Devenu obsolète et inefficace face aux fluctuations des prix des produits agricoles qui perdurent depuis plusieurs mois, le Système de régulation des produits agricoles de large consommation (Syrpalac), est définitivement abandonné. L’information a été confirmée avant-hier par le directeur de la régulation et du développement des productions agricoles au ministère de l’Agriculture et du développement rural, M. Ali Zouba, lors d’une intervention à la chaîne 3 de la radio nationale.
Par Mohamed Naïli
« Chaque chose a un début et une fin », a-t-il commenté en évoquant ce dispositif, mis en œuvre en 2008, et dont le principe de fonctionnement consiste en l’achat par des organismes publics et/ou des opérateurs privés, disposant de chambres froides, des surplus de production lors des conjonctures de surabondance des récoltes à des prix contractuels négociés avec les agriculteurs et leur réinjection sur le marché durant les périodes de baisse de l’offre à des prix régulés.
Sans avancer de détails sur la démarche qu’entreprendra le ministère de tutelle à l’avenir pour organiser le marché des produits agricoles, et, surtout, endiguer la flambée des prix (devenue désormais quasi chronique et n’épargnant aucun produit), M. Zouba a fait comprendre que la régulation du marché se fera selon une nouvelle approche qui tiendra compte des nouveaux paramètres. Il a, de ce fait, annoncé de nouveaux projets pour le renforcement des capacités de stockage avec la réalisation de nouveaux silos pour les céréales et des chambres froides pour les produits frais.
Si, à sa mise en œuvre, le Syrpalac a contribué à la régulation du marché en y épongeant les quantités excédentaires et éviter aux agriculteurs l’effondrement des prix et leur réintégration durant les périodes de baisse de production, il a fini par perdre de son efficacité ces deux dernières années. Et ce, en n’ayant aucun impact sur les prix et suite au désengagement de nombreux agriculteurs estimant que le dispositif est peu rémunérateur compte tenu des prix d’achat que leur proposent les organismes de stockage.
Le cas de la pomme de terre est, à ce propos, une preuve irréfutable de l’échec du Syrpalac. Ce produit se maintient en effet à des prix excessivement élevés, dépassant les 150 DA/kg dans certains marchés de détail, malgré l’annonce par le ministère de l’Agriculture de déstockage de 20 000 tonnes, dès le début de ce mois d’avril. Les viandes blanches, les œufs et plusieurs autres produits frais n’échappent pas à la spirale de la flambée malgré tous les efforts consentis dans le cadre de ce dispositif censé réguler le marché.
Fédérer les opérateurs
Au moment où, du côté du ministère de l’Agriculture, la question de la régulation du marché est encore au stade de la réflexion, de nombreux opérateurs du secteur et des spécialistes en la matière, eux, plaident pour un système qui fédérerait l’ensemble des intervenants dans la chaîne de production en amont et en aval, à partir du choix et de l’approvisionnement en semences, en fertilisants et autres produits de traitement des cultures, jusqu’aux acteurs qui interviennent dans la distribution et la commercialisation des produits.
A cet égard, pour l’agroéconomiste Ali Daoudi, chercheur et professeur à l’ENSA (Ecole nationale supérieure agronomique), « la meilleure manière d’améliorer le fonctionnement des marchés, c’est bien la mise en place d’un système de régulation transparent à travers lequel les autorités devraient contribuer à produire des données et instaurer des règles de jeu claires ».
Pour ce spécialiste des questions agricoles, la transparence du système de régulation à mettre en place est vitale, dans la mesure où « la divulgation des informations précises sur les coûts de production, les prix des matières premières importées, les besoins du marché, ainsi que le niveau du pouvoir d’achat du consommateur donneraient plus de visibilité aux opérateurs économiques pour mieux réguler leur production et afin d’éviter de travailler à perte ».
L’économiste Omar Bessaoud de l’IAMM (Institut agronomique méditerranéen de Montpellier), de son côté, plaide en faveur de la mise en place d’un système coopératif comme cela a été le cas jusqu’à la fin des années 1980, où les agriculteurs sont fédérés dans des coopératives de production et de services.
En attendant la mise en place d’un nouveau dispositif de régulation du marché, la hausse des coûts de production véhiculée par la hausse des prix des intrants, matières premières et plusieurs autres facteurs intervenant dans le parcours cultural, ainsi que la politique des subventions agricoles, constituent des paramètres à prendre en considération.