Cela fait plusieurs années depuis que l’on parle de la transition énergétique en Algérie, sans pour autant arriver réellement à réaliser les objectifs tracés. Cette situation des plus problématiques dans un pays qui, pourtant, regorge de ressources renouvelables, ne laisse pas indifférentes les hautes autorités du pays qui, en introduisant de nouvelles mesures, comptent aller au-delà des contraintes, et d’amorcer une nouvelle dynamique de développement, où l’efficacité est le maître mot.
Par Nabila Agguini
«L’Algérie amorce une dynamique d’énergie verte en lançant un programme ambitieux de développement des énergies renouvelables (EnR) et d’efficacité énergétique. Cette vision du gouvernement algérien s’appuie sur une stratégie axée sur la mise en valeur des ressources inépuisables comme le solaire, et leur utilisation pour diversifier les sources d’énergie et préparer l’Algérie de demain. Grâce à la combinaison des initiatives et des intelligences, l’Algérie s’engage dans une nouvelle ère énergétique durable», lit-on sur le site du ministère de l’Energie. L’engagement est là, et le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, qui a rédigé un message publié dans le premier rapport annuel du Commissariat aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique (CEREFE), intitulé «Transition énergétique en Algérie : Leçons, état des lieux et perspectives pour un développement accéléré des énergies renouvelables», ne manque pas de confirmer cette tendance à aller, rapidement, vers l’instauration d’un «modèle énergétique durable», et à «asseoir les fondements d’une transition énergétique adaptée aux spécificités nationales.»
Le gouvernement déterminé à aller de l’avant
«Le gouvernement est déterminé à tout mettre en œuvre afin d’instaurer un modèle énergétique durable, où l’efficacité serait le maître mot», a indiqué M. Djerad, annonçant d’emblée que «toute action permettant une optimisation accrue de la consommation interne de l’énergie, serait encouragée au même titre que celle pouvant contribuer à prolonger la durée de vie de nos réserves d’hydrocarbures, en diversifiant les moyens de production d’énergies alternatives, notamment à base de ressources renouvelables».
De nouvelles pistes seront mises à profit : il y a, d’abord et avant tout, l’épargne qui sera faite sur l’exploitation du gaz et du pétrole pour ouvrir de nouvelles perspectives, à travers un élargissement effectif des activités pétrochimiques locales. Le développement du solaire étant mis en avant sachant qu’il permettra «d’assurer des revenus plus stables pour le pays qui, pourrait alors mener sereinement sa politique de développement, loin de certains aléas extérieurs».
Le gouvernement qui table, «à court terme», sur«des économies notables» sur la consommation intérieure d’énergie, notamment à travers l’incitation à un recours plus accru au gaz GPL/C et GNC, s’engage à créer l’écosystème approprié à une amélioration effective des cadres réglementaire et législatif régissant l’ensemble des activités énergétiques dans le pays.
Concernant le déploiement des énergies renouvelables et la généralisation de leur usage, il est prévu de mobiliser les soutiens financiers nécessaires tout en assurant un accompagnement par des transformations structurelles en matière d’environnement socio-économique, en levant toutes les entraves et autres comportements bureaucratiques qui ont prévalu jusqu’ici.
Sur ce, le Commissariat aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique (CEREFE), qui vient de publier son premier rapport annuel sur les énergies renouvelables, rappelle que «l’élaboration de ce rapport s’inscrit, donc, en parfaite harmonie avec la vision du plan d’action du gouvernement.» Il s’agit, selon le CEREFE, d’une analyse «sereine» menée sur la base de données «assez actualisées» et reflétant au mieux la réalité du secteur des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique dans le pays.
Veillant à ne pas reproduire les mêmes «schémas d’échec», le Commissariat tracer la ligne directrice qu’il entend suivre, en vue de coordonner la mise en œuvre concrète des actions planifiées, en faisant participer les parties prenantes, publiques ou privées, intéressées par leur exécution.
Une nouvelle approche s’impose…
De l’avis des différents spécialistes en la matière, une «nouvelle approche», en matière d’exploitation d’énergies renouvelables, s’avère indispensable pour éviter «l’échec» enregistré jusque-là dans la mise en œuvre du programme national relatif à ces énergies.
M. Noureddine Yassaâ n’en pense pas moins, lui qui, lors de ses différentes sorties médiatiques, met à chaque fois l’accent sur la nécessité d’adopter une nouvelle approche des ENR, qui ne considère pas la transition énergétique comme une démarche purement technique mais plutôt comme une transition sociotechnique dans des secteurs multiples.
«C’est impératif, pour éviter les mêmes facteurs d’échecs du passé qui ont causé un énorme retard dans la mise en œuvre des différents programmes», déclare-t-il.
Selon lui, les projets des ER doivent être développés selon une approche de «développement intégré», pour «permettre l’émergence d’une industrie locale du renouvelable et de l’efficacité énergétique, aider à un développement technologique effectif dans le domaine, et avoir un impact direct sur l’emploi, l’éducation, la santé et l’agriculture.»
Mais pour bien encadrer cette transition, M. Yassaâ suggère l’élaboration d’une nouvelle loi qui puisse compléter la batterie des dispositions législatives, réglementaires et institutionnelles régissant les énergies renouvelables en Algérie. Celle-ci devra permettre l’ouverture au secteur privé du marché de la production et de la commercialisation d’électricité produite à partir de sources renouvelables.
Ce sont, là, un ensemble de mesures à prendre pour pouvoir réaliser les objectifs tracés. Pour rappel, le gouvernement estime que «la concrétisation sur le terrain du programme national d’efficacité énergétique permettra de réduire graduellement la croissance de la demande énergétique. Ainsi, les économies d’énergie cumulées engrangées seraient de l’ordre de 93 millions de TEP, dont 63 millions de TEP d’ici 2030 et le reste au-delà de cet horizon.»
«C’est dire toute l’importance que revêt ce programme d’économies d’énergie, qui implique la concrétisation d’un certain nombre de mesures avec, notamment, l’implication des parties concernées, dont l’industrie publique et privée, et l’adaptation du cadre juridique régissant l’efficacité énergétique», indique-t-on encore de même source.
N. A.
C’est quoi le CEREFE ?
Placé auprès du Premier ministre, le CEREFE est un établissement public doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière, chargé d’élaborer les instruments de prospective à moyen et à long termes, en vue d’anticiper les grandes mutations énergétiques et contribuer à la définition des grandes orientations de la politique nationale de développement des énergies renouvelables et d’efficacité énergétique. En tant qu’organe indépendant, le CEREFE est, également, chargé d’évaluer la politique nationale de développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique et les outils mobilisés pour sa mise en œuvre, et proposer toute mesure de nature à l’améliorer. Le CEREFE est dirigé, depuis sa création fin 2019, par le professeur Noureddine Yassaâ.
Messaoud Khelif, secrétaire général du CEREFE
«Il y a nécessité d’assurer une gestion centralisée»
Messaoud Khelif, secrétaire général du Commissariat aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique (CEREFE), qui intervenait dimanche dernier sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, n’était pas allé du dos de la cuillère pour dénoncer les «blocages divers, engendrant d’importants retards», qui ont sérieusement entravé la mise en œuvre du chantier de la transition énergétique engagée, en 2011, et proclamé, pourtant, «priorité nationale».
Pour l’invité de la rédaction de la Chaîne III, l’Algérie reste en retard, par rapport à ses voisins immédiats. Ainsi, dira-t-il, il est grand temps de clarifier le discours et «cibler les goulots d’étranglement», afin que les choses puissent avancer correctement.
Rappelant au passage, que des 4 000 mégawatts prévus d’être mis en exploitation, grâce à l’énergie solaire pour produire de l’électricité, «il n’en a été produit, à ce jour, qu’à peine 390 mégawatts». L’orateur explique pour pouvoir remettre le chantier des énergies renouvelables sur les rails, «il y a nécessité d’en assurer une gestion centralisée».
N. A.