudrait cinq fois la planète actuelle. Septièmement, l’évolution des cotations du dollar et l’euro, toute hausse ou baisse du dollar, pouvant entraîner un écart de 10/15% ainsi que l’évolution des stocks américains et souvent oubliés les stocks chinois.
Quelle conclusion tirer pour l’Algérie?
Sans bonne gouvernance et de profondes réformes structurelles, l’Algérie restera éternellement dépendante de cette ressource éphémère. En cette période difficile de tensions budgétaires, personne n’ayant le monopole de la vérité et du nationalisme, l’Algérie doit mobiliser tous ses enfants sans exclusive, favoriser le dialogue productif, éviter les dissensions inutiles ou pouvoir, opposition et experts non organiques, doivent contribuer au redressement national.
Une croissance faible, inférieure au taux de croissance démographique, peut avoir des répercussions tant nationales, sociales, politiques que géostratégiques au niveau de la région existant un lien dialectique entre sécurité et développement. Évitons de fonder une politique économique sur des modèles économétriques appliqués aux pays développés déconnectés des réalités nationales.
Devant l’ex premier ministre et les membres de son gouvernement dans ma conférence au Club de Pins le 26 novembre 2014, dans plusieurs interviews données aux médias publics, privés nationaux et aux médias internationaux (voir www.google.com, Mebtoul 2014), j’avais proposé un comité de crise de crise chargé de proposer des mesures opérationnelles de réformes. Induit en erreur par certains experts et intellectuels organiques aux ordres, les responsables ne nous ont pas écoutés et nous en payons aujourd’hui les conséquences de cette imprévision. Car, les enjeux géostratégiques mondiaux, le nouveau modèle de consommation devraient faire émerger un nouveau pouvoir mondial à l’horizon 2030.
L’Algérie doit profiter de cette conjoncture particulière pour asseoir une économie hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales supposant un renouveau de la gouvernance et la valorisation du savoir loin des logiques rentières suicidaires, corruption et dépenser sans compter. D’où l’importance de profondes réformes tant politiques, sociales, qu’économiques. Un bon développement allège le poids sur les forces de sécurité ; un frein au développement par une mauvaise gouvernance accroît les tensions sociales et donc l’insécurité.
L’Algérie n’a pas d’autres choix: réussir les réformes qui seront douloureuses à court terme mais porteuses d’espoir à moyen et long terme pour les générations présentes et futures, possédant toutes les potentialités pour réussir. Ou rester en statut quo en retardant les réformes structurelles avec le risque sans correction de l’actuelle politique économique d’accélérer la crise économique et sociale ce qu’aucun patriote ne souhaite. J’ose imaginer une Algérie où les nouvelles générations vivront confiantes et heureuses dans leur pays et où nous assisterons à un retour volontaire progressif des cadres expatriés. Aussi, l’Algérie qui a d’importantes potentialités sera ce que le peuple algérien et les responsables chargés de gérer la Cité voudront qu’elle soit.
ademmebtoul@gmail.com