Face aux changements climatiques : Les agro-pasteurs adoptent de nouvelles stratégies  

Les effets du changement climatique se sont accentués au cours des dernières décennies en Algérie, entraînant des conséquences importantes sur les systèmes de production.

Synthèse Akrem R. 

C’est le cas notamment dans la steppe, où l’agro-pastoralisme dépend fortement de la pluviométrie. À partir d’une enquête de terrain sur 60 personnes, une étude placée sous le thème : « Les stratégies d’adaptation des agro-éleveurs de la steppe algérienne face au changement climatique (cas de la région de Ras El Ma à Sidi Bel Abbés)» a mis en évidence les pratiques adoptées par les agro-pasteurs de la région de Ras El Ma pour s’adapter aux évolutions du climat et les stratégies diversifiées mises en place aussi bien à court terme qu’à long terme.

C’est à travers ces voies d’adaptation que les éleveurs de Ras El Ma reconstituent leur capital productif au cours des crises environnementales. Mais avec une réussite inégale selon les moyens de production détenus par les éleveurs. Les résultats de l’étude montrent que les petits éleveurs sédentaires sont beaucoup plus vulnérables au changement climatique que les gros éleveurs transhumants.

Pour faire face à cette vulnérabilité accrue, les agro-pasteurs de Ras El Ma ont mis en œuvre de multiples stratégies pour développer des mesures d’adaptation dans presque tous les domaines de leurs systèmes de production et ce, en fonction de leurs moyens et de la contribution de l’État, ainsi que des partenaires du développement comme les grands propriétaires fonciers ou les banques.

Dans ce contexte, deux types de stratégies sont adoptés par les éleveurs, à court terme la décapitalisation sous diverses formes et à long terme la relance de leurs activités par la reconstitution du capital et la revalorisation du potentiel productif.

Ces stratégies d’adaptation, indispensables au maintien des systèmes de production pastoraux steppiques montrent une certaine efficacité en permettant d’atténuer la vulnérabilité des éleveurs face aux aléas et aux risques climatiques, mais avec des résultats différents selon les types d’éleveurs, ce qui contribue à renforcer les inégalités socio-économiques préexistantes.

En effet, ces stratégies diversifiées ont permis aux plus nantis (les transhumants, ainsi que dans une moindre mesure les semi-sédentaires) de rentabiliser leurs exploitations et de se procurer des revenus additionnels suite aux sécheresses. Cela s’explique par plusieurs facteurs. Tout d’abord, le foncier permet à la fois une souplesse et une complémentarité spatio-temporelle particulièrement durant les périodes difficiles. 

Ensuite, les moyens matériels nouveaux (bétaillères, camions-citernes, téléphones portables) détenus par les gros éleveurs sont nécessaires à une bonne réactivité face aux contraintes environnementales ou sociales.

De plus, les troupeaux représentent une capitalisation qui est le meilleur moyen d’agir pour réduire les risques liés aux incertitudes. Enfin, le capital humain représente un maillon essentiel chez les agro-pasteurs transhumants pour l’élaboration des stratégies d’adaptation grâce à l’importance des relations sociales et de la main-d’œuvre qualifiée.

En revanche, «on peut constater que les changements climatiques affectent davantage les plus démunis et les moins bien pourvus en moyens de production (foncier, moyens matériels, troupeaux et capital humain), à savoir les éleveurs sédentaires», indiquent les chercheurs.

En effet, pour cette catégorie d’éleveurs, les stratégies d’adaptation s’avèrent insuffisantes pour éviter leur paupérisation dans un contexte où ils restent très vulnérables face au contexte climatique et socio-économique.

En définitive, les stratégies d’adaptation multiples déployées par les éleveurs, quoiqu’innovantes et efficaces, montrent tout de même leurs limites et l’on peut s’interroger sur leur capacité à assurer une durabilité à la fois des ressources naturelles et des activités d’élevage.

Une réflexion s’avère nécessaire sur les moyens de renforcer leurs capacités à faire face au mieux à ces perturbations climatiques, notamment pour les petits éleveurs, en cherchant d’autres formes de gestion à développer en adéquation avec le profil spécifique de ces éleveurs particulièrement vulnérables, ce qui ouvre de nouvelles pistes de recherche.

A.R.

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