Extension de la culture de l’olivier à Bouira : Du Djurdjura aux confins de la steppe

Extension de la culture de l’olivier à Bouira

Après une campagne oléicole plutôt morose, avec une production de 3,2 millions de litres, les producteurs d’huile d’olive de la wilaya de Bouira placent d’immenses espoirs dans la prochaine campagne pour faire oublier les chutes de production enregistrées au cours de ces dernières années. En effet, la production de l’huile d’olive a été divisée par trois entre 2020 et 2024 dans cette wilaya. Cette année, le retour des pluies, après une longue période de sécheresse augure d’une bonne récolte ; c’est ce qui se répète partout sur les bouches, aussi chez les agriculteurs et les propriétaires des ateliers de pressage (huileries), que chez les consommateurs ; ces derniers venant de différentes autres région du pays pour s’approvisionner en huile d’olive à partir de la wilaya de Bouira.

Par Amar Naït Messaoud

C’est que le territoire de Bouira possède une superficie oléicole importante, soit 37 321 ha, dont 28 000 sont en production. Ce parc oléicole compte plusieurs variétés, dont, principalement Chamlal et Azeradj.

L’olivier représente 85% de la superficie occupée par l’arboriculture sur le territoire de la wilaya (le reste étant composé de figuier, agrumes, fruits à noyaux et à pépins).

Le Parc d’huileries compte 235 unités, dont 43 traditionnelles, 86 semi-automatiques et 106 automatiques.Le litre d’huile a été cédé au cours de la dernière campagne, entre 800 et 900 dinars. Certains gérants d’huileries se disent « pénalisés » par ce prix dans un marché plombé par l’inflation dans toutes ses composantes.

« On n’arrive plus à comprendre ce qui se passe. La facture d’électricité a atteint trente mille dinars pour mon unité de pressage », déplore le gérant d’une huilerie.

Les pluies de cette année ont fait naître l’espoir d’un relatif retour à la « normale » de production. La production optimale, avec les moyennes enregistrées au cours des vingt dernières années, serait 9 à 10 millions de litres.

En 2020, il y a eu même une première opé- ration d’exportation de l’huile d’olive de M’Chedallah, à l’est de la wilaya, vers la France, la Belgique et le Royaume-Uni.

La quantité est certes modeste- 20 000 litres-, mais cela montre les grandes potentialités de la région en matière d’oléiculture et qui, sur le plan du professionnalisme et des modes de conduite, ne sont pas encore toutes exploitées.

L’oliveraie de la wilaya de Bouira, c’est d’abord ce mythique espace du piémont du Djurdjura, sur la vallée du Sahel. C’est la continuité naturelle de l’oliveraie de la moyenne Soummam, relevant de la wilaya de Béjaïa (le couloir Akbou-Allaghane-Tazmal).

Elle s’étale sur les daïras de Mchedallah, Bechloul et Bouira. Cet espace oléicole se poursuit à l’ouest, avec des parcelles plus morcelées et un relief plus accidenté, sur les daïras d’El Kadiria et Lakhdaria).

Dans de moindres proportions, on rencontre l’olivier dans les communes d’El Djabahia, El Mokrani, Sou Lekmis, etc. Les nouveaux territoires de l’olivier commencent à partir de Oued El Berdi et vont jusqu’au Hauts Plateaux du sud de la wilaya.

SLIM, AGUENTOUR, THIAÂSSASSINE…

La fructification des oliviers offre un beau spectacle annonçant une bonne récolte. Maintenant, la hantise ressentie par les agriculteurs, ce sont les éventuels orages chargés de grêle et qui risquent de remettre en cause cette opulente fructification. Les pluies orageuses de la semaine passée ont été vécues avec un sentiment d’angoisse, même si, sur un autre plan, elles ont contribué au remplissage des barrages hydrauliques et à l’alimentation des nappes phréatiques.

Sur la RN33 montant de Haïzer à Tikjda, en profondeurs des deux côtés de la route, l’olivier est roi. À Slim et Aguentour, localités situées à quelques kilomètres du chef-lieu de commune, l’oliveraie côtoie la pinède, lui servant de prolongement vers les zones habitées.

Ici, tous les pâtés de maisons sont cernés par l’arbre majestueux, dont certains sujets ont plusieurs siècles d’âge. Néanmoins, on trouve aussi de jeunes plantations, récemment réalisées, qui n’en sont qu’aux premiers fruits.

Mais, elles promettent. Mohammed, la cinquantaine bien sonnée, nous apprend qu’il n’a cessé, au cours de ces dernières années, de greffer de jeunes pieds d’oléastres qu’il ramène sur son passage, partout où il passe dans les bois.

La croupe du mont Tiaâssassine montre toute l’opulence de la région en matière de culture d’olivier. Ce genre de tissu végétal embrassant plusieurs dizaines de mètres d’un seul tenant, se répète à volonté jusqu’aux derniers « souffles » de l’arbre permis par l’altitude, laquelle commence à devenir intenable à partir de Toumliline, constituant les derniers empans du versant montagneux avant d’accéder à la station climatique de Tikjda.

L’olivier, devenant rare à partir de mille mètres d’altitude, s’estompe et cède la place au chêne vert, puis au cèdre de l’Atlas. Le même spectacle se reproduit à Izemmouren- localité bien nommée-, Imerkalen, Tessala, Taghzout,…etc.

À M’chedallah, ex-Maillot, la culture de l’olive demeure presque une activité à nulle autre pareille. Elle constitue l’âme de cette haute vallée de la Soummam.

C’est la région qui donne l’exemple le plus prégnant de ce que peut être l’oléiculture dans la wilaya de Bouira. De la commune d’El Adjiba jusqu’à la sortie de Chorfa, en passant par Semmach, Ighram, Ahnif, le terroir sent et expire l’olivier et l’huile d’olive.

C’est une composante essentielle de l’économie locale. Sur les deux routes qui bordent le cours de l’Oued Sahel, il n’y a de place que pour les huileries, lesquelles prennent parfois des noms de famille, parfois des noms qui évoquent les sommets de montagne ou des cours d’eau.

Beaucoup d’investisseurs ont opté pour ce créneau depuis le milieu des années 2000, acquérant des machines à partir de l’Italie, de la France ou de l’Espagne, ou autres pays méditerranéens producteurs de l’huile d’olive.

LES NOUVEAUX TERRITOIRES DE L’OLIVIER

La plaine de l’Oued Sahel, sur la moyenne Soummam, comptantplus de 1000 hectares d’oliveraie,est promise à un avenir très riche,du fait qu’elle est concernée par le périmètre irriguée crée dans la région à partir des eaux du barragede Tilesdit.

Ce périmètre fera jonction, via leraccordement au barrage de Tichy-Haf, dans la wilaya de Béjaïa, avec le périmètre de Tazmalt-Allaghane-Akbou. L’huiled’olive de M’Chadallah jouitd’une réputation hors des frontières nationales, du fait que sontaux d’acidité est inférieur à0,08%.

Le patrimoine oléicole de la daïra de M’Chedallah va au delà de l’Oued Sahel, pour garnir les versant des Ath Mansour et de la région d’Ahnif. Là, il fait jonction avec Imallahan et Ath Laqsar, jusqu’à aboutir à la zone médiane de la wilaya de Bouira, au niveau de la commune de Oued El Berdi qui commence à se faire un nom dans la production oléicole.

Disposant actuellement d’un patrimoine oléicole de plus de 37000 ha, la wilaya de Bouira a commencé à étendre ce créneau à des zones jusqu’ici « hermétiques » à la culture de l’arbre. Il s’agit du flanc Sud, constitué des communes des Hauts Plateaux et qui, à partir du milieu des années2000, ont vu plusieurs programmes de plantation d’oliviersy être initiés.

La zone la plus emblématique de ce flanc est, sans aucun doute, celle englobant les localités de Zeboudja et Touta, dans la commune de Dirah, relevant de la daïra de Sour El Ghozlane. Ici, on est à moins de 200mm de pluie par an, c’est-à-dite de la quasi-aridité.

Et pourtant, sur de vastes étendues, l’olivier commence à acquérir une place de choix, supplantant les anciens parcours squelettiques et certaines parcelles céréalières à très arboriculteurs.

Les programmes FNRDA, de la Banque mondiale(PER 2), des PPDRI, de la Ceinture verte et d’autres investissements publics, se sont succédé pour créer des espaces de verdure dans un milieu steppique à tradition quasi exclusivement pastorale. Les jeunes oliveraies ont, pour une grande partie, bénéficié de la mobilisation de l’eau par puits, forages ou bassins de stockage.

L’effort continue dans le cadre de la relance du projet du Barrage vert dans ce couloir steppique. En effet, une composante de ce projet compte la plantation d’oliviers, en plus des autres espèces (pistachier, amandier et, naturellement, les espèces forestières et pastorales).

De son côté, la compagnie nationale Mobilis, dans une initiative citoyenne, a lancé, au cours de la campagne passée, un projet national de mécénat orienté vers la distribution de plants d’oliviers aux agriculteurs. Dans la wilaya de Bouira, ce projet a permis de faire une extension du périmètre d’olivier sur 80 ha.

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