Par Lyazid Khaber
On parle souvent des rapports de confiance entre gouvernant et gouverné, ou encore entre administrateur et administré, mais l’on ignore souvent le rôle du service public dans cette tâche importante de veiller à consolider cette relation. Certes, la notion de service public évolue, subissant à son tour les contrecoups des transformations sociales, économiques et politiques profondes ; mais il demeure que l’objectif initial est le même. En Algérie, comme ailleurs dans les pays les plus développés, le service public vit une véritable crise qui révèle un malaise plus profond de l’État-providence souvent associé chez nous au Beylik, et qui, dans l’imaginaire social, exempte le citoyen lambda d’une quelconque responsabilité apparente. Or, si le mythe du service public repose sur le dogme de l’infaillibilité du management des affaires publiques et sur le postulat d’une supériorité quasi ontologique sur la gestion privée, il demeure néanmoins que l’implication du citoyen s’est avérée primordiale dans l’œuvre d’édification d’un model étatique épanoui. Souvent accusé d’être un piètre gestionnaire, imperméable aux aspirations des usagers qu’il prétend servir, le service public reste au cœur des débats de fond qui animent la société, en ce moment où l’Etat s’efforce d’apporter des réponses aux besoins exprimés par les différentes franges sociales. D’aucuns pensent, à juste titre, que l’on ne peut se passer du service public, en dépit des évolutions constatées. Le développement d’un secteur privé souvent traité, dans notre pays, comme un intrus, fausse la donne, et ne manque pas d’établir des parallèles loin d’être avantageux pour les managers publics. Tout cela à cause d’une fausse interprétation de la notion de service public. Ce dernier, contrairement aux idées reçues, n’est pas seulement l’apanage des entités (administratives, économiques, territoriales) relevant du domaine étatique. Des services vitaux pour le fonctionnement de l’Etat sont assurés par des entités relevant du domaine privé, et c’est ce qui doit inciter l’administration publique à revoir tant ses calculs que sa vision. Les exemples sont légion : éducation, presse, sécurité, salubrité publique… où le privé joue un rôle prépondérant. Et si ce secteur privé est associé à des missions relevant du service public, ce n’est ni plus ni moins que pour satisfaire à un principe fondamental du droit public, qui inspire tant le droit constitutionnel (la continuité de l’Etat) que le droit administratif, à savoir celui de la continuité du service public et de sa pérennité. Il se trouve malheureusement que ce principe est loin d’être respecté par certaines administrations, où des affaires courantes sont bloquées, parfois des mois durant, rien que parce qu’il y avait un changement à leurs têtes. Cette situation plus que préjudiciable est, pourtant, maintes fois dénoncée par les responsables au niveau du gouvernement, et même par le président de la République en personne, mais rien n’y fit. Les vieux réflexes ont la peau dure ! Ceci dit, avec l’avènement d’une nouvelle gouvernance, le principe de continuité doit être réhabilité et ce n’est qu’à cette condition que l’on pourra espérer rétablir la confiance entre gouvernants et gouvernés, et, de là jeter, les bases d’un véritable Etat de droit.
L. K.