Alors qu’ils viennent de subir une véritable saignée durant cette saison estivale, avec les dépenses des vacances (pour ceux qui en ont été en mesure de se les offrir), de l’Aïd El Adha et fêtes familiales diverses, les ménages algériens s’apprêtent à affronter la rentrée dans des conditions non moins difficiles, voire dans la douleur, notamment pour les faibles bourses.
Par Mohamed Naïli
Sous l’effet d’une inflation débridée, les appels se multiplient ces derniers jours pour attirer l’attention des pouvoirs publics sur la nécessité de prévoir des mesures supplémentaires pour venir en aide aux familles vulnérables et les accompagner à faire face aux charges dues à la rentrée sociale de septembre prochain.
Les regards sont tournés ainsi vers les préparatifs de la rentrée scolaire qui s’annonce particulièrement difficile cette année, avec des fournitures scolaires notamment qui viennent d’enregistrer des hausses des prix atteignant les 150% pour certains articles, comme les cahiers et tous les produits de papeterie, des hausses que les importateurs et grossistes viennent de justifier par la hausse des cours du papier sur le marché mondial, à l’instar de nombreuses autres matières premières.
Afin de venir à la rescousse des ménages à faibles et moyens revenus et leur permettre d’assurer une rentrée scolaire sereine à leurs enfants scolarisés, les associations de défense des droits de consommateurs et celles des parents d’élèves viennent de lancer un appel à l’endroit des pouvoirs publics pour procéder à la révision à la hausse de l’allocation de scolarité attribuée à la rentrée des classes de chaque année.
Dans le même sens, l’association de protection et d’orientation du consommateur (APOCE), par la voix de son président, Mustapha Zebdi, vient d’appeler les autorités sectorielles concernées à «réviser les allocations familiales mais aussi la bourse scolaire» qui, à leur niveau actuel, «n’arrivent plus à servir pour la couverture des dépenses que nécessitent les achats de la rentrée scolaire», du fait de l’inflation qui ne cesse de monter et entraine la hausse des prix de tous les produits sans distinction.
Pour l’association nationale des parents d’élève, l’augmentation de la bourse scolaire est devenue «une nécessité absolue pour couvrir les besoins des élèves, notamment ceux issus des familles fragiles». En outre, l’association demande aussi «le versement de la bourse en question avant la rentrée des classes afin d’aider les familles à faire les achats de fournitures scolaires et des autres articles dont les enfants auront besoin dans la tranquillité, et ne pas attendre le mois de novembre ou décembre pour la verser».
Des hausses de prix inédites
Il est utile de noter que depuis son instauration, l’allocation de scolarité n’a été révisé qu’une seule fois, il y a plusieurs années, en passant de 3.000 à 5.000 DA par enfant scolarisé et versée au courant du premier trimestre de chaque année scolaire.
A son niveau actuel, l’allocation de scolarité en question est loin d’être une panacée pour les parents d’élèves, notamment dans une conjoncture comme celle de cette année où, sous l’effet d’une inflation généralisée, aucun produit n’échappe à la spirale de flambée jusqu’à atteindre les fournitures scolaires. A cet égard, comme nous venons de le constater à titre d’exemple, un cahier de 96 pages vendu jusqu’ici à 40 DA est affiché à 90 DA en prévision de la rentrée qui approche, soit une hausse de 125%.
Outre la reprise des classes, c’est la rentrée sociale dans son ensemble qui constitue une préoccupation pour les pouvoirs publics. Pour prévenir toute éventuelle grogne ou la résurgence des revendications socioprofessionnelles au sein des différents secteurs d’activité, la promesse du chef de l’Etat de procéder à une augmentation des salaires conséquente dès le début de l’année 2023 est certes susceptible d’apaiser un tant soit peu les tensions et calmer le front social, mais avant d’arriver à cette échéance, la rentrée sociale approche dans un climat de nette détérioration du pouvoir d’achat des ménages.
Décrivant le climat dans lequel se prépare la rentrée de cette année, l’économiste Kamel Kheffache estime qu’elle «sera difficile, surtout au regard de l’inflation et de l’augmentation des prix de tous les produits, y compris ceux des fournitures scolaires». Elle sera donc «difficile pour les chefs de famille à moyen et faible revenus qui feront face à d’importantes dépenses, notamment l’achat des fournitures scolaires. Elle sera d’autant plus ardue pour les familles nombreuses qui ont plusieurs enfants scolarisés».
Interrogé sur le rôle que pourront jouer les pouvoirs publics pour atténuer les tensions sur les chefs de famille, le consultant en économie estime qu’«ils peuvent intervenir en octroyant des aides sociales à travers les collectivités locales et les écoles en direction des familles à faible revenu», en précisant que «l’Etat peut intervenir pour désamorcer la situation puisque les revenus du pays sont satisfaisants. En ce sens que l’Etat peut aider les familles nécessiteuses à faire face aux dépenses». Outre la rentrée scolaire, l’économiste n’écarte pas d’éventuels mouvements revendicatifs «dans les secteurs économiques».
Face à cette conjoncture, durant ces quelques jours qui précèdent la rentrée, les regards sont en tout cas tournés vers les pouvoirs publics pour espérer d’éventuelles mesures supplémentaires à même de soulager, ne serait-ce qu’en partie, des chefs de famille qui croulent sous le fardeau des charges sociales.
M. N.