Après son adoption en Conseil des ministres le 17 juillet dernier, l’ordonnance portant loi de finances complémentaires pour l’année 2022 vient d’être promulguée et publiée au dernier numéro du journal officiel, le chef de l’Etat ayant légiféré en l’absence du Parlement parti en congé.
Par Mohamed Naïli
Plusieurs mesures et orientations nouvelles sont contenues dans ce texte sous forme de rectificatifs à certaines dispositions de la loi de finances initiale promulguée au début de l’année en cours. Au sens global, les nouvelles mesures, tant fiscales, douanières ou financières, mises en œuvre à travers le texte de loi en question ont pour principale finalité à soutenir le pouvoir d’achat des ménages à faible et moyen revenus, soutenir certaines catégories de producteurs dans divers secteurs ou réguler les importations et rationaliser les dépenses en devises.
Ainsi, pour ce qui est de la prévention de la détérioration du pouvoir d’achat des ménages, aucun nouvel impôt ou taxe supplémentaire n’est incluse dans la LFC 2022, comme cela a été recommandé par le chef de l’Etat lorsqu’il a demandé, rappelle-t-on, la révision du texte avant de le passer en deuxième lecture en Conseil des ministres.
Cependant, des produits de large consommation qui ont été jusqu’ici soumis à des taxes douanières à l’importation viennent d’être exonérés de la TVA et des droits de douanes lorsque leurs prix dépassent les plafonds fixés par les pouvoirs publics, à l’instar du sucre brut.
« (…) Le sucre brut (…) est exempté, à compter du 1er janvier 2022, des droits de douanes et de la taxe sur la valeur ajoutée, lorsque son assujettissement entraîne un dépassement des prix plafonds fixés par voie réglementaire. Le sucre blanc produit localement est exempté, à compter du 1er janvier 2022, de la taxe sur la valeur ajoutée, aux différents stades de la distribution, lorsque les prix plafonds sont dépassés», est-il énoncé à l’article 27 de la LFC modifiant les dispositions de l’article 148 de la LF initiale.
Pour les startups, de nouvelles dispositions viennent d’être prises pour les dispenser de certaines taxes douanières, comme la taxation forfaitaire sur les marchandises neuves ou usagées non destinées à la vente.
L’article 22 de la LFC, modifiant l’article 135 de la LF initiale, stipule à cet égard: «Est dispensé des formalités du contrôle du commerce extérieur et des changes, le dédouanement des marchandises neuves ou usagées destinées à l’exercice d’une activité professionnelle n’impliquant pas la commercialisation en l’état, (…) Ce dédouanement entraîne (…) une taxation forfaitaire de 25% de la valeur de la marchandise (…) Les start-up sont dispensées du paiement de la taxation forfaitaire dans ce cadre».
Dans le secteur de l’agriculture, outre la disposition contenue à l’article 30 donnant un caractère obligatoire à la livraison des récoltes céréalières (blé tendre, blé dur et orge) à l’OAIC (Office interprofessionnel des céréales) lorsqu’il s’agit de cultures auxquelles des subventions de l’Etat ont été allouées, l’article 4 de la LFC modifie l’article 36 de la LF de janvier dernier pour accorder d’autres exonérations à certaines catégories de professionnels du secteur. Ainsi, il est stipulé que «(…) Sont exonérés de l’impôt sur le revenu global pendant une durée de dix (10) ans, les revenus résultant des activités agricoles et d’élevage exercées dans: les terres nouvellement mises en valeur, et ce, à compter de la date d’entrée en exploitation ; les zones de montagne (…) Les terres et les zones susvisées, sont celles définies par la législation et la réglementation en vigueur».
Le déficit budgétaire augmente de plus de 430 milliards DA
Dans le secteur de l’habitat, la nouveauté est la reconduction de la disposition donnant la possibilité aux attributaires d’habitations à caractère social d’acquérir les logements dont ils ont bénéficié. A cet égard, l’échéance du 31 juillet 2023 a été fixée aux occupants de logements sociaux pour manifester leur souhait d’acquérir ces logements auprès de l’OPGI (Office de promotion et de gestion immobilière).
Pour l’expert économique et analyste financier Mahfoud Kaoubi, dans sa la lecture du volet législatif de cette LFC 2022, estime que c’est un texte qui s’inscrit dans le cadre «des orientations du président de la République afin de ne pas alourdir les charges et ne pas toucher le pouvoir d’achat du citoyen, déjà marqué par une inflation assez importante durant les six premiers mois de l’exercice 2022». Cependant, pour cet expert, «la confirmation de la possibilité de cession des logements sociaux pour les bénéficiaires initiaux et aussi la résolution du problème resté pendant, qui est celui des professions libérales après que cette loi de finances complémentaires les ait imposés au régime réel» sont parmi les dispositions les plus importantes.
Au chapitre des répartitions budgétaires, il y a lieu de noter une importante révision à la hausse des prévisions tracées dans la loi de finances initiale, notamment le budget de fonctionnement, ce qui a entrainé également une hausse significative du déficit budgétaire. «Les modifications ou les compléments par rapport à la loi de finances initiale de 2022 ont été principalement liées à des ajustements et des dépenses et des recettes», commente l’expert Kaoubi.
A ce titre le montant global des dépenses passe en effet de 9.857 milliards de dinars à 11.610 milliards de dinars, soit une augmentation de 1.753 milliards de dinars, dont une grande partie est affectée pour la couverture des dépenses de fonctionnements. Ces dernières enregistrent en conséquence une augmentation de 1.386 milliards de dinars.
Ces révisions à la hausse sont ainsi suivies d’un accroissement relativement important du déficit budgétaire qui passe de 4.175 milliards de dinars à 4.609 milliards de dinars, soit une augmentation de 434 milliards de dinars.
M. N.